La mise en scène doit-elle respecter le livret ?

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doudou
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Message par doudou » 03 nov. 2004, 14:51

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Nico
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Message par Nico » 03 nov. 2004, 16:34

Tous ceux qui ont lu mes interventions savent que je vais répondre que le respect du Livret n'est pas toujours nécessaire, voir qu'il est conseillé l'irrespect ! Surtout dans le domaine de l'opéra où les livrets sont souvents assez faibles et quelquefois lamentables. Quand aux indications des auteurs ou compositeurs sur les décors, mouvements etc..., soyons honnêtes, s'ils étaient scrupuleusement respectés, nous ne serions plus très nombreux à être passionnés par l'Opéra, tant il semblerai vieillot et ennuyeux.
Bien sûr cela n'empêche pas qu'il y a des gens nuls et sans profondeurs qui font de bien minables "trahisons" des oeuvres et d'autres très talentueux qui font de superbes "trahisons" !
Et je met Marthaler dans cette deuxième catégorie. :P

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Gioachino
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Message par Gioachino » 03 nov. 2004, 18:22

Conseiller l'irrespect, non, Nico, faut pas pousser!!
Je pense que les CONTRAINTES poussent les artistes à être plus créatifs, à faire des découvertes, à aller plus loin... Alors pas question de faire l'impasse sur le livret!

Comme je l'ai dit plus haut, je suis pour le respect du livret (situations ET dialogues) sans forcer les metteurs en scène à suivre à la lettre les indications de décors. Mais si le livret demande un décor grandiose, je ne vois pas pourquoi on ne ferait pas un décor grandiose (sans reproduire minutieusement le fleuve d'or)!!!

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Message par tuano » 03 nov. 2004, 18:28

Lorsque Peter Sellars a fait une nouvelle production de Saint François d'Assise, Olivier Messiaen lui a fait totalement confiance alors que son livret (c'est Messiaen qui l'a écrit lui-même) donnait des indications très précises, notamment pour les costumes. Il ne pouvait pas ignorer que Peter Sellars ne suivrait pas les indications du livret à la lettre. Il était certainement très heureux à l'idée de découvrir une nouvelle interprétation de son oeuvre malgré les trahisons du texte écrit.

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Message par Gioachino » 03 nov. 2004, 18:57

Tuano, ton expérience te permet d'etayer tes arguments par de nombreux exemples. Ce n'est pas mon cas :(

J'ai quand même un exemple (qui date mais qui ne datera plus le 18/11).
"La cenerentola" de Rossini au TCE en 2002 (juin) était transposée (MES hilarante d'Irina Brook) mais elle ne trahissait pas le livret (même si le méchant papa et ses filles vivaient dans un bar napolitain d'aujourd'hui, etc...)!!! Les dialogues ne paraissaient jamais déplacés même s'ils étaient transposés (un peu comme lorsque tu parles de la mise en scène de Katia : le personnage admire la volga sur un poster mais il l'admire quand même et ça donne un toute autre dimension!).

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Message par Nico » 03 nov. 2004, 18:59

Conseiller l'irrespect, non, Nico, faut pas pousser!!
Que veux-tu, je suis un incorrigible iconoclaste et aime par dessus tout la provocation! Mais aussi tout ce qui dérange, trouble ou choque! Je ne suis jamais autant satisfait d'un spectacle que quand j'ai été choqué, au moins ça me fait réflechir, ça me bouge, même si je ne suis pas d'accord d'ailleurs.

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Message par Gioachino » 03 nov. 2004, 19:16

Eh!!!! Tu me prends pour qui?
Lis donc un peu les autres messages que j'ai posté dans ce fil de discussion!
Je suis peut-être un peu trop modéré à ton goût mais tu devrais plutôt convaincre ceux qui pensent qu'il faut respecter scrupuleusement les indications de décors donnés par les librettistes EN FONCTION des mises en scènes de leur époque (qui n'est pas souvent la notre, plus ouverte en ce domaine).

Si la MES ne suit plus du tout l'histoire, à quoi bon articuler des paroles en chantant (ça aussi c'est une contrainte!).

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Message par richie3774 » 03 nov. 2004, 20:03

Pour moi, la mise en scène doit respecter le livret, et tenter d'y coller au plus près. Je suis viscéralement opposé à toute transposition, car je me sens assez intelligent pour pouvoir trouver moi-même, dans les oeuvres du passé, des analogies avec le monde d'aujourd'hui, s'il y en a. Mais ce n'est pas ce qui m'intéresse le plus quand je vais à l'opéra, moi ce que j'aime, c'est la musique, pas la mise en scène, sinon, je pense que j'irais au théâtre, et pas à l'opéra.

Musicalement,

Richard

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Katia Kabanova; objections, cher maître

Message par faustin » 07 nov. 2004, 11:01

Je cite quelque extraits d?une interviou de Christoph Marthaler par Christian Merlin parue dans Le Figaro du 28 octobre 2004

Ch. Merlin : On vous a reproché d?avoir évacué la nature si présente chez Janacek
Ch. Marthaler : J?aime trop la nature pour ma mettre sur scène. Le Danube est si magnifiquement évoqué dans la musique de Janacek que ce n?est pas la peine d?en rajouter visuellement et de tomber dans l?illustratif.
La nature au théâtre ne peut être qu?un artifice. Et je n?aime pas les fleurs artificielles !

Ch. Merlin : Que répondez-vous à ceux qui vous accusent d?être infidèle aux ?uvres ?
Il s?agit d?un malentendu. Quand les gens parlent de fidélité à l??uvre, ils pensent en fait : fidélité aux habitudes. Ce qu?ils veulent, c?est voir le type de mise en scène auquel ils ont toujours été habitués et qui a pour eux valeur de vérité, alors que ce n?est le plus souvent que le reflet d?une époque donnée.

On a là toute la vulgate des metteurs en scène pour qui ce qui est écrit dans le livret est quantité négligeable.
Objections, cher maître.
Petit détail pour commencer : il ne s?agit pas du Danube mais de la Volga
Si la musique exprime tout si magnifiquement, pourquoi une mise en scène ? C?est tout le genre de l?opéra que vous mettez en cause par de tels propos. S?il en est ainsi, une version de concert fera bien l?affaire , et devant certaines mise en scène aberrantes, c?est souvent ce qu?on est amené à penser.
Les gens qui parlent de fidélité à l??uvre vous les traitez avec mépris comme s?ils avaient forcément tort, comme s?ils n?avaient rien compris et n?étaient capables de rien comprendre, engoncés dans leurs petites habitudes.
« la nature au théâtre ne peut-être qu?un artifice » dites vous . Mais cher maître au théâtre tout est artifice.
Que la représentation de la nature soit une difficulté, c?est certain, mais c?est votre métier de metteur en scène que de relever le défi. Ce que vous faites, c?est reculer devant la difficulté. En terme de sport, ça s?appelle déclarer forfait
Les éléments, la tempête sont présents dans l?opéra et ont été mis en scène et avec succès par certains de vos confrères, par exemple dans Peter Grimes, le Vaisseau Fantôme

Je crois avoir compris que le HLM URSS années soixante était un symbole de l?enfermement familial dans lequel se trouvent les protagonistes. La métaphore est séduisante, elle est même forte mais l?ennui, c?est que ça ne marche pas, ça ne marche pas du tout !
Ça ne marche à aucun niveau. On est dans le contre-sens et même dans le risible.
Ça ne marche pas parce qu?il est bien indiqué que les deux méchants de l?histoire, l?abominable Kabanicha et l?épouvantable Dikoy sont tous les deux fortunés et que c?est de l?argent qu?ils détiennent leur pouvoir, ce qui rend l?histoire compréhensible car vu que ce sont tous deux de parfaits imbéciles ils auraient bien du mal à imposer leur autorité s?ils ne détenaient pas les cordons de la bourse. Il y a bien une dimension lutte des classes dans cette ?uvre, doublée d?une lutte de générations. Si vous en faites tous des prolos, vous passez à côté de cette dimension essentielle. Il est bien précisé « salle de séjour confortable dans la maison des Kabanov ». Les placer dans un HLM minable aux peintures écaillées et où on ne voit même pas le jour ne fonctionne pas.

Quand Kudriach dit, au tout début de l??uvre dit :
«Merveille, c?est une merveille !
Cette vue est unique !
Glacha, vois-tu ma chère,
depuis vingt-cinq ans, j?admire la Volga tous les jours
sans me lasser de ce spectacle. »

et qu?il est dans cette cour, on pourrait croire que Kudriach est saisi par une hallucination , qu?il est fou.

Quand la porte du jardin se transforme en armoire placée dans le cour qui serait reliée au jardin par un hypothétique corridor ou souterrain, on est dans la plus totale extravagance. Quui peut y comprendre quelque chose s?il n?a pas jeté un coup d??il au programme ?

Évoquons le suicide de Katia :
« Katia : les oiseaux vont se poser sur la tombe?
ils auront des petits?
des fleurs, des fleurs rouges,
bleues, jaunes, fleuriront?
Quel silence ! Que c?est beau ! Il faut mourir
(entre parenthèse, littérairement, ce n?est pas terrible et même détestable. Voyez vous une jeune fille disant au moment de mourir les petits auront des petits oiseaux sur ma tombe ?)
Croisant les bras, elle se jette dans le fleuve

Kouliguine sur l?autre rive
Une femme s?est jetée à l?eau

Un passant sur l?autre rive :
Ohé, au secours, un bateau !

De différents côtés, les gens accourent avec des lanternes

Tichon : c?est sûrement elle, laissez moi voir !

Dikoy, portant une lanterne : elle est morte

Le suicide et les mouvements qu?il entraîne dans l?entourage sont bien décrits dans le livret mais si on fait abstraction du fleuve, c?est difficile à représenter. Dans la mise en scène présentée à Salzbourg et à l?opéra Garnier, Katia se couche sur cette curieuse fontaine située au milieu de la cour, où il n?y a même pas une goutte d?eau. Pas très sérieux, comme suicide. Il faudrait que quelqu?un, du fond de la salle ait le courage de crier : « allez, t?es pas morte, nous la fais pas, relève toi » .

Faustin

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Xavier
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Re: Katia Kabanova; objections, cher maître

Message par Xavier » 08 nov. 2004, 11:43

faustin a écrit :Le suicide et les mouvements qu?il entraîne dans l?entourage sont bien décrits dans le livret mais si on fait abstraction du fleuve, c?est difficile à représenter. Dans la mise en scène présentée à Salzbourg et à l?opéra Garnier, Katia se couche sur cette curieuse fontaine située au milieu de la cour, où il n?y a même pas une goutte d?eau. Pas très sérieux, comme suicide. Il faudrait que quelqu?un, du fond de la salle ait le courage de crier : « allez, t?es pas morte, nous la fais pas, relève toi » .

Faustin
Ca me rapelle la mise en scène de La dame de pique par Lev Dodin à Bastille il y a quelques années. J'avais assisté à une représentation de ce spectacle sans rien connaître le l'oeuvre ni même de l'histoire de Pouchkine ( :oops: ). A la sortie, un ami à moi me faisait la réflexion que le plus beau passage était le suicide de Lisa. "Ah bon !? Elle se suicide Lisa ??" "Oui, au moment où dans la mise en scène elle s'assoit sur le bord du lit et qu'elle ne bouge plus, en fait elle se suicide en se jetant d'un pont" ?!?!?!

Ce que vous décrivez de la mise en scène de Katia (dont j'ai vu quelques extraits à la télé) ou cette mise en scène de La dame de pique ont sans doute d'immenses qualités intellectuelles ("faire réflechir" !) ou artistiques, mais elle pêchent gravement par leur manque total de lisibilité.

C'est fait pour des gens qui connaissent déjà l'oeuvre, l'histoire et l'analyse qui peut en être faite. Les autres, circulez, y'a rien à comprendre ! Car c'est un exercice bien périlleux d'apréhender le sens caché d'une oeuvre dont ne connait même pas le sens premier 8O

Maintenant, des gens comme M. Marthaler ne s'adressent peut-être qu'à la partie du public qu'il estime intéressante, celle qui a déjà vu une mise en scène lisible et souhaite avoir un éclairage nouveau.

Et puisque Gégé-le-Belge a remplacé les petits feuillets avec les distributions par des affiches placardées dans le théâtre, il serait bien inspiré d'y préciser la mention :
"spectacle s'adressant uniquement aux spectateurs connaissant le livret"

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