Du temps du cinéma muet la musique était "extérieure" à l'oeuvre cinématographique qui ne comportait pas de bande son, elle pouvait consister en un simple accompagnement piano "live" pas forcément très élaboré ou en une véritable oeuvre symphonique -je pense évidemment à
Pacific 231 l'un des morceaux de la musique composée par
Arthur Honegger pour le film la "
roue" d'
Abel Gance, et elle couvrait en général toute le film du début à la fin.
Le mariage entre la musique
d'Honegger pour rester dans cet exemple novateur et emblématique de la relation complexe entre "accompagnement musical" et "musique de film", et le montage serré, obsessionnel, fantastique d
'Abel Gance, était absolument parfait, l'un renforçant l'autre dans ce mélodrame ferroviaire génial.
Depuis que le cinéma comporte une ou plusieurs bandes sons, il arrive qu'on ne fasse guère attention à la musique, celle-ci ne servant que d'enrichissement de la bande-son ou n'étant parfois même qu'un pot-pourri de chansons ou de morceaux de musique déjà enregistrés et qui servent alors à "illustrer" une époque ou des faits de société.
Mais il y a aussi un genre "musique de film" oeuvre d'un compositeur en tant que tel, de qualité, spécialisé dans le genre (mais pas forcément) et dont la composition donne ses marques de noblesse à l'oeuvre de manière aussi importante que l'action, le scénario, les acteurs, le tournage etc etc
C'est presque toujours le cas des musiques composées par
John Williams (qui ont d'ailleurs été déjà jouées seules sans le film pour lesquelles elles ont été composées) et tout particulièrement de celle de
Star Wars qui a pour particularité d'avoir été écrite pour une "saga" de 8 films (bientôt 9) sur quarante ans par le même compositeur.
Incontestablement la célèbre musique de
Star Wars fait partie de la "légende" de cette vaste fresque de science fiction qui met en scène nombre de mythes similaires à ceux qui ont été utilisés par la tétralogie de Wagner. Williams a repris la structure musicale des
leitmotivs accompagnant les personnages et fait astucieusement évoluer la manière d'interpréter ces leitmotivs en fonction des situations. Les thèmes sont riches, variés et se retiennent facilement (ce qui rend la musique d'autant plus populaire mais c'est tout aussi vrai de certains airs de Verdi ou de Wagner), et l'orchestration, sans être révolutionnaire, a une incontestable "tenue" : instruments variés en soliste, reprise des thèmes par les cordes, ou les vents, double formations de cuivres très puissantes et percussions omniprésentes qui peut donner parfois l'impression d'un style pompier, impression assez vite démentie par les modifications rapides de style.
La musique de Star Wars occupe probablement près de 90% du film.
Le pari de la Philharmonie n'est pas banal puisqu'il s'agit d'un véritable orchestre (l'ONDIF) dirigé par un chef fort courageux puisqu'il doit, au millimètre, accompagné des images sans jamais se décaler alors que l'orchestre ne joue pas en permanence. La PP a prévu une légère sonorisation de certains instruments (célesta, piano, harpe par exemple) pour leur assurer une clarté d'acoustique aux moments-clés où ils interviennent sans être couverts par... la bande son du film qui est tout sauf cool (c'est la guerre...).
Et c'est très réussi, très plaisant, une petite curiosité-découverte même pour quelqu'un qui comme moi a vu
Star Wars à sa sortie (1980 pour
l'Empire contre-attaque) et pas mal de fois depuis lors.
L'épisode d'aujourd'hui est le plus sombre et le plus dramatique de la première trilogie. C'est l'heure des désillusions, des défaites et des dures initiations. Si la partition composée par Williams reste fidèle pour l'essentiel à celle qu'il avait proposé au premier épisode (qui s'appelait "la guerre des étoiles" tout simplement, de mon temps...), on voit qu'ill s'est attaché à complexifier ses leitmotivs, les entremêlant, en rajoutant pour les nouveaux personnages-clé (Ioda en particulier l'un des personnages les plus géniaux sortis de l'imagination de Lucas), et les transformant (de majeur à mineur, ponctués ou non par les percussions, joués par des instruments sonores ou lyriques etc etc).
Bref, l'orchestre s'en donne à coeur joie, les spectateurs sont scotchés, silencieux et fort attentifs (pas une toux...) même les enfants.
J'ai apprécié que la musique "live" commence dès le thème de la Century Fox, avant le silence qui précède le lancement du thème principal de Star Wars et que l'orchestre joue encore durant tout le long générique final, concluant par deux accords magistraux tandis que le titre de la saga s'affiche à nouveau, final impressionnant.
Et chapeau à l'orchestre et à son chef qui joue deux fois vendredi (épisode 1) et deux fois samedi (épisode 2)...