La désaffection des salles d'opéras

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Efemere
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Re: La désaffection des salles d'opéras

Message par Efemere » 09 nov. 2014, 02:31

Bruno92 a écrit :
Schwannhilde a écrit :A l'ONP, est-ce que cette curieuse nouvelle politique des prix (moins cher le lundi, etc...) a un impact négatif/positif ?
Sur mon porte monnaie, oui ça a eu un impact quand j'ai pris mes abonnements :wink: .

Plus sérieusement, sur les 3 lundi que j'ai fait à l'ONP (Traviata, Enlèvement au sérail, Barbier de Seville), ça semblait plein.
Mais bon, ce sont quand même des opéras qui remplissent en dehors du lundi donc ce n'est peut être pas significatif
Pour moi qui ne travaille pas le lundi, et qui étais jusqu'à présent satisfaite de ce jour (moins de spectateurs, davantage de choix dans les places de la catégorie que je prends, etc.), cette nouvelle politique ne m'arrange pas, même si cela me revient globalement moins cher (non seulement parce que c'est moins cher certains lundis, mais aussi et surtout parce que j'ai dû faire une croix sur certains opéras que je ne peux voir que le lundi et pour lesquels je n'ai pu réserver les sièges que je voulais). Je suppose que désormais, ça « marche » mieux le lundi, peut-être au détriment d'autres jours. Cela m'étonnerait que cette nouvelle politique tarifaire ait servi à attirer plus de monde.

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Re: La désaffection des salles d'opéras

Message par KITTY » 09 nov. 2014, 06:24

Le terme de "desaffection" pourrait bien se transformer en "desaffectation" !!!

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Re: La désaffection des salles d'opéras

Message par faustin » 09 nov. 2014, 06:55

PlacidoCarrerotti a écrit :
@Faustin

Pour penser ce que tu dis, encore faut il avoir acheté un billet !

Or nous parlons des gens qui ne viennent pad
Les gens qui ne viennent pas ne viennent pas parce que ceux qui y sont allés leur ont dit que ce n'était pas la peine d'y aller. Un mauvais bouche à bouche rien de tel pour démolir un spectacle (et l'inverse également). Mais je ne sais pas si j'ai bien répondu à ta question.

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Re: La désaffection des salles d'opéras

Message par faustin » 09 nov. 2014, 07:53

quetzal a écrit :
On nous a recommandé de nous précipiter en Bavière pour éduquer notre intelligence aux oeuvres des metteurs en scène de l'époque .
Y'a t-il du caca dans cette Tosca ou quelque fellation ou sommes nous transportés dans un asile de fous ou un Ehpad pour Alzheimer ?

Non ?

Alors Faustin , considère cette Tosca et son bougre de Bouguereau comme une production conventionnelle.

Bernard
Qui est ce <<on>>? Ce <<on>> n'a jamais eu prise sur moi. Non, il n'y a ni caca ni fellation ni viol (seulement une tentative) et nous ne sommes pas transportés dans un asile de fous ou un Ehpad pour Alzheimer. ça, c'était du temps où Warlikowski s'était attaqué, au sens propre à Iphigénie en Tauride de Gluck. Il n'y a même pas de plug anal. Trêve de plaisanterie, il y a bien une escalade dans l'aberration. Quand on n'est pas au sommet de l'aberration, on est réputé être dans la norme. Soit-disant. C'est terrible, ça! Mais je ne marche pas. Il y a des mises en scène qui sont des attentats à la fois contre une certaine décence et une certaine conception de la raison, du bon sens, je voudrais dire de la non-absurdité, pour autant que le livret s'y prête, ce qui n'est pas toujours le cas. Sous réserve d'inventaire, on peut les condamner. Il y a des mises en scène qui ne sont pas des attentats contre la décence mais qui sont des attentats contre le bon sens, qui sont totalement absurdes, par exemple cette Tosca de Pierre Audi qui prête à Cavaradossi un pouvoir de prophétie picturale. Il faut également les condamner. Il y a aussi des écarts par rapport aux didascalies qui ne sont ni illogiques ni contraires à la décence mais qui représentent une déperdition dramatique de sens. Il n'y a rien de fondamentalement illogique à placer le troisième acte de Tosca dans un camp militaire et non à la terrasse du Château Saint-Ange, mais l'ennui, c'est qu'on perd presque tout. On perd surtout ce moment fabuleux, d'une immense poésie, d'une beauté inégalée qu'est les cloches de Rome. E lucevan le stelle perd aussi beaucoup de sa signification. On voit mieux les étoiles de la terrasse du Château Saint-Ange que d'un camp militaire. Et quand on n'est pas sur la terrasse du Château Saint-Ange, on ne sait pas comment faire mourir Tosca, on se rabat sur une mort de mystique qui n'est pas en accord avec ce que dit l'opéra.

Il faut toujours en revenir à la question du sens. Les bons opéras ont toujours du sens. Ne pas respecter les didascalies si le sens n'est pas touché, d'accord. Si cela aboutit à des contre-sens ou à des non-sens, pas d'accord. C'est un point de vue que j'ai exprimé sur ce forum quantité de fois.

J'ai écouté le casque et l'enclume, émission de critique de France Musique, ils pensent et disent que les mises en scène conventionnelles sont ennuyeuses, mais pas du tout, bien au contraire, c'est quand une oeuvre est présentée dans sa plénitude qu'elle est vraiment intéressante. Les grands chefs d'oeuvre ne sont pas ennuyeux. Et s'ils les ont trop vus, c'est bien simple, ils n'ont qu'à aller voir des oeuvres qu'ils n'ont jamais vues ou qu'ils ont vues depuis longtemps.

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Re: La désaffection des salles d'opéras

Message par jerome » 09 nov. 2014, 13:15

faustin a écrit :J'ai écouté le casque et l'enclume, émission de critique de France Musique, ils pensent et disent que les mises en scène conventionnelles sont ennuyeuses, mais pas du tout, bien au contraire, c'est quand une oeuvre est présentée dans sa plénitude qu'elle est vraiment intéressante. Les grands chefs d'oeuvre ne sont pas ennuyeux. Et s'ils les ont trop vus, c'est bien simple, ils n'ont qu'à aller voir des oeuvres qu'ils n'ont jamais vues ou qu'ils ont vues depuis longtemps.
Richard Martet ne pensait et ne disait pas comme les autres! Lui, il défend ces mises en scène qui sont indispensables quand elles sont amenées à être maintenues au répertoire pendant des années!
Je suis bien évidemment d'accord avec toi sur le fond! :clapping:

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Re: La désaffection des salles d'opéras

Message par PlacidoCarrerotti » 09 nov. 2014, 14:32

jerome a écrit :
faustin a écrit :J'ai écouté le casque et l'enclume, émission de critique de France Musique, ils pensent et disent que les mises en scène conventionnelles sont ennuyeuses, mais pas du tout, bien au contraire, c'est quand une oeuvre est présentée dans sa plénitude qu'elle est vraiment intéressante. Les grands chefs d'oeuvre ne sont pas ennuyeux. Et s'ils les ont trop vus, c'est bien simple, ils n'ont qu'à aller voir des oeuvres qu'ils n'ont jamais vues ou qu'ils ont vues depuis longtemps.
Richard Martet ne pensait et ne disait pas comme les autres! Lui, il défend ces mises en scène qui sont indispensables quand elles sont amenées à être maintenues au répertoire pendant des années!
Je suis bien évidemment d'accord avec toi sur le fond! :clapping:

Je plussoies sur cette pathologie. Effectivement, si, lors d'une représentation de l'Elixir d'amour, on n'a pas l'oreille pour distinguer entre Pavarotti, Kraus ou... Paul Groves, c'est la mise en scène qui fait la différence alors que l'opéra est (aussi / surtout : rayer une des DEUX mentions inutiles) un art d'interprétation...
"Venez armé, l'endroit est désert" (GB Shaw envoyant une invitation pour l'une de ses pièces).

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Re: La désaffection des salles d'opéras

Message par paco » 09 nov. 2014, 18:12

PlacidoCarrerotti a écrit :
jerome a écrit :
faustin a écrit :J'ai écouté le casque et l'enclume, émission de critique de France Musique, ils pensent et disent que les mises en scène conventionnelles sont ennuyeuses, mais pas du tout, bien au contraire, c'est quand une oeuvre est présentée dans sa plénitude qu'elle est vraiment intéressante. Les grands chefs d'oeuvre ne sont pas ennuyeux. Et s'ils les ont trop vus, c'est bien simple, ils n'ont qu'à aller voir des oeuvres qu'ils n'ont jamais vues ou qu'ils ont vues depuis longtemps.
Richard Martet ne pensait et ne disait pas comme les autres! Lui, il défend ces mises en scène qui sont indispensables quand elles sont amenées à être maintenues au répertoire pendant des années!
Je suis bien évidemment d'accord avec toi sur le fond! :clapping:

Je plussoies sur cette pathologie. Effectivement, si, lors d'une représentation de l'Elixir d'amour, on n'a pas l'oreille pour distinguer entre Pavarotti, Kraus ou... Paul Groves, c'est la mise en scène qui fait la différence alors que l'opéra est (aussi / surtout : rayer une des DEUX mentions inutiles) un art d'interprétation...
Ce sujet des mises en scène est, j'en suis convaincu, un des facteurs qui éloigne en ce moment un certain public des salles, sans qu'un nouveau public l'ait remplacé pour autant. J'ai d'ailleurs un doute sur le fait que la presse, et aussi la blogosphère, soient vraiment représentatifs de ce qu'attend le public sur ce sujet.
Si je prends presse et blogosphère UK, à les lire ces dernières années tout le Royaume-Uni attendait avec impatience l'arrivée des Eurotrash sur la scène du ROH. Certains blogs finissaient par réellement bouder / boycotter (= absence totale de compte-rendus) des spectacles jugés trop traditionnels. Dont acte. Puis arrive un nouveau Directeur au ROH, qui essaye une programmation plus équilibrée entre audace (pas toujours réussie hélas) et classique ; simultanément le ROH ouvre son propre forum en ligne, ouvert à tous et sans aucune censure. Eh bien sur ce forum je me suis aperçu que l'opinion très largement majoritaire n'avait absolument rien à voir avec ce que véhiculaient blogs et presse depuis plusieurs années. Bien au contraire, ça hurle de tous côtés contre l'abus de trash, ça menace à tout va de ne plus payer sa place, ça prétend avoir déjà renoncé à venir voir certains spectacles, ça réclame la démission du Directeur, ça crie que désormais on restera à la maison à visionner un vieux DVD etc. Il y a aussi des avis contraires, mais ils ont bien du mal à se faire entendre tant ils sont minoritaires.
Dans ce contexte, en juin dernier, quasiment toute la blogosphère UK se réjouissait de l'arrivée de Kusej pour Idomeneo de novembre. Mais sur le forum du ROH, plusieurs internautes avertissaient les allergiques aux "relectures" que ce serait décapant. Lien de cause à effet ou simple coïncidence ? => Toujours est-il que cette nouvelle production d'Idomeneo est un flop au box office, alors que l'ensemble de l'année 2014 a été un record d'affluence au ROH avec des taux dépassant les 96% (du jamais vu depuis dix ans).

Tout ça pour dire que ce sujet de "désaffection du public" est complexe et que l'évolution des mises en scène est probablement un facteur à prendre en considération parmi d'autres. Il n'est qu'un facteur, et probablement pas le plus important, mais l'occulter serait faire preuve d'aveuglement.

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Re: La désaffection des salles d'opéras

Message par jerome » 09 nov. 2014, 19:35

Ce que tu nous racontes là, Paco, est tout de même assez criant et fait écho à tout ce que j'entends très souvent autour de moi.
Je pense que c'est vraiment la 1ère raison de cette désaffection croissante, la 2nde étant l'aspect financier (lequel est d'ailleurs souvent lié à la 1ère raison! On ne va pas payer pour quelque chose qu'en plus on ne va pas aimer!) et puis 3ème raison, plus larvée et plus douloureuse aussi, c'est ce sentiment que quelque part l'opéra en tant qu'opéra vit ses derniers instants puisqu'on n'a plus de mises en scène qui le glorifient comme c'était le cas il y a encore une trentaine d'années et surtout puisque les chanteurs actuels sont pour une grande majorité d'entre eux considérés comme très inférieurs à leurs prédécesseurs.
Beaucoup de théâtres misent à présent sur les projets pédagogiques scolaires sauf que, comme on le fait et vu la nature des spectacles, c'est un trompe l'oeil car peu, très très peu de ces jeunes retourneront à l'opéra et alors va se poser un problème criant: le renouvellement des générations qui poseront leurs fesses dans une salle ...

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Re: La désaffection des salles d'opéras

Message par JdeB » 09 nov. 2014, 19:55

Je constate qu'en ce début de saison :
A Paris et à Liège, les récitals de super-stars (DiDonato, Bartoli, Florez) affichent complets malgré des prix fort élevés surtout pour CB.
Un concert d'oeuvres extra rares dirigé par C. Rousset avec D. Gallou au tarif unique de 25 euros à Montpellier n'était plein qu'au 2/3 tiers.
Castor & Pollux à Dijon a fait un flop de billeterie en pleine année Rameau, dans sa ville natale.
Enorme succès par contre pour le Vaisseau fantôme à Lyon, 8 soirs sold out !
L'Amico Fritz à Strasbourg, un livret situé en Alsace, était assez plein mais pas bondé.

A Paris, Barbier et Tosca se sont mal vendus en première caté malgré de nombreuses soldes.
Garnier reste Garnier et Traviata reste Traviata
Parution de ma biographie "Régine Crespin, La vie et le chant d'une femme" ! Extraits sur https://reginecrespinbiographie.blogspot.com/
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Re: La désaffection des salles d'opéras

Message par faustin » 10 nov. 2014, 08:56

jerome a écrit :
Richard Martet ne pensait et ne disait pas comme les autres! Lui, il défend ces mises en scène qui sont indispensables quand elles sont amenées à être maintenues au répertoire pendant des années!
Je suis bien évidemment d'accord avec toi sur le fond!
Il faudrait réécouter l'émission, si ma mémoire ne me trahit pas, Richard Martet avait une discussion avec Christian Merlin, qui lui est un farouche partisan des mises en scène qui prennent toutes les libertés par rapport aux livrets. Ce qui est un peu curieux, c'est que les deux rangent la Tosca de Pierre Audi parmi les mises en scène <<non dérangeantes>> (peut-être parce qu'il n'y a pas de plug anal). Mais ils ont l'air de ne pas avoir vu la peinture profane de Cavaradossi, les rapports plus qu'étonnants avec Bouguereau, sous les auspices de qui, Dieu sait pourquoi, l'opéra est placé, ils n'ont pas l'air d'avoir vu que la transposition du troisième acte dans un camp militaire mettait par terre les cloches de Rome et même e lucevan le stelle, qui ne prend toute sa force que sous une voûte étoilée, que cette mort mystique de Tosca était en contradiction avec le caractère anti-religieux de l'opéra, ils n'ont pas critiqué cette croix, la lourdeur du symbole, c'est comme s'ils n'avaient rien vu. Richard Martet et Christian Merlin sont d'accord pour donner la préférence à des mises en scène <<dérangeantes>> et c'est Richard Martet (si je ne me trompe pas) qui, dans une incise a admis que les mises en scènes traditionnelles étaient <<emmerdantes>>. Richard Martet, citant une discussion entre Hugues Gall et Stéphane Lissner, alors directeur du Châtelet, a effectivement mis en avant la nécessité de faire des mises en scène acceptables pour une grand partie du public, mais seulement au nom du réalisme, ce à quoi Christian Merlin a répondu: << il se peut, mais ne me demandez pas d'aimer ça>>. Je me souviens que ce Christian Merlin, critique au Figaro, était allé jusqu'à défendre l'innommable mise en scène de la Médée de Marc-Antoine Charpentier de Pierre Audi (encore lui!) avec un scénographie effroyable du plasticien berlinois Jonathan Meese, qui avait réussi à vider la salle, et à affecter durablement la réputation du Théâtre des Champs Elysées.

Faustin

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