Bizet - Carmen- Hoffmann/Fiore- Genève- 09/2018

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petitchoeur
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Bizet - Carmen- Hoffmann/Fiore- Genève- 09/2018

Message par petitchoeur » 30 sept. 2018, 22:10

Georges Bizet: Carmen, opéra-comique en 4 actes
Livret de Henry Meilhac et Ludovic Halévy d'après la nouvelle Carmen de Prosper Mérimée
Créé à Paris le 3 mars 1875, à l'Opéra-Comique

Direction musicale: John Fiore
Mise en scène & scénographie: Reinhild Hoffmann
Costumes: Andrea Schmidt-Futterer
Lumières : Alexander Koppelmann
 
 
Carmen: Ekaterina Sergeeva (10, 14, 16, 18, 20, 24 & 26 sept.) Héloïse Mas (12, 22, 27 sept. + 5 oct.*)
Don José: Sébastien Guèze (10, 14, 16, 18, 20, 24 & 26 sept. + 5 oct.*) Sergej Khomov (12, 22, 27 sept.)
Escamillo: Ildebrando D'Arcangelo et Jean-Sébastien Bou (5 oct.*)
Micaëla: Mary Feminear (10, 14, 16, 20, 24 & 26 sept. + 5 oct.*) Adriana González (12, 18, 22, 27 sept.)
Mercédès: Héloïse Mas (10, 14, 20, 24, 26 sept.) Carine Séchaye (12, 16, 18, 22, 27 sept. + 5 oct.*)
Frasquita: Melody Louledjian
Le Dancaïre: Ivan Thirion
Le Remendado: Rodolphe Briand
Zuniga: Martin Winkler
Moralès: Jérôme Boutillier
Lillas Pastia: Alonso Leal Morado
Le Couple: Brigitte Cuvelier,Jean Chaize
Une marchande: Marianne Dellacasagrande
Un bohémien: Wolfgang Barta
 
*date au Rosey Concert Hall
 
 
Chœur du Grand Théâtre de Genève
Direction: Alan Woodbridge
 
Orchestre de la Suisse Romande
 
Maîtrise du Conservatoire populaire de Musique, Danse et Théâtre de Genève
Direction: Magali Dami & Fruzsina Szuromi
 

Au Théâtre des Nations à Genève le 26 septembre 2018,

« Je souhaitais un lieu unique simple avec des éléments, en l'occurrence des tables, qui construisent et suggèrent des espaces fonctionnels me permettant de raconter ma Carmen. La scénographie épurée m'autorise à donner la véritable importance aux personnages, qui sont l 'essence même de ce chef-d'oeuvre. Ils sont bien plus importants que le décor. Au sol des confettis noirs avec des reflets argentés remplacent le sable brûlant de l'arène. Le sol est l'image de ma perception de l'ouvrage avec ses aspects sombres et ses côtés clairs (d'où les reflets argentés). En somme, un sol manichéen qui illustre une dualité omniprésente tout au long de Carmen ». (Reinhild Hoffmann, metteure en scène, dans un entretien avec Daniel Dollé dans le programme de salle). Le décor est réduit au minimum : une douzaine de grandes tables de bois. Au premier acte elles forment, verticalement posées sur deux pieds, la façade de la manufacture des tabacs. Au deuxième acte ce sont les tables de l'auberge de Lillias Pastia. Au troisième acte, posées dans un complet désordre les unes sur les autres, elles imitent la montagne. Et dans le quatrième acte, elles dessinent les murs de l'arène de Séville. Ce décor, si on peut l'appeler ainsi (tout le reste du plateau est tendu de noir) permet quelques beaux moments. Au premier acte quelques tables sont projetées par terre ce qui dégage des portes permettant de laisser sortir les cigarières de la manufacture. En tombant violemment sur le sol, elles font voler les confettis noirs et argentés. Les contrebandiers dorment sur les tables formant la montagne et y cachent leurs marchandises.


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Photo: copyright GTG

Même « minimalisme » pour les costumes dessinés par Andrea Schmidt-Futterer : « Nous avons essayé de ne pas oublier que nous sommes dans un monde de marginaux et que les sentiments des personnages sont plus importants que leur costume » (Reinhild Hoffmann dans l'entretien cité supra). Seules quelques notes de couleur dans cet univers de sombre neutralité : la robe bleu clair de Micaëla et les tenues de Mercédès et de Frasquita curieusement corsetées et peu seyantes. Les lumières d'Alexander Koppelmann donnent du relief à cette sombre harmonie. Le rideau de scène, très réussi, est un immense éventail qui s'ouvre comme un...éventail !

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Photo: copyright GTG

Deux distributions pour cette Carmen genevoise. Ce soir Héloïse Mas est Mercédès et non Carmen comme dans la distribution B et c'est Sébastien Guèze qui chante Don José (rôle tenu par Sergej Khomov certains soirs). Ekaterina Sergeeva, mezzo née à Saint Petersbourg, tient le rôle de Carmen. Belle voix puissante et bien projetée, excellente comédienne, elle campe l'héroïne avec toute la force de celle qui affirme au quatrième acte à Don José : « Jamais Carmen ne cédera! Libre elle est née, libre elle mourra ! » Sebastien Guèze, Don José, déçoit : manque de nuances, prononciation très aléatoire (merci le prompteur !) difficultés dans les aigus. Ildebrando D'Archangelo est un Escamillo sûr de lui, au timbre profond, dont la prononciation n'est pas toujours claire, c'est dommage car sa voix est séduisante. Excellentes Mercédès (Héloïse Mas) -je regrette de ne l'avoir pas entendue en Carmen- et Frasquita (Melody Louledjian). Le trio des cartes est un des grands moments de cette production. Mary Feminear -souvent entendue à Genève- est une Micaëla convaincante pleine de modestie et de courage. Les rôles plus modestes sont fort bien tenus particulièrement par Ivan Thirion (le Dancaïre) et Rodolphe Briand (le Remendado), ainsi que par Alonso Leal Morado (Lillias Pastia), Jérôme Boutillier (Moralès) et Martin Winkler (Zuniga).

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Photo: copyright GTG

John Fiore mène le plateau, l'Orchestre de la Suisse Romande, le Choeur du Grand Théâtre de Genève (préparé par Alan Woodbridge) et la Maîtrise de Conservatoire populaire de musique, danse et théâtre de Genève (préparée par Magali Dami et Fruzsina Szuromi) avec l'énergie nécessaire aux passages de bravoure, avec la noirceur des moments dramatiques, et avec la légèreté des foules des premier et quatrième actes.
Le parti-pris de Reinhild Hoffmann est, en définitive, convaincant : l'attention du spectateur n'est pas détournée par un décor et des costumes d'une Andalousie de pacotille. Comme la metteure en scène,il est fasciné par « cette éternelle danse à deux : de l'amour à la mort » (R. Hoffmann).

Pierre Tricou

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