paco a écrit : ↑03 déc. 2018, 16:42
MariaStuarda a écrit : ↑03 déc. 2018, 16:05
l'approche trop intellectualisée, à mon avis, de Jonas.
+1 . Approche de JK à laquelle j'ai du mal à adhérer, car même si l'on voit bien dans la partition qu'Otello est AUSSI un personnage subtil (nombreux pianissimi), j'ai du mal à croire qu'un "intello" se fasse aussi facilement manipuler par Iago, avec des stratagèmes aussi basiques que l'histoire du mouchoir par exemple... C'est la raison pour laquelle je n'arrive pas à accrocher à un Otello intello...
Une conférence de présentation avait lieu avant la séance d'hier où plusieurs questions ont été posées autour des vraisemblances et invraisemblances du piège où tombe Otello ainsi d'ailleurs que sur le modèle de ce qu'est supposé être ce "maure". Je vous passe les détails, ce serait trop long mais une question était, à mon avis, intelligemment posée : si Otello est ce personnage un peu sauvage, un peu primaire, un peu bestial souvent incarné par des artistes qui ont marqué le rôle, comment peut-il être en même temps ce fin stratège vainqueur de la flotte Turque, et ce bel homme qui séduit Desdémone? Peut-on imaginer une dame de cette qualité accepter un mariage mal assorti si les qualités de l'homme ne sont que primitives ? Ce qu'il lui dit, ses mots d'amour, sont autant de preuves au contraire d'une grande éducation dans le cadre d'une différence culturelle vues ses origines. Et Kaufmann campe très bien l'homme qu'Otello fut, et celui qu'il devient dans la folie meurtrière qui s'empare de lui. S'il était "par nature" brutal et bestial, une partie du personnage serait gommée, ses contradictions et la manière dont le drame se noue en particulier.
Et de la même manière, un Iago dans la peau du traitre de service est une hypothèse très discutable : pour qu'il puisse convaincre Otello ou plus exactement jeter un poison qui va le ronger dans son esprit, le doute, il faut le supposer assez roué et assez intelligent, voire intellectuellement séduisant pour que cela marche.
Et c'est ce qui est très réussi dans l'équipe de Munich, avec le fait que ce type d'interprétation est assez unique et sans doute ce qui fait courir la planète lyrique pour cet Otello-là...(écouter en particulier les 6 dernières minutes de l'acte 2, la confrontation Iago-Otello, le jeu du chat et de la souris et le mal qui ronge Otello qui va le faire disjoncter dans cette version de Munich).
Enfin concernant les autres Otello actuels, oui bien sûr il y en a des dizaines. Cura a été l'un des grands titulaires évidents du rôle dans les 20 dernières années mais il n'a pas réussi à l'époque à s'imposer avec autant de notoriété que Domingo, cela ne change rien à la qualité de son interprétation. Le problème est que je suis plus sûre qu'il en soit encore un titulaire fiable. Il avait remplacé Botha, déjà très malade, lors du festival de Salzbourg en 2016 (Pâques de mémoire), et c'est sans doute l'une des pires performances de sa carrière. La prestation existe en DVD.
Antonenko ne m'a jamais convaincue (et encore moins ces dernières années) mais il a occupé le rôle un nombre respectable de fois notamment en ouverture d'une saison du MET avec Yoncheva (DVD là encore). La reprise de cette production se fera avec Stuart Skelton que j'ai entendu en Ottelo dans une version anglaise à l'ENO et qui offre une interprétation intéressante.
Je n'ai pas vu Gregory Kunde dans ses divers Otello (dont quelques séances suite à Kaufmann à Londres) mais ceux qui avaient vu les deux, avaient aussi apprécié le ténor américain dans ce rôle.
Alagna reprend le rôle à Paris prochainement.
Etc etc.