Récital Stéphanie D'Oustrac/Pascal Jourdan - Sirènes - ONR - 19/10/2019

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Piero1809
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Récital Stéphanie D'Oustrac/Pascal Jourdan - Sirènes - ONR - 19/10/2019

Message par Piero1809 » 21 oct. 2019, 09:32

Récital
Stéphanie D'Oustrac, mezzo-soprano
Pascal Jourdan, piano

Sirènes

Pauline Viardot (1821-1910)
Hermione
Evocation

Hector Berlioz (1803-1869)
La Mort d'Ophélie

Franz Liszt (1811-1886)
Freudvoll und leidvoll 280-3
Es war ein König in Thule
Freudvoll und leidvoll 280-2
Im Rhein, im schönen Strome
Über allen Gipfeln ist Ruh
Die Loreley

Hector Berlioz
Les Nuits d'été
1. Villanelle
2. Le spectre de la rose
3. Sur les lagunes-Lamento
4. Absence
5. Au cimetière-Clair de lune
6. L'île inconnue

Samedi 19 octobre, Strasbourg-Opéra

J'avais entendu Stéphanie D'Oustrac fin septembre au festival d'Ambronay dans un programme baroque : Eclats de Folie. La voici, trois semaines après, dans Sirènes. Je suis toujours admiratif devant cette capacité qu'ont certains artistes de changer de répertoire tout en étant totalement performants. En dépit de leurs différences, les deux concerts avaient quand même un point commun, ils chantaient les passions d'héroïnes un peu folles. Après les baroques : Sémélé, Didon, Armide, Bess, c'est maintenant le tour des romantiques : Hermione, Ophélie, La Loreleï, La Belle des Nuits d'été...

La première partie comportait des mélodies qui m'étaient pour la plupart inconnues.

Pauline Viardot était la sœur de Marie Malibran, cantatrice mythique du début du 19ème siècle, morte à 28 ans. Elle était elle-même une cantatrice (mezzo-soprano) fort réputée, par contre ses talents de compositrice étaient bien moins connus. Ils me furent révélés ce soir par deux belles mélodies et notamment Hermione, scène dramatique, plutôt italianisante, tirée de l'Andromaque de Racine et qui se termine par une explosion de fureur et un spectaculaire suraigu.

Composée en 1842, la ballade, La Mort d'Ophélie témoigne de façon limpide du génie d'Hector Berlioz. C'est une barcarolle se déroulant pianissimo presque tout le temps. Les quatre strophes ont chacune un harmonisation différente. Elles se terminent par de gracieuses vocalises dans lesquelles Stéphanie D'Oustrac fait admirer sa voix pure et son légato très harmonieux. Les arpèges du piano d'une grande fluidité qui parcourent le morceau sous les doigts agiles de Pascal Jourdan évoquent évidemment l'eau vive de manière très romantique.

Franz Liszt n'est pas spécialement connu pour ses Lieder et pourtant on trouve dans la cinquantaine de Lieder allemands qu'il a composés de petits chefs-d'oeuvre en miniature. C'est le cas en particulier de La Loreley qui commence innocentemente, tout doux, puis atteint un climax de violence assez surprenant. Stéphanie D'Oustrac exploite ces contrastes et termine avec un suraigu pianissimo divin. Es war ein König in Thule est une ballade entièrement construite autour d'un motif pointé très court énoncé d'abord par le piano puis repris et développé par la voix. La partie de piano est très exigeante et Pascal Jourdan en fait une lecture très dynamique. Im Rhein, im schönen Strome sur un poème de Heinrich Heine déroule dans un murmure constant de superbes modulations romantiques et les deux artistes évoquent chacun à leur manière les eaux courantes du grand fleuve. Enfin Freudvoll und leidvoll S 280-2 évolue dans un climat recueilli presque religieux. La soprano par une habile gestion du souffle élève le chant dans les sphères les plus éthérées.

Mais toutes ces mélodies, si belles soient-elles n'étaient que le prélude au chef-d'oeuvre absolu que sont Les Nuits d'été de Berlioz (six morceaux de chant de divers caractères) sur des poèmes de Théophile Gauthier qui constitua le seconde partie du concert. Quand Berlioz compose ces Nuits d'été en 1841, il est maintenant un compositeur confirmé. L'auteur de la Symphonie Fantastique tenait ce cycle en haute estime et fut mortifié par l'oubli relatif dans lequel tombèrent ces mélodies très élaborées. Le cycle est encadré par deux chants joyeux (Villanelle et L'isle inconnue) mais son cœur consiste en quatre chants sublimes, Le spectre de la rose, Sur les lagunes-lamento, Absence-au cimetière, Clair de lune. Sur les lagunes était le sommet émotionnel incontestable du récital. Ah ! Sans amour s'en aller sur la mer ! Ce cri déchirant poussé par Stéphanie D'Oustrac avait ce samedi soir une résonance particulièrement intense, un surcroît de sincérité.

Stéphanie D'Oustrac a donné à son récital un caractère original car chaque mélodie était précédée d'une courte présentation à la fois didactique et humoristique. Les qualités vocales de la mezzo-soprano sont bien connues, l'intonation est impeccable, les graves somptueux, les aigus puissants. Au sommet de son art, elle possède la technique, le recul et la culture lui permettant d'exprimer avec chaleur et sensibilité tout ce qu'elle veut avec sa voix. Grâce à sa diction parfaite, elle rend hommage aux poètes de la plus belle manière. J'ai aussi remarqué qu'elle ne roule pas du tout la lettre R et qu'elle use du vibrato avec parcimonie deux qualités que, personnellement, j'apprécie beaucoup et qui m'ont paru convenir idéalement à la musique de Berlioz essentiellement classique à mon oreille, en opposition avec le grand opéra qui sévissait à l'époque.

Si dans Berlioz, le piano est relativement discret, par contre il prenait la part du lion dans les Lieder de Liszt, notamment dans Im Rhein, im schönen Strome et Er war ein König in Thule, ce qui permit à Pascal Jourdan de montrer son talent d'accompagnateur et toutes les facettes de son art.

Le public applaudit chaleureusement et bruyamment les artistes. Que jouer en bis après les Nuits d'été ? Avec A Chloris, on revenait aux héroïnes baroques tant ce joli chant de Reynaldo Hahn évoque Rameau. Puis Stéphanie D'Oustrac nous amusa avec une recette de cuisine mise en musique. Après cette gourmande détente, les artistes, portés par les ailes du chant, renouaient avec le sublime en interprétant Nana de Manuel de Falla.
Le silence total qui persista longtemps après la fin était éloquent.

Pierre Benveniste

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Re: Récital Stéphanie D'Oustrac/Pascal Jourdan - Sirènes - ONR - 19/10/2019

Message par jeantoulouse » 21 oct. 2019, 10:10

Même excellent programme que celui donné au Capitole en mars dernier et même magnifique concert si je me fie au compte rendu élogieux de Pierre.
Cette alliance que Stéphanie d'Oustrac réussit à merveille d'interprétation brillante et sensible et de commentaires pleins d'humour se révèle équilibrée, vivante, pédagogique sans excès, et comme l'ensemble de ses prestations scéniques , élégante.
Je précise que Pascal Jourdan, partenaire attitré de la cantatrice est professeur au Conservatoire National de région à Montpellier.

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Re: Récital Stéphanie D'Oustrac/Pascal Jourdan - Sirènes - ONR - 19/10/2019

Message par petitchoeur » 21 oct. 2019, 10:36

je pense que le premier bis devait être la recette du porc espagnol d'Ennemond Trillat, directeur du Conservatoire de Lyon de 1941 à 1963, spécialiste d'Alessandro Scarlatti et auteur d'un livre de recettes mis en musique avec beaucoup d'humour. Ce bis avait été donné lors d'un récital d'Oustrac/Jourdan à Brou dans le cadre du festival d'Ambronay 2013.

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Re: Récital Stéphanie D'Oustrac/Pascal Jourdan - Sirènes - ONR - 19/10/2019

Message par jeantoulouse » 21 oct. 2019, 10:59

Recette du Porc à l'espagnole très précisément et qui ici se cuisine au lait. Ennemond Trillat a aussi concocté des Beignets à la romaine et une Tartine anglaise !

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Piero1809
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Re: Récital Stéphanie D'Oustrac/Pascal Jourdan - Sirènes - ONR - 19/10/2019

Message par Piero1809 » 21 oct. 2019, 11:06

Merci jeantoulouse et petitchoeur pour cette précision concernant les bis.
Je récapitule donc:
1er bis A Chloris de Reynaldo Hahn
2ème bis, Le porc à l'espagnole d'Ennemond Trillat
3ème bis, Nana de Manuel de Falla

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Re: Récital Stéphanie D'Oustrac/Pascal Jourdan - Sirènes - ONR - 19/10/2019

Message par petitchoeur » 24 oct. 2019, 10:51

Stéphanie d'Oustrac a suivi une partie de sa formation au CNSMD de Lyon: c'est là qu'elle a dû connaître les partitions d'Ennemond Trillat

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