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par enrico75 » 13 août 2017, 14:45
Du spectacle proposé par Arte, j'ai d'emblée envie de dire qu'il est visuellement froid et assez laid en raison de décors modernes assez immondes et je n'ai pas eu l'impression d'assister à une direction d'acteurs flamboyante. Du coup sur le plan visuel au global j'ai eu plus de plaisir à regarder la production d'Orange (la magie du lieu y étant aussi forcément un peu pour quelque chose).
Sur le plan de la direction orchestrale, Riccardo Muti s'est peut-être un peu "Karajanisé" par des tempi parfois moins vifs et un legato orchestral plus alangui. Ceci dit il déroule une pâte orchestrale somptueuse avec toujours son sens de l'architecture et une pulsation toute verdienne. Il faut avoir dans l'oreille la toute première intégrale lyrique officielle de Riccardo Muti qui est justement Aida de Verdi (avec Caballé, Domingo, Cossotto, Ghiaurov) chez EMI (aujourd'hui Warner) pour mesurer l'évolution de sa direction orchestrale. C'est incontestablement très différent, c'était déjà sensationnel à l'époque et pourtant ce qu'on a eu hier était très supérieur parce qu'il y a une âme qu'il n'y avait pas à ce point là dans l'intégrale studio. Alors après, la comparaison avec Arrivabeni, pourtant fort bon chef, ne s'impose plus ... Celle qui s'impose en revanche, c'est avec Pappano qui est justement le chef de la dernière intégrale studio WARNER. Je pense justement que la direction de Pappano, fort belle, se rapproche davantage de celle de Muti, il y a plus de 40 ans. Dans cet ouvrage, mon panthéon personnel des chefs se constituait de Karajan 1, Mehta 1, Muti et Levine! S'y est rajouté récemment Pappano et vient de s'y rajouter Muti 2 (car je ne doute pas que cette Aida fera l'objet d'une parution CD ou DVD)
Concernant les chanteurs, je suis un peu plus partagé dans mes comparaisons proches et lointaines ...
Pour le Roi, Salzbourg l'emporte (mais ça, ce n'était pas bien difficile! lol) mais c'est Orange qui gagne avec Ramfis, haut la main!
Pour le reste de la distribution, c'est évidemment Salzbourg qui tient globalement le meilleur casting (avec toutefois quelques sérieuses réserves)
Quelle belle voix que celle de Luca Salsi! On a l'impression en l'écoutant de replonger dans une époque qu'on finissait par penser révolue: celle où les rôles de baryton-Verdi étaient tenus par des barytons-Verdi! il est de très loin supérieur à Kelsey et même à Tézier, pourtant de grande eau mais au timbre moins latin et au slancio beaucoup moins verdien.
C'est Ekaterina Semenchuk qui va souffrir des comparaisons: C'est une belle Amnéris mais qui a eu le tort bien involontaire de passer après Anita Rachvelishvili qui a incarné le rôle de manière assez incandescente à Orange, mais même si on la compare à elle-même dans la version Pappano, on la sent moins à l'aise, plus crispée vocalement avec un vibrato parfois un peu trop ostensible ... Ceci dit on reste à un très haut niveau ...
Je vais être beaucoup plus sévère avec Francesco Meli qui, certes, m'a délivré visuellement des postures bovino-grotesques d'Alvarez (de ça je le remercie car il est quand même beaucoup plus agréable à regarder!) mais qui, malheureusement n'a pas été un Radamès spécialement convaincant non plus mais pour plein d'autres raisons: sur le plan scénique, je l'ai trouvé terriblement indiffférent et j'ai envie de dire: comme d'hab! Déjà dans d'autres rôles, il m'a fait cette impression d'avoir un visage imperméable à toute forme d'émotion ... C'est tout de même assez surprenant ... Et puis alors vocalement, où était passé Radamès ?? Meli chante bien, de manière nuancée mais il manque les moyens vocaux adéquats. Que ça sonne étriqué!!! Il a été tout le contraire d'Alvarez (qui lui a davantage les moyens mais pas le reste!). Du coup moi aussi je me pose la question: quels sont les grands Radamès actuels dans le circuit ? je crains bien qu'il n'y en ait aucun d'authentique. Certains vont répondre qu'il y a Kaufmann, le Radamès de la version Pappano. Moi je réponds oui et non parce que Kaufmann a été flatté par le confort du studio et par la salle de concert à Rome (j'ai le live et déjà là, on entend quand même que la voix est beaucoup moins grande que celle de sa partenaire ...) et qu'il n'a jamais chanté le rôle scéniquement ...
On arrive à Netrebko! Eh ben je pense exactement la même chose que Zigfrid et j'irai même plus loin que lui: voilà plus de 30 ans que le rôle d'Aida n'avait pas été doté d'un matériau vocal d'une telle qualité. Elle a exactement la voix qui convient avec une richesse de timbre, une opulence de la largeur vocale, une générosité incroyable de la projection, une ligne, un aigu qu'elle sait diminuer merveilleusement (on sent de surcroit que Muti a veillé sur elle), tout était à un niveau superlatif qui la place d'emblée évidemment au-dessus de O'Connor (il n'y a même pas à comparer ...) mais également au-dessus de Harteros (pourtant fort belle Aida pappanesque). Oui il faut remonter au moins à Aprile Millo et même au-delà pour retrouver une Aida de cette nature!
Au final, une soirée de grande qualité artistique mais non sans défauts !
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désolé mais en salle les décors étaient plutôt réussis avec des magnifiques camaïeux pour les costumes mais peut-être j ai des gouts de chiotte
d 'accord pour le reste mais Meli m'a surpris par sa puissance vocale supérieure à celle de JK même si ça reste un peu impersonnel(je n'ai pas encore vu la video)