Boito- Mefistofele - Rustioni / Ollé - Lyon - 10/2018

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JdeB
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Boito- Mefistofele - Rustioni / Ollé - Lyon - 10/2018

Message par JdeB » 09 oct. 2018, 06:54

Chef d'orchestre Daniele Rustioni
Metteur en scène Alex Ollé
Décors Alfons Flores
Costumes Lluc Castells
Lumières Urs Schönebaum
~
Mefistofele John Relyea
Faust Paul Groves
Wagner/ Nereo Peter Kirk
Margherita/ Elena Evgenia Muraveva
Marta/ Pantalis Agata Schmidt

Nouvelle coproduction avec Staatstheater Stuttgart; Opera di Roma

Lyon, le 17 octobre 2018

De Joseph Strauss vers 1814 à nos jours, le Faust de Goethe (1808 pour la première partie, 1832 pour la seconde) a connu une fortune musicale considérable même si, de nos jours, les compositeurs qui travaillent sur le mythe de Faust tendent à puiser à d’autres sources (Christopher Marlowe pour Pascal Dusapin en 2004, Nikolaus Lenau pour Fénelon en 2007). Bien sûr de nombreux avatars ont sombré dans l’oubli (qui connaît les Faust de Béancourt, Bertin, Lutz ou Souchay ?) tandis que l’opéra de Gounod, longtemps l’une des œuvres lyriques les plus jouées au monde, et l’oratorio de Berlioz se sont imposés partout dans le monde en éclipsant tous les autres.
Le Mefistofele de Boïto (1868) demeure l’une des très rares tentatives d’adaptation des deux Faust dont la version primitive pour la Scala durait près de 5 heures ! Face à l’échec de cette version princeps, Boito révisa drastiquement sa copie et en donna une nouvelle version à Bologne en octobre 1875. La durée de l’ouvrage est réduite de moitié ou presque, la partie de Faust écrite pour baryton est transposée pour ténor, tous les éléments politiques et philosophiques sont gommés le plus possible, le passage où Méphisto devient un ministre des finances roublard et cynique est supprimé tandis que le choeur "la luna immobile" se transforme en un duo pour Elena et Pantalis.

Mefistofele occupe depuis un statut intermédiaire puisque l’œuvre, cheval de bataille des grandes basses (de Chaliapine à Pape), revient de temps en temps à l’affiche mais demeure cependant une rareté. Les dernières représentations scéniques à l’Opéra de Paris remontent à …1912 mais on note une version de concert en 1989. Il n’avait jamais été donné à Lyon !
Pour compléter la chronologie de l’Avant-scène Opéra numéro 238, signalons quelques faits peu connus. L'un des premiers à avoir évoqué cet opéra de Boito en France fut Paul Bourget, écrivain alors très influent, dans un livre sur ses voyages en Italie : Croquis italiens (1889). Pour lui « l’Allemand écoute de la musique afin de rêver, et, pour lui, rêver, c’est réfléchir. L’Italien semble l’écouter pour en jouir, comme de la glace qu’il prend à la terrasse d’un café, le soir (…). Que celui-là est un artiste heureux et rare qui peut, comme l’auteur de Mefistofele, plaire aux premiers et ravir les autres ! » écrit-il pour conclure son chapitre VIII alors même que l’ouvrage n’avait jamais été joué dans l’hexagone. Mais Paul Dukas se montra beaucoup sévère en le qualifiant, en 1901, de « travestissement assez saugrenu » du chef d’œuvre goethéen.
L'Avant-Scène ne mentionne pas les représentations à Tours en mars 1969 (avec Pali Marinov) , ni celles de Limoges (en février 1974) avec le regretté Bonaldo Giaiotti qui a également incarné le rôle à Nice en 1977 et 1982. Avec Vichy qui défendit beaucoup l'ouvrage dans les années 30, c'est d’ailleurs Nice qui l'a le plus souvent affiché. Outre les deux séries déjà mentionnées, notons les versions de concert de décembre 1994 avec Franck Ferrari.
Ces derniers temps Mefistofele a connu un regain d’intérêt à la scène, depuis la fameuse mise en scène de Robert Carsen où s’est illustré magnifiquement Samuel Ramey, bien heureusement disponible en vidéo. La production de Jean-Louis Grinda, crée à Liège en 2007 avec Paata Burchuladze a été reprise d’abord à Montpellier en 2010, puis à Monte-Carlo en 2013 et l’été dernier à Orange, Erwin Schrott assurant le rôle-titre à la fois sur le Rocher et devant le Grand Mur.

Pour cette bien tardive création locale, l’Opéra de Lyon a fait appel à l’un de ses deux metteurs en scène fétiches Alex Ollé qui signe sa sixième production et se rapproche du record de Laurent Pelly. Ollé, dans le cadre du collectif La Fura del Baus, a beaucoup travaillé sur le mythe de Faust depuis 21 ans, avec une adaptation de la pièce fleuve du grand dramaturge allemand, la Damnation de Faust à Salzbourg, un film en 2001 et le Faust de Gounod à Amsterdam.
Sa mise en scène nous plonge dans « le rêve du diable » en faisant de Mefistofele un « psychopathe qui exhibe, avec ses visions délirantes, l’infinie cruauté de son imagination destructrice ». Elle veut explorer « l’atroce férocité du mal ».
Ollé réussit son pari avec brio et signe ici la mise en scène la plus violente et la plus gore vue en France depuis le Faust de Gounod selon René Koering (Montpellier, 2009), avec arrachage de cœur et égorgements de chérubins, dans une scénographie glaciale qui conjugue un peu l’univers de 2001 Odyssée de l’espace et de Dune avec la vision carcérale que Peter Sellars avait proposée d’un autre avatar diabolique The Rake’s Propress (Châtelet, 1996)

John Relyea, stature imposante, voix énorme et qui « tâche », non comme du gros rouge mais comme du sang noir sur les blousons des laborantins de cette usine, émission engorgée et gutturale privée de toute italianita, correspond parfaitement à la vision d’Ollé. Son regard halluciné dans la scène finale est digne d'un Chaliapine !
De même que le Faust de Paul Groves, qui s’est fait le visage de Burt Reynolds, gris de timbre et de présence au possible, dans un déclin vocal des plus inquiétants…
Evgenia Muraveva, dans le double rôle de Margherita et d’Elena, monopolise donc l’attention des amateurs de belles voix et charme par un timbre opulent, une technique fort assurée et un vrai charisme.

Nos bonheurs vocaux viennent aussi des chœurs, moins fournis qu’à Orange en juillet dernier où on avait réuni plusieurs phalanges, mais très en forme et poétiques dans les passages célestes.

Daniele Rustioni, qui a déjà son fan club d’adolescentes déchainées, dirige ce chef d’œuvre inégal avec rigueur et enthousiasme, un sens acéré de l’épique et des grands chatoiements de couleurs. Il tresse comme une camisole de flammes autour de si graves et multiples malheurs.

Jérôme Pesqué
Parution de ma biographie "Régine Crespin, La vie et le chant d'une femme" ! Extraits sur https://reginecrespinbiographie.blogspot.com/
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Re: Boito- Mefistofele - Rustioni / Ollé - Lyon - 10/2018

Message par muriel » 12 oct. 2018, 12:17

Pour mon premier Mefisto, ce fut grandiose.
on en prend pleins les yeux et plein les oreilles.

Gros succès dû aux qualités immenses de l'orchestre et du choeur qui se donnent à fond.

Dispositif scénique impressionnant .
Mise en scène très agitée, très colorée, mais glauque et violente (que de sang...) donnant la belle part au chœur.

John Relyea campe un Mefisto inquiétant et tourmenté, aux graves caverneux, aux aigus pas toujours éclatants, meilleurs en 2è partie.
Il m'a fait penser à Quasimodo à l'acte 3 face à la jolie Esméralda dans sa robe rouge.
Du coup, j'aurais aimé voir la prestation d'Erwin Schrott.

Très bonne Marguerite Elena , voix superbe, elle éclate dans les actes 3 et 4. Encore une superbe jeune russe fort prometteuse.

Paul Groves... grand acteur, émouvant , investi mais plus aucun aigu ne passe, dommage.

Quelques places vides au parterre. Public très jeune. Beau succès, s'adressant particulièrement au chef chouchou.

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Re: Boito- Mefistofele - Rustioni / Ollé - Lyon - 10/2018

Message par muriel » 12 oct. 2018, 14:27

PROMO :
-50% sur les séries A et B, valable pour les représentations des 15, 17, 19 et 23 octobre à 20h. Soit 49€ en série A (au lieu de 98€) et 39€ en série B (au lieu de 78€).

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Re: Boito- Mefistofele - Rustioni / Ollé - Lyon - 10/2018

Message par dge » 12 oct. 2018, 17:53

muriel a écrit :
12 oct. 2018, 14:27
PROMO :
-50% sur les séries A et B, valable pour les représentations des 15, 17, 19 et 23 octobre à 20h. Soit 49€ en série A (au lieu de 98€) et 39€ en série B (au lieu de 78€).
Elle ne figure pas sur le site. Comment en as-tu été informée ?

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Re: Boito- Mefistofele - Rustioni / Ollé - Lyon - 10/2018

Message par srourours » 12 oct. 2018, 18:12

muriel a écrit :
12 oct. 2018, 12:17


John Relyea campe un Mefisto inquiétant et tourmenté, aux graves caverneux, aux aigus pas toujours éclatants, meilleurs en 2è partie.
Il m'a fait penser à Casimodo à l'acte 3 face à la jolie Esméralda dans sa robe rouge.
Du coup, j'aurais aimé voir la prestation d'Erwin Schrott.
Schrott sonne moins "basse" que Relyea, la voix a beaucoup plus de brillant. C'est une question de gout, et de vision du personnage!

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Re: Boito- Mefistofele - Rustioni / Ollé - Lyon - 10/2018

Message par muriel » 13 oct. 2018, 09:23

dge a écrit :
12 oct. 2018, 17:53
muriel a écrit :
12 oct. 2018, 14:27
PROMO :
-50% sur les séries A et B, valable pour les représentations des 15, 17, 19 et 23 octobre à 20h. Soit 49€ en série A (au lieu de 98€) et 39€ en série B (au lieu de 78€).
Elle ne figure pas sur le site. Comment en as-tu été informée ?
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Re: Boito- Mefistofele - Rustioni / Ollé - Lyon - 10/2018

Message par dge » 16 oct. 2018, 11:35

Représentation du 15 octobre.

C'est l'aspect musical que je retiendrai de cette production. Orchestre excellent emporté par la fougue de D.Rustioni, chœurs et maîtrise de l'Opéra de Lyon vraiment superbes.
J.Relyea s'impose dans le rôle de Mefistofele : timbre sombre, voix bien projetée et belle incarnation. Ce n'est pas si souvent qu'on entend des voix de cette qualité à Lyon. La soprano Evgenia Murareva est une Margherita/Elena correcte, mais la voix manque d'assise dans le grave et le chant pourrait être plus nuancé. Mais elle assure globalement le rôle peu aidée par la mise en scène. Enfin on souffre pour Paul Groves qui se bat avec un engagement qu'on ne peut qu'admirer contre une voix qui ne peut dissimuler son usure.

Pour moi le gros point noir est la mise en scène. Dans sa note d'intention A.Ollé dit vouloir faire de Mefistofele le personnage principal. Il en fait un technicien de surface psychopathe ( c'est très tendance de transformer le héros du livret en technicien de surface - à Lyon on a déjà donné) qui exhibe l'infinie cruauté de son imagination destructrice. Mais à part qq scènes gore pendant le prologue et au troisième acte quand on apporte à Margherita pendant son air le cadavre de son bébé dans une assiette, le metteur en scène ne fait rien de cette idée. On assiste à une succession de tableaux dans une scénographie qui envahit tout le plateau et qui laisse d'autant moins d'espace aux nombreux choristes souvent en scène et comme la direction d'acteurs est sommaire voire inexistante on peut avoir l'impression d'assister à un concert en costumes. Ollé est un immense vidéaste, mais ses mises en scène me semblent souvent manquer d'inspiration. Peut-être que comme certains autres il produit trop avec une insuffisance de réflexion.

Malgré ces défauts, il faut mesurer la chance de voir réapparaître cette œuvre à la scène. Musicalement il y a des très beaux passages et les quelques faiblesses musicales et dramaturgiques auraient pu être lissées par une mise en scène plus inspirée.

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Re: Boito- Mefistofele - Rustioni / Ollé - Lyon - 10/2018

Message par micaela » 16 oct. 2018, 11:38

Je ne sais pas si c'est encore tendance, mais ce n'est pas tout à fait neuf. Haneke faisait déjà de Zerline et Masetto les membres d'une équipe de techniciens de surface.
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Re: Boito- Mefistofele - Rustioni / Ollé - Lyon - 10/2018

Message par srourours » 18 oct. 2018, 19:50

Amis du bon gout bonjour, je vous livre le titre de la critique du spectacle lyonnais dans libé:

"MEFISTOFELE,FAUST FUCKING" voilà voilà

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Re: Boito- Mefistofele - Rustioni / Ollé - Lyon - 10/2018

Message par dge » 18 oct. 2018, 20:05

srourours a écrit :
18 oct. 2018, 19:50
Amis du bon gout bonjour, je vous livre le titre de la critique du spectacle lyonnais dans libé:

"MEFISTOFELE,FAUST FUCKING" voilà voilà
Tu en penses quoi de ce spectacle ?

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