Maria Callas. Lettres & Mémoires. (T. Volf, 2019)
Maria Callas. Lettres & Mémoires. (T. Volf, 2019)
Maria Callas. Lettres & Mémoires. T'extes établis & traduits par Tom Volf, Paris, Albin Michel, 602 pages, 25 euros.
Les admirateurs de Callas témoignent parfois d’une telle érudition qu’on se demande quel nouvel ouvrage serait susceptible de leur apporter, aujourd’hui, de l’inédit voire même leur apprendre quelque chose tant le moindre détail semble avoir été creusé au maximum.
Cette très large compilation de 300 lettres et des quelques fragments de Mémoires qui nous restent ne recèle aucune révélation mais possède l’immense mérite de nous faire entendre Maria Callas avec ses propres mots, dans sa bouleversante humanité.
On y lit l’histoire privée et publique, aussi tragique que glorieuse, d’une femme qui adore la précision (celle de la chronologie, celle des prix des chambres d’hôtel et celle de ses repas, de ses variations de poids après sa perte de 30 kilos, etc) et qui nous livre d’intenses plaidoyers pro-domo sur au moins trois sujets qui lui tiennent à cœur : ses relation houleuses avec ses proches (la famille et les deux hommes de sa vie), ses rapports avec Renata Tebaldi et le « scandale de Rome ».
Elle se livre aussi, comme c’est courant dans son milieu, à un jeu de massacre qui n’épargne qu’une demi-douzaine de personnes : Elvira de Hidalgo, Serafin qu’elle vénère comme artiste et comme « une sainte âme » (p. 140), Pertile, Toscanini (qui avait pour projet, peu avant sa mort, de la diriger en Lady Macbeth), Bernstein, Visconti, Pasolini et Simionato.
Nous qui connaissons l’issu désastreuse de son mariage sommes émus de lire à quel point elle idéalisait Meneghini au début de leur union. Dans une lettre du 12 juin 1949, elle va jusqu’à écrire : « je suis si fière, et heureuse de posséder un homme aussi parfait » tandis qu’après leur rupture, elle lâche ce terrible jugement : « « Battista ne s’intéressait qu’à l’argent et au statut (…) ma célébrité lui est montée à la tête » (p. 563) et l'accuse de l'avoir dépouillée de tous ses gains.
Parmi tant de détails éclairants, elle précise qu’elle éprouve une « une forte dévotion à l’église orthodoxe (17 juin 1949, p. 143) qu’elle perçoit comme plus « chaleureuse et festive » que la catholique et une aversion pour le répertoire contemporain. Elle écrit ainsi qu’ « une grande partie de la musique des opéras modernes dérange plutôt qu’elle ne calme le système nerveux, ce qui m’empêche de chanter ses opéras. « (page 555).
Plus inattendu apparaît ce jugement sévère sur un de ses chevaux de bataille lorsqu’elle juge que « Tosca est trop réaliste. Le deuxième acte est ce que j’appelle « grand-guignol ». (p.559)
Parmi les projets avortés, on note, outre le Macbeth avec Toscanini, l’enregistrement de la partie de mezzo du Requiem sous la direction de De Sabata ( évoqué le 7 juin 1954 par un télégramme de Walter Legge), que Bing lui a proposé de chanté la flûte enchantée (p. 200) et que le Poliuto devait être mis en scène par Visconti.
Avec beaucoup de lucidité, elle affirme qu’elle « a toujours été une vieux-jeu romantique » --(p. 564)
Tom Volf évoque à la fin de son indispensable ouvrage l’ouverture prochaine d’un musée Callas à Paris, vieux serpent de mer, …mais il faut y croire, encore et encore…
Jérôme Pesqué
Les admirateurs de Callas témoignent parfois d’une telle érudition qu’on se demande quel nouvel ouvrage serait susceptible de leur apporter, aujourd’hui, de l’inédit voire même leur apprendre quelque chose tant le moindre détail semble avoir été creusé au maximum.
Cette très large compilation de 300 lettres et des quelques fragments de Mémoires qui nous restent ne recèle aucune révélation mais possède l’immense mérite de nous faire entendre Maria Callas avec ses propres mots, dans sa bouleversante humanité.
On y lit l’histoire privée et publique, aussi tragique que glorieuse, d’une femme qui adore la précision (celle de la chronologie, celle des prix des chambres d’hôtel et celle de ses repas, de ses variations de poids après sa perte de 30 kilos, etc) et qui nous livre d’intenses plaidoyers pro-domo sur au moins trois sujets qui lui tiennent à cœur : ses relation houleuses avec ses proches (la famille et les deux hommes de sa vie), ses rapports avec Renata Tebaldi et le « scandale de Rome ».
Elle se livre aussi, comme c’est courant dans son milieu, à un jeu de massacre qui n’épargne qu’une demi-douzaine de personnes : Elvira de Hidalgo, Serafin qu’elle vénère comme artiste et comme « une sainte âme » (p. 140), Pertile, Toscanini (qui avait pour projet, peu avant sa mort, de la diriger en Lady Macbeth), Bernstein, Visconti, Pasolini et Simionato.
Nous qui connaissons l’issu désastreuse de son mariage sommes émus de lire à quel point elle idéalisait Meneghini au début de leur union. Dans une lettre du 12 juin 1949, elle va jusqu’à écrire : « je suis si fière, et heureuse de posséder un homme aussi parfait » tandis qu’après leur rupture, elle lâche ce terrible jugement : « « Battista ne s’intéressait qu’à l’argent et au statut (…) ma célébrité lui est montée à la tête » (p. 563) et l'accuse de l'avoir dépouillée de tous ses gains.
Parmi tant de détails éclairants, elle précise qu’elle éprouve une « une forte dévotion à l’église orthodoxe (17 juin 1949, p. 143) qu’elle perçoit comme plus « chaleureuse et festive » que la catholique et une aversion pour le répertoire contemporain. Elle écrit ainsi qu’ « une grande partie de la musique des opéras modernes dérange plutôt qu’elle ne calme le système nerveux, ce qui m’empêche de chanter ses opéras. « (page 555).
Plus inattendu apparaît ce jugement sévère sur un de ses chevaux de bataille lorsqu’elle juge que « Tosca est trop réaliste. Le deuxième acte est ce que j’appelle « grand-guignol ». (p.559)
Parmi les projets avortés, on note, outre le Macbeth avec Toscanini, l’enregistrement de la partie de mezzo du Requiem sous la direction de De Sabata ( évoqué le 7 juin 1954 par un télégramme de Walter Legge), que Bing lui a proposé de chanté la flûte enchantée (p. 200) et que le Poliuto devait être mis en scène par Visconti.
Avec beaucoup de lucidité, elle affirme qu’elle « a toujours été une vieux-jeu romantique » --(p. 564)
Tom Volf évoque à la fin de son indispensable ouvrage l’ouverture prochaine d’un musée Callas à Paris, vieux serpent de mer, …mais il faut y croire, encore et encore…
Jérôme Pesqué
Parution de ma biographie "Régine Crespin, La vie et le chant d'une femme" ! Extraits sur https://reginecrespinbiographie.blogspot.com/
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Re: Maria Callas. Lettres & Mémoires. (T. Volf, 2019)
Depuis lundi que j'ai trouvé ce livre , je m'y suis jeté dessus...C'est pas piqué des hannetons, car , comme toujours , Callas y écrit tout ce qu'elle pense ( les avis sur , entre autre , Rossi Lemeni , Mac Cracken, Milnes, et autres ...).Pour certaines lettres ( sa demande à Max Lorenz pour savoir s'il a l'enregistrement de leurs Tristan ) on regrette qu'il n'y ait pas la réponse...
Re: Maria Callas. Lettres & Mémoires. (T. Volf, 2019)
oui, en fin Callas a certes la dent dure pour beaucoup de ses collègues mais témoigne aussi de son total respect et parfois de l'admiration pour Elvira de Hidalgo, Serafin, Bernstein, Karajan, Visconti, Pasolini, même si cela reste très allusif dans sa correspondance...
Parution de ma biographie "Régine Crespin, La vie et le chant d'une femme" ! Extraits sur https://reginecrespinbiographie.blogspot.com/
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Re: Maria Callas. Lettres & Mémoires. (T. Volf, 2019)
je viens de publier ma critique en tête de ce fil.
Monica Bellucci m'a bouleversé en Callas au Studio Marigny
Monica Bellucci m'a bouleversé en Callas au Studio Marigny
Parution de ma biographie "Régine Crespin, La vie et le chant d'une femme" ! Extraits sur https://reginecrespinbiographie.blogspot.com/
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Re: Maria Callas. Lettres & Mémoires. (T. Volf, 2019)
Je le savais bien! (cf échanges sur fil Tosca milanaise) et elle se lamentait de le chanter aussi régulièrement alors que les projets pour d'autres rôles qui l'intéressaient (Elizabeth de Valois, Charlotte) n'aboutirent pas
Re: Maria Callas. Lettres & Mémoires. (T. Volf, 2019)
Non
Suite à la censure en Italie de son dernier film, Rocco et ses frères, Visconti a refusé de mettre en scène ce spectacle. Il a été remplacé par Herbert Graf.
Mais les décors étaient de Nicolai Benois, qui avait travaillé avec Visconti sur Iphigenie en Tauride notamment.
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Re: Maria Callas. Lettres & Mémoires. (T. Volf, 2019)
Pour ma part je déconseille ce spectacle . Monica Bellucci lit (mal) un prompteur pendant plus d'une heure en tournicotant autour d'un canapé avec un faux air de Kim Kardashian ...pauvre Callas !
"Gérard Mortier a raison d'offrir Elektra sans entracte"
( Eric Dahan Libération 25/06/2005)
( Eric Dahan Libération 25/06/2005)