Wagner- Rheingold-Walküre - Barenboim/Cassiers - Staatsoper Berlin - 21-22/09/2019

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Il prezzo
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Wagner- Rheingold-Walküre - Barenboim/Cassiers - Staatsoper Berlin - 21-22/09/2019

Message par Il prezzo » 24 sept. 2019, 11:43

Direction musicale, Daniel Barenboim
Mise en scène et décors, Guy Cassiers
Costumes, Tim Van Steenbergen
Lumières, Enrico Bagnoli
Vidéo, Arjen Klerkx, Kurt D'Haeseleer
Choréographie, Sidi Larbi Cherkaoui

Rheingold:
Wotan,  Michael Volle
Donner, Roman Trekel
Froh, Simon O'Neil
Loge, Stephan Rügamer
Fricka, Ekaterina Gubanova
Freia, Anna Samuil
Erda, Anna Larsson
Alberich, Jochen Schmeckenbecher
Mime, Wolfgang Ablinger-Speerhacke
Fasolt, Matti Salminen
Fafner, Falk Struckmann 
Woglinde, Evelin Novak
Wellgunde, Natalia Skrycka
Flosshilde, Anna Lapkovskaya

Walküre:
Siegmund, Simon O'Neil
Sieglinde, Anja Kampe
Hunding, Falk Struckmann
Wotan, Michael Volle
Brünnhilde, Irene Theorin
Fricka, Ekaterina Gubanova
Gerhilde, Christiane Kohl
Helmwige, Vida Mickteviciute
Waltraute, Anja Schlosser
Schwertleite, Natalia Skrycka
Ortlinde, Anna Samuil
Siegrune, Julia Rutigliano
Grimgerde, Anna Lapkovskaya
Rossweisse, Dshamilja Kaiser

Beaucoup de (mauvaises) choses ont été dites sur cette coproduction avec la Scala (2010), créée ici en 2011 au Schillertheater. Tout au moins sur la Walkyrie de la Scala: http://www.odb-opera.com/viewtopic.php? ... yrie+Scala.

Je me contenterai donc, concernant sa scénographie, de résumer mon ressenti, et surtout ce qu'à mon avis on peut tout de même en sauver...
Du Rheingold, certainement le tableau du Nibelheim, où le ballet omniprésent et superfétatoire jusque là, incarne assez logiquement les créatures d'Alberich, que sa magie transforme en un impressionnant trône humain, puis en enveloppe protéiforme de ses métamorphoses.
Et le jeu scénique de Loge, plus deus ex machina que jamais, évident bras armé d'un Wotan un peu trop hiératique là.
Ainsi que certaines des projections video, tout au moins les plus clairement figuratives, comme cette vue de carrière/vallée, de jour et de nuit, que domine le Walhala.
Le reste assez vide ou raté: des Rheintöchter agitant vainement leurs crinolines (très pauvre vision, que reproduiront exactement et tout aussi maladroitement les Walkyries), platitude de l'image finale de montée au Walhala: les dieux disparaissent dans le noir du fond de scène, alors qu'on attendait une sublime projection ou un effet de lumière pertinent (d'autant qu'une utilisation très maîtrisée des lumières est l'une des clés plutot réussie de cette production).

Le charabia des intentions lues dans le programme (sur la "double signification" de la projection, cinématographique et freudienne) était lui en revanche assez obscur: "The two technical and aesthetical practices (projection and interactivity) in fact enable the double dialectic of past and present: the one unfolding on stage and the one unfolding in the experience of the audience (...the memory of past productions)".
Et là on aurait envie d'ajouter: la comparaison est alors cruelle 😂

C'est plutôt du côté de la fosse et des voix qu'est venu de fait le plaisir intense d'être là.
Les couleurs de la direction de Barenboim, les nuances, les variations de tempo maintiennent à elles seules la concentration: on est en permanence en attente d'une inflexion "inentendue", d'un solo d'instrument qu'on redécouvre (ce sentiment culminera d'ailleurs au 1er acte de Walkyrie). Du grand art.
Les chanteurs ont une présence et une aisance évidentes: Wagner est chez lui, dans ce "petit" théâtre allemand (versus Bastille ou Met, j'entends) et les musiciens à l'aise dans son immense fosse.

La distribution est dominée par le Wotan de Michael Volle, baryton surpuissant qui sait nuancer. Bon acteur également car on verra que son hiératisme du Rheingold laissera la place à une gestuelle toute différente, de chef déchu et de père autoritaire mais aimant dans la Walkyrie.
Et par l'Alberich de Jochen Schmeckenbecher, à l'élocution parfaite.
Duo Fasolt-Fafner de grande classe avec l'inépuisable et très charismatique Matti Salminen (74 ans), qui conserve un phrasé et un chant où figurent toutes les intentions du personnage, et Falk Struckmann au timbre incisif et lui aussi très intelligible.

Walkyrie
A sauver de la scénographie: les décors des 1er et 2nd actes.
Une chaumière Hunding plutôt moins moche que ce que l'on voit souvent. De grandes baies vitrées multipanneaux à l'arrière, permettant de beaux effets d'ombres chinoises (Sieglinde versant le somnifère ! ) et des projections esthétiquement réussies.
Et une forêt au 2e acte, d'étroits troncs lumineux. Devenant source de rayons plus clairs et plus "célestes" pour l'apparition de Brünnhilde.
C'est tout. Comment conclure aussi ridiculement une telle partition, avec les lampes rouges style élevage avicole, descendant des cintres pour "embraser" le corps de Brünnhilde?

1er acte orgasmique (malgré le manque d'érotisme de la mes, selon mon voisin).
Une tension, une émotion, une "libération" (pour rester correct!) rarement atteintes.Grâce à un duo idoine, O'Neil (sifflé en 2011!) en forme superlative, et surtout Kampe, magistrale, qui, toujours aux dire de mon voisin, surpassait encore sa prestation de Munich de l'an dernier. Que je n'avais vue qu'en vidéo. Mais il faut vraiment être à quelques mètres d'elle pour la sentir se consumer. J'avais évoqué Rysanek; je persiste.

1er acte servi par un Barenboim génial, nous inondant de détails inouïs (la phrase de violoncelle quand Siegmund évoque "ein Weib"...). Une tension qui démarre dès la 1e mesure et ne faiblit pas, alors que ce démarrage un peu lent de la Walkyrie nous demande généralement du temps pour entrer dans l'action et oublier notre prosaïque agenda de la journée.
Je n'ai pas souvenir d'avoir assisté à un tel moment parmi mes innombrables Walkyries.

Le 2e acte est à l'avenant. Volle alternant autorité et tendresse, nous obligeant à compatir aux récits de son monologue, détachant les mots avec une rare intelligibilité. Gubanova souveraine. Peu aidée par son costume, robe qui pourrait resservir dans la moitié des productions du répertoire.
Ah ces costumes ! Il faut avoir vu le petit sac à dos de Brünnhilde pour comprendre que le ridicule n'effraie pas le coupable qui les a commis (Tim Van Steenbergen).

Theorin se joue des hojotohos d'entrée, ponctués de petits gestes comme si elle chantait une ritournelle enfantine.
Sa prestation (des aigus faciles et non criés, les graves de la soprano dramatique idéale) n'a aucun mal à effacer de notre mémoire (où elle n'était pas restée longtemps) celle de Goerke en mai dernier.
Une resucée de bonheur avec Kampe au 2e acte, et un "Herstes Wunder,  herrlische Maid" d'anthologie au 3e.
De magnifiques adieux, Brünnhilde d'une sincérité bluffante, Wotan dominant aisément le flot orchestral.

La suite jeudi (Siegfried) et dimanche (Crépuscule).
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Re: Rheingold-Walküre - Barenboim/Cassiers - Staatsoper Berlin - 21-22/9/19

Message par Bernard C » 24 sept. 2019, 11:52

Bravo pour ce CR ....bon te connaissant un peu, cette Walküre ça devait être quelque chose !

Bernard

ne perds pas toutes tes forces orgasmiques dans la seconde et troisième journées , tout de même :wink:
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Re: Wagner- Rheingold-Walküre - Barenboim/Cassiers - Staatsoper Berlin - 21-22/09/2019

Message par paco » 24 sept. 2019, 14:04

Veinard ! Merci pour le CR!

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