Strauss - Salomé - Haenchen / Dodin - ONP, sept-oct 2006
De retour de Bastille, globalement enchanté de ma soirée même si cette reprise n'égale peut être pas la série initiale, du moins sur le plan vocal.
On retrouve avec plaisir la belle production de Lev Dodine, classique et sobre mais sans faute de goût, superbement éclairée de surcroît.
Catherine Naglestad a obtenu un triomphe mérité, belle Salomé, grande performance scénique. La scène finale enthousiasme par l'investissement de la chanteuse, la facilité avec laquelle cette grande voix se déploie au-dessus d'un orchestre déchaîné. On ne peut que louer, également, le grand talent de la comédienne .Pour autant, cette Salomé manque peut être de ce grain de folie, de ce déchainement purement vocal qui font les très grandes interprètes du rôle en traduisant le côté névrotique du personnage, avec une entame très prudente, justifiée autant par des registres un peu dissociés que par les exigences de ce rôle écrasant. La confrontation avec Jochanaan a laissé quelque peu sur sa faim.
Il faut dire que cette séquence était déjà quelque peu plombée par son partenaire, un Evgeni Nikitine avec guère de voix et en tout cas certainement pas celle du rôle de Jochanaan. Le grave est faible, l'aigu poussif et précaire, le timbre est clairet et sans couleurs. L'organe est si pauvre de substance en harmoniques qu'il a du mal à passer l'orchestre. De même, le phrasé n'est guère soigné. Un prophète sans charisme vocal, et même scénique, où un Struckmann triomphait il y a trois ans.
Chris Merritt est par contre un Herodes sublime, comédien génial, d'une présence scénique époustouflante. Il faut redire la grandeur de cet artiste, pas moins grand aujourd'hui dans ces rôles de caractère (où il n'a guère de rival) que dans ses fringants Rossini naguère.
Herodiade efficace de Jane Henschel. Narraboth un peu contraint de T. Muzek, les petits rôles n'appelant aucune réserve.
En fosse triomphent l'orchestre de l'ONP et le Maestro Haenchen, donnant de l'oeuvre une lecture analytique et contrastée, faisant ressortir chacun des pupitres de sa phalange ainsi que la luxuriance de l'orchestration straussienne. Le chef allemand est soucieux de conserver un équilibre fosse-plateau satisfaisant tout en n'hésitant pas à lancer sa formation dans des paroxysmes sonores aussi soudains que bienvenus. Strauss, c'est fait pour faire du bruit. L'orchestre sonne magnifiquement.
Une très belle Salomé et une très très belle soirée.
On retrouve avec plaisir la belle production de Lev Dodine, classique et sobre mais sans faute de goût, superbement éclairée de surcroît.
Catherine Naglestad a obtenu un triomphe mérité, belle Salomé, grande performance scénique. La scène finale enthousiasme par l'investissement de la chanteuse, la facilité avec laquelle cette grande voix se déploie au-dessus d'un orchestre déchaîné. On ne peut que louer, également, le grand talent de la comédienne .Pour autant, cette Salomé manque peut être de ce grain de folie, de ce déchainement purement vocal qui font les très grandes interprètes du rôle en traduisant le côté névrotique du personnage, avec une entame très prudente, justifiée autant par des registres un peu dissociés que par les exigences de ce rôle écrasant. La confrontation avec Jochanaan a laissé quelque peu sur sa faim.
Il faut dire que cette séquence était déjà quelque peu plombée par son partenaire, un Evgeni Nikitine avec guère de voix et en tout cas certainement pas celle du rôle de Jochanaan. Le grave est faible, l'aigu poussif et précaire, le timbre est clairet et sans couleurs. L'organe est si pauvre de substance en harmoniques qu'il a du mal à passer l'orchestre. De même, le phrasé n'est guère soigné. Un prophète sans charisme vocal, et même scénique, où un Struckmann triomphait il y a trois ans.
Chris Merritt est par contre un Herodes sublime, comédien génial, d'une présence scénique époustouflante. Il faut redire la grandeur de cet artiste, pas moins grand aujourd'hui dans ces rôles de caractère (où il n'a guère de rival) que dans ses fringants Rossini naguère.
Herodiade efficace de Jane Henschel. Narraboth un peu contraint de T. Muzek, les petits rôles n'appelant aucune réserve.
En fosse triomphent l'orchestre de l'ONP et le Maestro Haenchen, donnant de l'oeuvre une lecture analytique et contrastée, faisant ressortir chacun des pupitres de sa phalange ainsi que la luxuriance de l'orchestration straussienne. Le chef allemand est soucieux de conserver un équilibre fosse-plateau satisfaisant tout en n'hésitant pas à lancer sa formation dans des paroxysmes sonores aussi soudains que bienvenus. Strauss, c'est fait pour faire du bruit. L'orchestre sonne magnifiquement.
Une très belle Salomé et une très très belle soirée.
Globalement d'accord avec abaris.
Sauf que je trouve Henschel largement meilleure que Silja, donc sur certains points la production est meilleure maintenant qu'en 2003.
J'aime bien la façon dont tu écris les noms russes, en "ine", ave un e comme on le faisait autrefois...
La production de Dodin est effectivement magnifique pour ses lumières et ses couleurs, j'ai du mal à comprendre ceux qui la trouvent inintéressante. La direction d'acteur est fine, et c'est sur ce point que je suis en désaccord avec toi, concernant l'interprétation de Naglestad. En fait, elle joue Salomé comme une jeune fille bien plus fûtée que ne le faisait Mattila qui jouait, dans mon souvenir, la carte de la jeune femme passionnée et sensuelle. La Salomé de Naglestad est, et c'est d'ailleurs ce que demande le livret, une jeune femme très intelligente, qui se rend compte des enjeux présents entre sa mère et Hérode, qui entrevoit le sens de l'existence de Jochanaan, et surtout qui réagit avec une grande finesse à sa discussion. Si, en effet, le duo de la lionne hors de la cage et du prophète en cage est musicalement le moment le moins réussi de la soirée, c'est le plus réussi théâtralement. Je vous conseille d'observer Naglestad aux jumelles, elle est fascinante de justesse psychologique, d'à-propos dans ses réactions aux propos mystiques et mystérieux du prophète. L'interprétation vocale est pour moi cohérente avec cette interprétation théâtrale. C'est une Salomé froide, réfléchie, ce n'est pas uniquement un être de désirs, et c'est passionnant. Il faut aussi remarquer que Naglestad est très prudente au début, qu'elle se réserve pour la fin de l'opéra, vocalement, et donc qu'elle se ménage dans le duo. C'est tout de même le rôle le plus dramatique qu'elle ait jamais inclu à son répertoire et il est normal que, n'était pas (encore) une soprano dramatique, elle porte l'accent sur ce côté de Salomé plutôt que sur celui que Mattila pouvait se permettre de mettre en évidence.
Très décevant en effet le Jochanaan de Nikitin, espérons que c'est parce qu'il est dans un mauvais jour. Je crois que c'est aussi une prise de rôle pour lui.
Fabuleux Merritt, excellente Henschel, etc.
je te rejoins totalement là-dessus.
Sauf que je trouve Henschel largement meilleure que Silja, donc sur certains points la production est meilleure maintenant qu'en 2003.
J'aime bien la façon dont tu écris les noms russes, en "ine", ave un e comme on le faisait autrefois...
La production de Dodin est effectivement magnifique pour ses lumières et ses couleurs, j'ai du mal à comprendre ceux qui la trouvent inintéressante. La direction d'acteur est fine, et c'est sur ce point que je suis en désaccord avec toi, concernant l'interprétation de Naglestad. En fait, elle joue Salomé comme une jeune fille bien plus fûtée que ne le faisait Mattila qui jouait, dans mon souvenir, la carte de la jeune femme passionnée et sensuelle. La Salomé de Naglestad est, et c'est d'ailleurs ce que demande le livret, une jeune femme très intelligente, qui se rend compte des enjeux présents entre sa mère et Hérode, qui entrevoit le sens de l'existence de Jochanaan, et surtout qui réagit avec une grande finesse à sa discussion. Si, en effet, le duo de la lionne hors de la cage et du prophète en cage est musicalement le moment le moins réussi de la soirée, c'est le plus réussi théâtralement. Je vous conseille d'observer Naglestad aux jumelles, elle est fascinante de justesse psychologique, d'à-propos dans ses réactions aux propos mystiques et mystérieux du prophète. L'interprétation vocale est pour moi cohérente avec cette interprétation théâtrale. C'est une Salomé froide, réfléchie, ce n'est pas uniquement un être de désirs, et c'est passionnant. Il faut aussi remarquer que Naglestad est très prudente au début, qu'elle se réserve pour la fin de l'opéra, vocalement, et donc qu'elle se ménage dans le duo. C'est tout de même le rôle le plus dramatique qu'elle ait jamais inclu à son répertoire et il est normal que, n'était pas (encore) une soprano dramatique, elle porte l'accent sur ce côté de Salomé plutôt que sur celui que Mattila pouvait se permettre de mettre en évidence.
Très décevant en effet le Jochanaan de Nikitin, espérons que c'est parce qu'il est dans un mauvais jour. Je crois que c'est aussi une prise de rôle pour lui.
Fabuleux Merritt, excellente Henschel, etc.
Comme il parle bien!abaris a écrit : En fosse triomphent l'orchestre de l'ONP et le Maestro Haenchen, donnant de l'oeuvre une lecture analytique et contrastée, faisant ressortir chacun des pupitres de sa phalange ainsi que la luxuriance de l'orchestration straussienne. Le chef allemand est soucieux de conserver un équilibre fosse-plateau satisfaisant tout en n'hésitant pas à lancer sa formation dans des paroxysmes sonores aussi soudains que bienvenus. Strauss, c'est fait pour faire du bruit. L'orchestre sonne magnifiquement.
je te rejoins totalement là-dessus.
L'opéra semble voué à être le dernier refuge du besoin de la beauté artistique en toc.
(Bernard Shaw, 1898)
(Bernard Shaw, 1898)
et on devrait avoir une interview ODB avec Naglestad, mais pas tout de suite : le temps qu'elle ait pris du recul par rapport à cette production, à sa prise de rôle.
Catheriiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiine!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!
Catheriiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiine!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!
L'opéra semble voué à être le dernier refuge du besoin de la beauté artistique en toc.
(Bernard Shaw, 1898)
(Bernard Shaw, 1898)
grand-guignolesque
Le lundi 18, j'étais dans une galerie du haut, je me suis dit jamais je n'ai vu la salle de la Bastille aussi vide et j'en ai fait la remarque à mon voisin, le premier balcon était désert, mais juste avant que ça commence, il s'est comme par miracle totalement rempli, tous ceux qui avaient des places à 9 euros ont rappliqué, on avait alors l'impression que la salle était pleine, il y avait donc une réserve de public prête à prendre d'assaut les meilleures places.Neil_Schicoff_tenor a écrit :
La salle était à peu près pleine?
Hier soir, samedi 23, la salle était à peu près pleine, il y avait cependant quelques trous dans le parterre.
Il y a des beautés prodigieuses dans cette oeuvre, dans ce texte bien ficelé, poétique sans atteindre les sommets de la poésie, dans la partition et plus particulièrement dans la partition orchestrale mais les scène finales avec la tête du prophète supplicié dans le plateau d'argent, présentées dans cette production de manière fort réaliste, sont d'un grand-guignolesque achevé et je dois dire que j'ai du mal à les accepter même si elles donnent à l'oeuvre son sens.
Faustin
- Christopher
- Basse
- Messages : 2682
- Enregistré le : 10 janv. 2004, 00:00
- Localisation : sud
Le bouche-à-oreille a fonctionné ! Ce n'est que justice car c'est une très belle reprise d'une production que je trouve assez réussie dans l'ensemble.Christopher a écrit :à ma grande surprise lundi soir au guichet de l'ONP, il n'y a plus de places à moins de 70 Euros !! je n'irai donc pas voir cette reprise.
Tu peux toujours prendre une place à 5€ dans ce cas et te replacer au parterre par la suite...Christopher a écrit :à ma grande surprise lundi soir au guichet de l'ONP, il n'y a plus de places à moins de 70 Euros !! je n'irai donc pas voir cette reprise.
Simple et efficace!
Sinon, si tu le peux, tu peux investir dans une place de dernière minute à 25€.
Bonjour,
Une petite question : à la première, j'ai eu l'impression que lorsqu'il était "dans la cave" Jochanaan était légérement sonorisé, voire qu'il y avait une petite saturation des enceintes ...
Avez vous eu la même impression ?
Perrine
Une petite question : à la première, j'ai eu l'impression que lorsqu'il était "dans la cave" Jochanaan était légérement sonorisé, voire qu'il y avait une petite saturation des enceintes ...
Avez vous eu la même impression ?
Perrine
Le problème quand on trouve une solution, c\'est qu\'on perd une question.
La représentation de ce soir était la meilleure depuis le début. Nikitin était bien meilleur qu'aux deux premières, je n'ai pas remarqué qu'il était sonorisé, si c'était le cas c'était raté car depuis les coulisses on l'entendait très mal.
Naglestad m'a donné l'impression, à la différence des deux premières, de se lâcher complètement dès le début, de ne pas s'économiser pour la fin, et ça a marché!
Naglestad m'a donné l'impression, à la différence des deux premières, de se lâcher complètement dès le début, de ne pas s'économiser pour la fin, et ça a marché!
L'opéra semble voué à être le dernier refuge du besoin de la beauté artistique en toc.
(Bernard Shaw, 1898)
(Bernard Shaw, 1898)