Giordano - Andrea Chénier - Abbado/Bellocchio - Rome - 04-05/2017
Re: Giordano - Andrea Chénier - Abbado/Bellocchio - Rome - 04-05/2017
Aux saluts
Bernard
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Sunt lacrymae rerum et mentem mortalia tangunt Énéide I v
Re: Giordano - Andrea Chénier - Abbado/Bellocchio - Rome - 04-05/2017
A noter que cette première a été enregistrée par Radio Tre pour une prochaine diffusion ; on ne connait pas encore la date, mais je suis l'affaire de près...
Re: Giordano - Andrea Chénier - Abbado/Bellocchio - Rome - 04-05/2017
Quelques images pour une idée de l'esthétique de Bellocchio :
https://www.youtube.com/watch?v=4GZVp_BUnx4
Bernard
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Re: Giordano - Andrea Chénier - Abbado/Bellocchio - Rome - 04-05/2017
C'est esthétiquement très proche de ce que Bellocchio avait déjà fait pour Rigoletto (à la télévision) : respect de l'époque pour les décors et les costumes, travail fouillé sur le livret (et les didascalies), modestie et attention pour restituer au mieux l'esprit de l’œuvre, sans renoncer toutefois à une vision personnelle ; bref l'inverse exact de la démarche de nos modernes démiurges, dont il est inutile ici de rappeler les noms (je voudrais pas énerver encore MariaStuarda)...
A voir aussi cette vidéo de l'Opéra de Rome, avec une interview de Bellocchio particulièrement intéressante (et intelligente).
A voir aussi cette vidéo de l'Opéra de Rome, avec une interview de Bellocchio particulièrement intéressante (et intelligente).
- MariaStuarda
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Re: Giordano - Andrea Chénier - Abbado/Bellocchio - Rome - 04-05/2017
Représentation du 28 avril 2017
André Chénier est un de ces opéras qui relatent une petite histoire dans la grande Histoire, une histoire finalement ordinaire mais dont les épisodes se situent dans une époque qui engloutit tout, un système et des hommes, des héros comme des crapules, des nobles, des religieux comme des poètes. L’arrière scène historique, par sa puissance, probablement inégalée à ce jour, le symbole d’effondrement d’un ancien et de naissance d’un nouveau monde est un personnage en soi : c’est lui, plus que ses acteurs comme Fouquier-Tinville ou Robespierre, qui manipule les pauvres marionnettes et emporte l’ensemble dans un flot irrépressible.
Mettre en scène André Chenier, c’est forcément faire apparaitre cet élément fondamental en le situant dans une dynamique. le temps est très élargi (l’opéra débute après la prise de la Bastille, alors que la royauté s’engage dans le chemin final, et s’achève en 1794), enjambe une période clé, extraordinaire. En moins de 3 heures, les personnages vont connaitre les plus grands bouleversements de l’ère moderne, des bouleversements inscrits dans chacun de nos subconscients, des bouleversements dont ils peinent forcément à comprendre les dimensions mais qui les brulent au fer rouge.
Dans ce contexte, les petits sentiments des hommes font leur petit nid, le temps d’un instant. L’orgueil de André, la révolte de Gérard, la surprise outrée de la Comtesse de Coigny, les badinages amoureux du premier acte vont apparaitre tellement dérisoires face au mouvement qui engloutit chacun, certains plus fragiles que d’autres étant destinés par leur titre ou leur statut à en être les victimes expiatoires. L’histoire d’amour est étrange dans cet opéra. Un badinage en premier acte, l’excitation de correspondance avec une femme mystérieuse, un homme qui s’évertue à sauver une femme : cet amour peu spontané nait dans l’adversité et s’épanouit le temps d’un instant aux marches de la guillotine.
Marco Bellochio peine à dépeindre la dynamique d’ensemble de cette œuvre toute particulière. Que l’on présente la soirée chez la Comtesse du premier acte comme une image d’Épinal charmante, peuplée de figurants poudrés qui ne comprennent rien à ce qui arrive, trop occupés à meubler leurs plaisirs, est, en quelque sorte inévitable. Le lieu est identifié, les dorures et les entrechats en sont la marque. Mais l’histoire ne peut pas s’arrêter là ! Dans l’opéra de Giordano, on sort de cet univers fermé sur lui-même, pour aller d’abord dans la rue ; la rue, ce lieu ou le peuple gronde, suit les gourous beaux parleurs et brûle les idoles. Le peuple doit gronder et faire masse violente et incontrôlable. Or, là, il n’apparait que comme un aimable défilé de figurants, de choristes aux gestes maladroits.
Le plateau aux murs de marbre est grand, très grand, et très peu occupé aux acte 2, 3 et 4. C’est un espace quasiment vide, presque un hall de gare, ou se posent, rentrent et sortent des gens, ou la révolution et les petites souris qui la peuplent semblent évoluer dans la salle des pas perdus d’un tribunal révolutionnaire.
Car, ce qui semble pécher dans la mise en scène, c’est, avant tout, une direction d’acteurs défaillante.
Et les protagonistes principaux en font les frais. Du coup, la hiérarchie habituelle d’interprétation semble inversée : Roberto Frontali campe un Gérard à différentes facettes; ce personnage n’est guère sympathique mais il est humain et la négociation permanente (avec lui-même et les autres) qu’il doit faire se traduit de belle manière par le chanteur. Il est le personnage le plus profond de la pièce ; il en devient presque le personnage principal. Le chant est beau, racé, jamais dans l’excès, comme peut parfois l’être celui de Gérard.
En face, c’est malheureusement l’inverse. Gregory Kunde a la voix vaillante, les aigus faciles, la révolte portée haut. Certes ! Mais, il n’est que ce personnage révolté. On se demande parfois ou est le poète et même ou est l’amoureux ! les duos avec Madalenna ne sont que concours de notes forte, les bras en croix comme un chanteur venu faire un récital pour le plaisir du public romain. La psychologie du personnage a disparu et ne laisse place qu’à un personnage finalement primaire pour lequel on n’a du mail à avoir la moindre empathie.
Marie José Siri a pu me faire peur dans le premier acte. La voix extrêmement charpentée, le vibrato lourd, collent mal avec la jeune écervelée qui minaude et virevolte dans sa société superficielle et pathétique. Mais, ce moment passé, la voix est faite pour l’adversité, pour la souffrance, pour la bataille sans pour autant devenir celle monochrome de son partenaire ténor. Le duo avec Roberto Frontali montre deux êtres sensibles et la mamma morta sans contexte, le plus beau moment de la représentation. La souffrance y est, le chant est parfaitement maitrisé et les effets ne sont jamais faciles. La fin se réduit malheureusement, comme je l’ai dit, à un concours de notes forte, surement adaptées aux tourments des héros, au mariage impossible de l’amour et de la mort, mais dont l’émotion est passablement absente.
L’ensemble est conduit de main de maitre par Roberto Abbado. La subtilité est dans la fosse, l’orchestre grossit, s’allège, enveloppe ou engloutit lorsqu’il le faut. Incontestablement, le chef de la représentation qui dirige les passions et accompagne les protagonistes, c’est lui ; Dommage qu’il n’ait été aidé par le metteur en scène.
Paul Favart
Gregory Kunde et Marie José Siri
Roberto Frontali
André Chénier est un de ces opéras qui relatent une petite histoire dans la grande Histoire, une histoire finalement ordinaire mais dont les épisodes se situent dans une époque qui engloutit tout, un système et des hommes, des héros comme des crapules, des nobles, des religieux comme des poètes. L’arrière scène historique, par sa puissance, probablement inégalée à ce jour, le symbole d’effondrement d’un ancien et de naissance d’un nouveau monde est un personnage en soi : c’est lui, plus que ses acteurs comme Fouquier-Tinville ou Robespierre, qui manipule les pauvres marionnettes et emporte l’ensemble dans un flot irrépressible.
Mettre en scène André Chenier, c’est forcément faire apparaitre cet élément fondamental en le situant dans une dynamique. le temps est très élargi (l’opéra débute après la prise de la Bastille, alors que la royauté s’engage dans le chemin final, et s’achève en 1794), enjambe une période clé, extraordinaire. En moins de 3 heures, les personnages vont connaitre les plus grands bouleversements de l’ère moderne, des bouleversements inscrits dans chacun de nos subconscients, des bouleversements dont ils peinent forcément à comprendre les dimensions mais qui les brulent au fer rouge.
Dans ce contexte, les petits sentiments des hommes font leur petit nid, le temps d’un instant. L’orgueil de André, la révolte de Gérard, la surprise outrée de la Comtesse de Coigny, les badinages amoureux du premier acte vont apparaitre tellement dérisoires face au mouvement qui engloutit chacun, certains plus fragiles que d’autres étant destinés par leur titre ou leur statut à en être les victimes expiatoires. L’histoire d’amour est étrange dans cet opéra. Un badinage en premier acte, l’excitation de correspondance avec une femme mystérieuse, un homme qui s’évertue à sauver une femme : cet amour peu spontané nait dans l’adversité et s’épanouit le temps d’un instant aux marches de la guillotine.
Marco Bellochio peine à dépeindre la dynamique d’ensemble de cette œuvre toute particulière. Que l’on présente la soirée chez la Comtesse du premier acte comme une image d’Épinal charmante, peuplée de figurants poudrés qui ne comprennent rien à ce qui arrive, trop occupés à meubler leurs plaisirs, est, en quelque sorte inévitable. Le lieu est identifié, les dorures et les entrechats en sont la marque. Mais l’histoire ne peut pas s’arrêter là ! Dans l’opéra de Giordano, on sort de cet univers fermé sur lui-même, pour aller d’abord dans la rue ; la rue, ce lieu ou le peuple gronde, suit les gourous beaux parleurs et brûle les idoles. Le peuple doit gronder et faire masse violente et incontrôlable. Or, là, il n’apparait que comme un aimable défilé de figurants, de choristes aux gestes maladroits.
Le plateau aux murs de marbre est grand, très grand, et très peu occupé aux acte 2, 3 et 4. C’est un espace quasiment vide, presque un hall de gare, ou se posent, rentrent et sortent des gens, ou la révolution et les petites souris qui la peuplent semblent évoluer dans la salle des pas perdus d’un tribunal révolutionnaire.
Car, ce qui semble pécher dans la mise en scène, c’est, avant tout, une direction d’acteurs défaillante.
Et les protagonistes principaux en font les frais. Du coup, la hiérarchie habituelle d’interprétation semble inversée : Roberto Frontali campe un Gérard à différentes facettes; ce personnage n’est guère sympathique mais il est humain et la négociation permanente (avec lui-même et les autres) qu’il doit faire se traduit de belle manière par le chanteur. Il est le personnage le plus profond de la pièce ; il en devient presque le personnage principal. Le chant est beau, racé, jamais dans l’excès, comme peut parfois l’être celui de Gérard.
En face, c’est malheureusement l’inverse. Gregory Kunde a la voix vaillante, les aigus faciles, la révolte portée haut. Certes ! Mais, il n’est que ce personnage révolté. On se demande parfois ou est le poète et même ou est l’amoureux ! les duos avec Madalenna ne sont que concours de notes forte, les bras en croix comme un chanteur venu faire un récital pour le plaisir du public romain. La psychologie du personnage a disparu et ne laisse place qu’à un personnage finalement primaire pour lequel on n’a du mail à avoir la moindre empathie.
Marie José Siri a pu me faire peur dans le premier acte. La voix extrêmement charpentée, le vibrato lourd, collent mal avec la jeune écervelée qui minaude et virevolte dans sa société superficielle et pathétique. Mais, ce moment passé, la voix est faite pour l’adversité, pour la souffrance, pour la bataille sans pour autant devenir celle monochrome de son partenaire ténor. Le duo avec Roberto Frontali montre deux êtres sensibles et la mamma morta sans contexte, le plus beau moment de la représentation. La souffrance y est, le chant est parfaitement maitrisé et les effets ne sont jamais faciles. La fin se réduit malheureusement, comme je l’ai dit, à un concours de notes forte, surement adaptées aux tourments des héros, au mariage impossible de l’amour et de la mort, mais dont l’émotion est passablement absente.
L’ensemble est conduit de main de maitre par Roberto Abbado. La subtilité est dans la fosse, l’orchestre grossit, s’allège, enveloppe ou engloutit lorsqu’il le faut. Incontestablement, le chef de la représentation qui dirige les passions et accompagne les protagonistes, c’est lui ; Dommage qu’il n’ait été aidé par le metteur en scène.
Paul Favart
Gregory Kunde et Marie José Siri
Roberto Frontali
Re: Giordano - Andrea Chénier - Abbado/Bellocchio - Rome - 04-05/2017
Merci Paul pour ce CR .
Je diverge beaucoup sur le fond : Giordano n'a pas écrit autre chose qu'un beau mélodrame tout entier articulé dans la triangulation archétypique du genre.
Le thème du poète français décapité par la révolution est certes un scénario dramatique de choix qui offre des scènes fortes qui tirent de l'Histoire des antagonismes violents et des images passionnelles ( la scène de Madelon en est le plus bel exemple ).
Qu'on attende d'un opéra comme celui de Giodano un manifeste historique ou une démonstration politique me surprendra toujours.
Andrea Chenier n'est qu'une romance qu'il faut rendre la plus sensible possible par ce que la musique des voix exprime.( La mamma morta n'a rien à voir avec le contexte insurrectionnel ,mais avec la règle du genre , la convention - comme le Vissi d'arte au milieu de Tosca ; c'est son pouvoir mélodique et pathétique qui nous fait plaisir ...parfois à en pleurer ... )
Enfin quant à Kunde , inutile de dire que , moi j'adore enfin un ténor qui a la voix du rôle écrit , avec l'énergie et la puissante vaillance qui colle à ce style d'opéra.
Non pas un ténor gueulard mais un ténor qui sait vivre la suavité de l'instant sans excès baroque et démonstratif et qui le moment venu fait vibrer les murs quand tout est perdu .
Kunde à cet égard est certainement pour l'heure unique là dedans. Et il fait ce que personne d'autre n'a les moyens actuellement de faire ( probablement plus pour très longtemps , alors courrez y )
Bernard
ta critique me conforte dans l'idée que certains n'entrent plus dans la convention de l'opéra et attendent des démonstrations...tout le WE de fiasco auquel j'ai assisté est fondé sur ce malentendu : faire de l'opéra autre chose que ce qu'il est
Je diverge beaucoup sur le fond : Giordano n'a pas écrit autre chose qu'un beau mélodrame tout entier articulé dans la triangulation archétypique du genre.
Le thème du poète français décapité par la révolution est certes un scénario dramatique de choix qui offre des scènes fortes qui tirent de l'Histoire des antagonismes violents et des images passionnelles ( la scène de Madelon en est le plus bel exemple ).
Qu'on attende d'un opéra comme celui de Giodano un manifeste historique ou une démonstration politique me surprendra toujours.
Andrea Chenier n'est qu'une romance qu'il faut rendre la plus sensible possible par ce que la musique des voix exprime.( La mamma morta n'a rien à voir avec le contexte insurrectionnel ,mais avec la règle du genre , la convention - comme le Vissi d'arte au milieu de Tosca ; c'est son pouvoir mélodique et pathétique qui nous fait plaisir ...parfois à en pleurer ... )
Enfin quant à Kunde , inutile de dire que , moi j'adore enfin un ténor qui a la voix du rôle écrit , avec l'énergie et la puissante vaillance qui colle à ce style d'opéra.
Non pas un ténor gueulard mais un ténor qui sait vivre la suavité de l'instant sans excès baroque et démonstratif et qui le moment venu fait vibrer les murs quand tout est perdu .
Kunde à cet égard est certainement pour l'heure unique là dedans. Et il fait ce que personne d'autre n'a les moyens actuellement de faire ( probablement plus pour très longtemps , alors courrez y )
Bernard
ta critique me conforte dans l'idée que certains n'entrent plus dans la convention de l'opéra et attendent des démonstrations...tout le WE de fiasco auquel j'ai assisté est fondé sur ce malentendu : faire de l'opéra autre chose que ce qu'il est
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Re: Giordano - Andrea Chénier - Abbado/Bellocchio - Rome - 04-05/2017
Ps :
Autre désaccord , si les décors sont sobres voire évoluent vers le dépouillement voulu , pour laisser les personnages seuls puis les voix nues ( presque), je ne peux pas laisser dire que la direction a été négligée.
Bellocchio soigne ses personnages avec un détail de cinéaste .
Ce n'est pas ostentatoire et il n'y a pas de grande scène spectaculaire.
Il est vrai qu'on peut être frustré de la statique du cadre pour concentrer le tout sur les chanteurs.
Ajoutons que Kunde n'a pas la silhouette du " jeune poète idéaliste " .
Bernard
Autre désaccord , si les décors sont sobres voire évoluent vers le dépouillement voulu , pour laisser les personnages seuls puis les voix nues ( presque), je ne peux pas laisser dire que la direction a été négligée.
Bellocchio soigne ses personnages avec un détail de cinéaste .
Ce n'est pas ostentatoire et il n'y a pas de grande scène spectaculaire.
Il est vrai qu'on peut être frustré de la statique du cadre pour concentrer le tout sur les chanteurs.
Ajoutons que Kunde n'a pas la silhouette du " jeune poète idéaliste " .
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Re: Giordano - Andrea Chénier - Abbado/Bellocchio - Rome - 04-05/2017
Merci pour ton CR. En espérant en entendre une retransmission comme nous avons pu apprécié le duo Kunde-Siri récemment dans Manon Lescault de Puccini.MariaStuarda a écrit : ↑01 mai 2017, 14:00En face, c’est malheureusement l’inverse. Gregory Kunde a la voix vaillante, les aigus faciles, la révolte portée haut. Certes ! Mais, il n’est que ce personnage révolté. On se demande parfois ou est le poète et même ou est l’amoureux ! les duos avec Madalenna ne sont que concours de notes forte, les bras en croix comme un chanteur venu faire un récital pour le plaisir du public romain. La psychologie du personnage a disparu et ne laisse place qu’à un personnage finalement primaire pour lequel on n’a du mail à avoir la moindre empathie.
Toute la difficulté de ces opéras véristes est justement dans l'incarnation du personnage... Nous ne sommes pas dans le bel canto où la virtuosité est souvent la qualité principale dont doit faire preuve l'artiste, nous sommes dans un opéra réaliste à forte connotation historique de surcroit où il ne s'agit pas de produire d'abord du beau chant mais où il s'agit de faire croire à son personnage par tous les moyens : chant bien sûr mais aussi intonation, expressivité, jeu scénique etc. Quand c'est poussé vers la perfection comme à Munich dans la production de Stolzt (peut être plus encore qu'à Londres dont je trouvais la mise en scène trop "policée"), on décolle en permanence, on entre dans la petite histoire comprise dans la grande et on n'en sort, éreinté, lessivé après deux petites heures sans temps morts...
Lui : Que sous mes pieds se déchire la terre ! que sur mon front éclate le tonnerre, je t'aime, Élisabeth ! Le monde est oublié !
Elle : Eh bien ! donc, frappez votre père ! venez, de son meurtre souillé, traîner à l'autel votre mère
Mon blog :
https://passionoperaheleneadam.blogspot.fr
Elle : Eh bien ! donc, frappez votre père ! venez, de son meurtre souillé, traîner à l'autel votre mère
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Re: Giordano - Andrea Chénier - Abbado/Bellocchio - Rome - 04-05/2017
Question "verisme" il y a plus évident que Andrea Chenier...
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Re: Giordano - Andrea Chénier - Abbado/Bellocchio - Rome - 04-05/2017
Il ne s'agit nullement d'en faire un manifeste politique ou une démonstration politique mais juste de dire que quand Giordano s'est attaqué à la révolution française, il ne pouvait que savoir que l'arrière plan amènerait une dimension politique très forte.quetzal a écrit : ↑01 mai 2017, 17:27Je diverge beaucoup sur le fond : Giordano n'a pas écrit autre chose qu'un beau mélodrame tout entier articulé dans la triangulation archetypique du genre.
Le thème du poète français décapité par la révolution est certes un scénario dramatique de choix qui offre des scènes fortes qui tirent de l'Histoire des antagonismes violents et des images passionnelles ( la scène de Magdelon en est le plus bel exemple ).
Qu'on attende d'un opera comme celui de Giodano un manifeste historique ou une démonstration politique me surprendra toujours.
Andrea Chenier n'est qu'une romance qu'il faut rendre la plus sensible possible par ce que la musique des voix exprime.( La mama morta n'a rien à voir avec le contexte insurectionnel ,mais avec la règle du genre , la convention - comme le Vissi d'arte au milieu de Tosca ; c'est son pouvoir mélodique et pathétique qui nous fait plaisir ...parfois à en pleurer ... )
On est très loin d'une romance. Tout n'est qu'effondrement d'un monde et comme je l'ai dit, l'histoire d'amour est très artificielle.
Pour la mamma morta, là aussi, on est loin du Vissi d'Arte qui (si je puis dire) élève le débat face aux choses triviales. Maddalena raconte quand même que sa mère s'est fait zigouiller, sa maison incendier et qu'elle a connu la faim, la peur et la maladie !
La mélodie est belle, le contenu terrifiant.
C'est précisément le manque de finesse et de nuances qui m'a stupéfié de la part d'un ténor que j'aime beaucoup, en général.quetzal a écrit : ↑01 mai 2017, 17:27Enfin quant à Kunde , inutile de dire que , moi j'adore enfin un ténor qui a la voix du rôle écrit , avec l'énergie et la puissante vaillance qui colle à ce style d'opéra.
Non pas un ténor gueulard mais un ténor qui sait vivre la suavite de l'instant sans excès baroque et démonstratif et qui le moment venu fait vibrer les murs quand tout est perdu .
Tu te trompes et ne sais comprendre mon approche.
Mais inutile de re rentrer dans ce vieux débat stérile.