(d'après) Puccini - Bohème, notre jeunesse - Cravero / Dupin / Bureau - Opéra Comique - 07/2018
Posté : 14 juil. 2018, 10:49
Bohème, notre jeunesse
D'APRÈS GIACOMO PUCCINI
Adaptation musicale : Marc-Olivier Dupin
Direction musicale : Alexandra Cravero
Adaptation, traduction et mise en scène : Pauline Bureau
Décors : Emmanuelle Roy
Costumes : Alice Touvet
Lumières : Bruno Brinas
Vidéo : Nathalie Cabrol
Dramaturgie : Benoîte Bureau
Collaboratrice artistique à la mise en scène : Cécile Zanibelli
Chef de chant : Marine Thoreau La Salle
Mimi : Sandrine Buendia
Rodolphe : Kevin Amiel
Musette : Marie-Eve Munger
Marcel : Jean-Christophe Lanièce
Colline : Nicolas Legoux
Schaunard : Ronan Debois
Alcindor : Benjamin Alunni
Garçon de café : Anthony Roullier
Orchestre : Les Frivolités Parisiennes
Durée (sans entracte) : 1h30
Partir du postulat que la Bohème n’est pas abordable en l’état parait plutôt incongru tant cette œuvre semble être taillée pour le grand public : chef d’œuvre de Puccini, airs et duos magnifiques, destin tragique d’une pauvre fille souffreteuse, tout était naturellement en place pour que cet opéra devienne un pilier permanent de toute scène lyrique qui se respecte. A un point tel que, ne sachant plus à quelle sauce la cuisiner, il arrive qu’on se sente d’humeur, pour le grand malheur des spectateurs, de l’envoyer dans un astre certes proche mais bien loin du Paris des années 1880. On n’a l’impression qu’enlever une scène, c’est amputer gratuitement un chef d’œuvre parfait.
Aussi, avant d’avoir assisté au spectacle, l’entreprise de Pauline Bureau et de Marc-Olivier Dupin intrigue. On se demande même s’il est vraiment nécessaire de coller au gout du jour, à la nécessité de s’accorder avec la brièveté et l’urgence de notre époque basée sur le zap et les réseaux sociaux. On doit avouer, finalement, que si l’on reste sceptique sur les spectateurs que cela va amener à l’opéra (je n’ai pas vu déferler des hordes de jeunes gens à l’opéra comique en ce soir de premières), le résultat est plutôt convaincant.
Néanmoins, il ne faut pas faire fi du fait que la durée de l’opéra s’accorde avec le temps qu’il faut pour que le (mélo) drame se déploie et que l’effet sur le spectateur soit complet. Réduire ce temps n’est donc pas sans poser problème.
Mais, en regard de cet inconvénient, le spectacle prend, pour le coup, la dynamique d’un soap opera tout à fait digeste car les équilibres musicaux sont bien respectés et on n’échappe pas à la larme de rigueur lorsque cette pauvre Mimi s’éteint sur son grabat.
Il faut dire que la mise en scène et les décors, suffisamment ramassés pour occuper la scène de Favart, collent non seulement parfaitement avec l’époque décrite, entre charpentes d’une maison ouvertes à tous vents et vidéos permettant de passer du dernier étage d’un immeuble parisien au café Momus sans intervention de tonnes de carton pâte. Les chanteurs se meuvent dans l’espace réduite de la scène et l’intimité, voire l’exiguïté, de l’action n’en sortent que renforcées.
Il est parfois intéressant de regarder la composition de l’équipe qui a mis en place et en oeuvre une entreprise : Marc-Olivier Dupin, Alexandra Cravero, Pauline Bureau, Emmanuelle Roy, Alice Touvet, Bruno Brinas, Nathalie Cabrol, Benoîte Bureau, Cécile Zanibelli, Marine Thoreau La Salle … On note indéniablement une forte prédominance féminine qui a eu, semble t’il, des incidences sur le découpage retenu puisque Pauline Bureau indique dans le programme qu’ils ont voulu « se rapprocher des personnages féminins en coupant dans les rôles masculins, afin de rééquilibrer leurs places respectives ».
Rappelant la tradition de l’Opéra Comique (Albert Carré créa l’oeuvre à Paris en 1898 dans la langue de Molière), l’oeuvre est donnée en français dans une nouvelle traduction de Pauline Bureau.
Dans cette entreprise de « rafraîchissement » de l’oeuvre de Puccini, il fallait forcément une équipe de jeunes chanteurs et celle-ci est globalement impeccable : les deux héroïnes (Mimi - Sandrine Buendia et Musette - Marie-Eve Munger) ont la voix idoine et un superbe timbre. Du côté masculin, si l’on pourra reprocher une certaine acidité dans le timbre de Kevin Amiel (Rodolphe), celui-ci assure le rôle avec une belle vaillance. Jean-Christophe Lanièce est un Marcel magnifique et Nicolas Legoux et Ronan Debois sont deux autres compères de très bonne tenue. Pour compléter le tableau, Benjamin Alunni fait de Alcindor un personnage grotesque très réussi.
Enfin, réduire le format impliquait de revoir l’architecture musicale de fond en comble. L’orchestre n’est composé que de 13 musiciens dont quatre cordes (violon, alto, violoncelle et contrebasse), quatre bois (flûte, hautbois, clarinette et basson), un percussionniste mais également une harpe et … un accordéon. Le résultat, bien plus chambriste que ce que nous entendons d’ordinaire, s’accorde idéalement avec les voix et les équilibres sont totalement respectées.
À n'en pas douter, les concepteurs de ce projet ont aboutit à une entreprise cohérente et harmonieuse. Autrement dit, si ce spectacle part en tournée, n’hésitez pas à y aller et à y emmener les enfants. Commencer son éducation lyrique par la Bohème de Puccini, que demandez de mieux ?
Paul Favart
D'APRÈS GIACOMO PUCCINI
Adaptation musicale : Marc-Olivier Dupin
Direction musicale : Alexandra Cravero
Adaptation, traduction et mise en scène : Pauline Bureau
Décors : Emmanuelle Roy
Costumes : Alice Touvet
Lumières : Bruno Brinas
Vidéo : Nathalie Cabrol
Dramaturgie : Benoîte Bureau
Collaboratrice artistique à la mise en scène : Cécile Zanibelli
Chef de chant : Marine Thoreau La Salle
Mimi : Sandrine Buendia
Rodolphe : Kevin Amiel
Musette : Marie-Eve Munger
Marcel : Jean-Christophe Lanièce
Colline : Nicolas Legoux
Schaunard : Ronan Debois
Alcindor : Benjamin Alunni
Garçon de café : Anthony Roullier
Orchestre : Les Frivolités Parisiennes
Durée (sans entracte) : 1h30
Partir du postulat que la Bohème n’est pas abordable en l’état parait plutôt incongru tant cette œuvre semble être taillée pour le grand public : chef d’œuvre de Puccini, airs et duos magnifiques, destin tragique d’une pauvre fille souffreteuse, tout était naturellement en place pour que cet opéra devienne un pilier permanent de toute scène lyrique qui se respecte. A un point tel que, ne sachant plus à quelle sauce la cuisiner, il arrive qu’on se sente d’humeur, pour le grand malheur des spectateurs, de l’envoyer dans un astre certes proche mais bien loin du Paris des années 1880. On n’a l’impression qu’enlever une scène, c’est amputer gratuitement un chef d’œuvre parfait.
Aussi, avant d’avoir assisté au spectacle, l’entreprise de Pauline Bureau et de Marc-Olivier Dupin intrigue. On se demande même s’il est vraiment nécessaire de coller au gout du jour, à la nécessité de s’accorder avec la brièveté et l’urgence de notre époque basée sur le zap et les réseaux sociaux. On doit avouer, finalement, que si l’on reste sceptique sur les spectateurs que cela va amener à l’opéra (je n’ai pas vu déferler des hordes de jeunes gens à l’opéra comique en ce soir de premières), le résultat est plutôt convaincant.
Néanmoins, il ne faut pas faire fi du fait que la durée de l’opéra s’accorde avec le temps qu’il faut pour que le (mélo) drame se déploie et que l’effet sur le spectateur soit complet. Réduire ce temps n’est donc pas sans poser problème.
Mais, en regard de cet inconvénient, le spectacle prend, pour le coup, la dynamique d’un soap opera tout à fait digeste car les équilibres musicaux sont bien respectés et on n’échappe pas à la larme de rigueur lorsque cette pauvre Mimi s’éteint sur son grabat.
Il faut dire que la mise en scène et les décors, suffisamment ramassés pour occuper la scène de Favart, collent non seulement parfaitement avec l’époque décrite, entre charpentes d’une maison ouvertes à tous vents et vidéos permettant de passer du dernier étage d’un immeuble parisien au café Momus sans intervention de tonnes de carton pâte. Les chanteurs se meuvent dans l’espace réduite de la scène et l’intimité, voire l’exiguïté, de l’action n’en sortent que renforcées.
Il est parfois intéressant de regarder la composition de l’équipe qui a mis en place et en oeuvre une entreprise : Marc-Olivier Dupin, Alexandra Cravero, Pauline Bureau, Emmanuelle Roy, Alice Touvet, Bruno Brinas, Nathalie Cabrol, Benoîte Bureau, Cécile Zanibelli, Marine Thoreau La Salle … On note indéniablement une forte prédominance féminine qui a eu, semble t’il, des incidences sur le découpage retenu puisque Pauline Bureau indique dans le programme qu’ils ont voulu « se rapprocher des personnages féminins en coupant dans les rôles masculins, afin de rééquilibrer leurs places respectives ».
Rappelant la tradition de l’Opéra Comique (Albert Carré créa l’oeuvre à Paris en 1898 dans la langue de Molière), l’oeuvre est donnée en français dans une nouvelle traduction de Pauline Bureau.
Dans cette entreprise de « rafraîchissement » de l’oeuvre de Puccini, il fallait forcément une équipe de jeunes chanteurs et celle-ci est globalement impeccable : les deux héroïnes (Mimi - Sandrine Buendia et Musette - Marie-Eve Munger) ont la voix idoine et un superbe timbre. Du côté masculin, si l’on pourra reprocher une certaine acidité dans le timbre de Kevin Amiel (Rodolphe), celui-ci assure le rôle avec une belle vaillance. Jean-Christophe Lanièce est un Marcel magnifique et Nicolas Legoux et Ronan Debois sont deux autres compères de très bonne tenue. Pour compléter le tableau, Benjamin Alunni fait de Alcindor un personnage grotesque très réussi.
Enfin, réduire le format impliquait de revoir l’architecture musicale de fond en comble. L’orchestre n’est composé que de 13 musiciens dont quatre cordes (violon, alto, violoncelle et contrebasse), quatre bois (flûte, hautbois, clarinette et basson), un percussionniste mais également une harpe et … un accordéon. Le résultat, bien plus chambriste que ce que nous entendons d’ordinaire, s’accorde idéalement avec les voix et les équilibres sont totalement respectées.
À n'en pas douter, les concepteurs de ce projet ont aboutit à une entreprise cohérente et harmonieuse. Autrement dit, si ce spectacle part en tournée, n’hésitez pas à y aller et à y emmener les enfants. Commencer son éducation lyrique par la Bohème de Puccini, que demandez de mieux ?
Paul Favart