Ce n'est pas moi qui ai convoqué les mânes de Sutherland et Callasjerome a écrit : ↑25 août 2017, 12:37Si on va par là, personne n'est comparable à Sutherland, tant les moyens vocaux étaient immenses et la puissance vocale exceptionnelle et ce, jusqu'à son retrait de la scène. On n'a plus jamais eu pareille voix, pareille technique et pareille projection! Même June Anderson qui est celle qui s'en rapprochait le plus n'avait que la moitié de ses moyens vocaux.
Alors Jessica Pratt est à June Anderson ce que June Anderson était à Sutherland! C'est à dire que les moyens globaux sont moindres mais on est techniquement, stylistiquement dans la même filiation belcantiste et à plus d'un titre on sent que Pratt a beaucoup écouté Sutherland.
A la base un timbre assez corsé et plutôt beau, un ambitus de près de 3 octaves (le contre-sol ne lui fait pas peur, c'est rien de le dire!), une vocalisation exemplaire, une émission franche et naturelle qui va jusqu'à l'arrogance dans le registre aigu et suraigu. Toujours à la base la moitié basse de la voix est moins sonore que la moitié haute. Et ça, c'était il y a une petite dizaine d'années!
Personnellement, je trouve que le medium qui était un peu faiblard il y a quelques années s'est considérablement étoffé depuis 2/3 ans, ce qui fait que l'assise dans le grave est un peu plus sonore. En outre, elle n'a pas fait ce gain substantiel au détriment de l'aigu et du suraigu qui sont restés péremptoires et effectivement elle a intégré toutes les règles belcantistes qui impliquent une capacité à ornementer à volonté les reprises. Ce qui me fait d'ailleurs dire qu'elle a aussi beaucoup écouté Beverly Sills.
Pratt est capable dans Lucia di Lammermoor de donner du contre-mi à l'unisson avec le ténor dans son duo conclusif du 1er acte, contre-mi qu'elle reconvoquera dans le duo avec le baryton, de conclure son duo avec la basse par un retentissant contre-fa (tiens! comme Sills dans son intégrale studio!), de faire les 2 contre-ré (bémol puis naturel) de la fin de l'acte 2 et d'enchainer les variations de la scène de la folie avec in fine 2 contre-mi bémols absolument magnifiques. Même si évidemment on n'a pas la même ampleur de moyens vocaux qu'Anderson et que Sutherland, depuis elles, on n'a eu aucune Lucia de la qualité de Pratt qui est la meilleure Lucia actuelle possible.
Et je trouve qu'elle est exemplaire à plus d'un titre et j'ai par exemple beaucoup aimé sa Semiramide mais surtout adoré sa Rosmonda.
Elle a chanté Armida il y a quelques années avec une certaine arrogance et ça faisait son effet bien que la voix n'était pas immense. Perso, je formule le voeu qu'elle reprenne ce rôle d'ici 5 ou 6 ans ...
Ce que tu décris de sa Lucia, on ne le lui a pas laissé faire à la Scala. Est-ce qu'Abba-deux va jouer les Pido ? Ce serait bousiller la soirée.
Magnifique Armida, mais si c'est celle de Garsington, c'était devant moins de 500 personnes : des conditions acoustiques idéales pour ce genre de répertoire.
J'aime beaucoup le grain de sa voix : elle reste belle dans le suraigu le plus extrême (si ça n'a pas changé).