Message
par paco » 21 avr. 2017, 09:27
J'ai enfin vu ce spectacle, hier soir. J'avoue me ranger du côté des avis mitigés, voire partager en grande partie "l'amère déception" de Bernard...
Je suis fan des opéras de Rimsky-Korsakov mais ne connaissais pas celui-ci. Mon impression est que, à côté de Sadko ou le Coq d'or, cette Fille de neige fait figure d'oeuvre mineure (bien d'accord avec MariaStuarda) de par sa très grande faiblesse dramatique : texte assez insipide (on passe son temps à chanter autour de l'admiration de fleurettes et autres délices printaniers), absence de tension, longs tunnels de conversation en musique sans grand intérêt (ouch, ce Prologue interminable qui plombe toute la première partie)... En ce qui me concerne je me suis fortement ennuyé et il a fallu le grand délire du 3e acte, avec cette farandole Peace & Love de Tcherniakov et auparavant l'aria splendide (et particulièrement originale) du Tsar au 2e acte, pour réveiller en moi un peu d'intérêt.
La grande faiblesse de cette production est, selon moi, la distribution : diction souvent pâteuse, sous-dimensionnement en termes de puissance et d'aura, manque de charismes, de personnalités, de ces typologies d'artistes capables d'enflammer une salle et dont l'oeuvre de Rimsky a tant besoin (pour s'en faire une idée, tapez sur Voldemort Arkhipova +, Atlantov +, Mazurok +, Petkov +, Minkiev +, etc.). On a un peu l'impression de Cimarosa perdu à la fin du XIXe siècle... C'est soigné, mais bof...
Côté Tcherniakov, il y a plus de bon que de moins bon : de moins bon il y a surtout le parti-pris, à mon sens erroné, de gommer tout le féérique indispensable pour ce type d'ouvrage. Même l'idée d'un décor unique est à mon avis une erreur, les opéras de Rimsky ont besoin de ces levers de rideau "surprise", de ces alternances d'atmosphères, de ces "ooooh", "aaaaah". Côté très bon en revanche : des images parfois somptueuses, l'idée géniale de ce tableau "Peace & Love", des ensembles bien réglés, de belles idées çà et là. Et j'ai plutôt bien aimé sa "réinterprétation" du final, elle est bien ficelée.
Finalement, je pense que cet opéra aurait plus sa place à Garnier : en effet, il est en réalité plutôt intimiste, l'essentiel étant constitué de duos et conversations (contrairement à Sadko, par exemple, où les scènes de genre sont nombreuses). Dans le vaisseau immense de Bastille, et surtout avec des chanteurs aussi peu charismatiques, tout se perd un peu.
Au global, le meilleur vient de l'orchestre : belle direction fluide et poétique de Tatarnikov, et surtout des soli instrumentaux à se pâmer ! Et puis, il reste que, sous le mandat Lissner, l'ensemble est toujours de très bonne tenue : on sent un spectacle bien travaillé, une structure (orchestre, choeurs, etc.) qui ne mérite que des éloges : on passe forcément une bonne soirée !