Haendel - Jephtha - Christie/Guth - ONP - 01-2018

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Adalbéron
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Re: Haendel - Jephtha - Christie/Guth - ONP - 01-2018

Message par Adalbéron » 21 janv. 2018, 15:14

Belle soirée hier, qui est allée crescendo : je trouve que le second acte est plus saisissant musicalement - même dramatiquement, quand bien même il s'agit d'un oratorio - que le premier, mais il s'est passé quelque chose après l'entracte, une énergie et une présence chez tous les chanteurs et les chanteuses (sauf chez Lemieux, qui était déjà une tornade) qu'il n'y avait pas durant la première partie. J'en reparlerai.
France Musique enregistrait la soirée.
« Life’s but a walking shadow, a poor player / That struts and frets his hour upon the stage / And then is heard no more. It is a tale / Told by an idiot, full of sound and fury, / Signifying nothing. »
— Shakespeare, Macbeth

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Re: Haendel - Jephtha - Christie/Guth - ONP - 01-2018

Message par lionrougeetblanc » 21 janv. 2018, 21:58

Sait - on si ce Jephta a été ou sera filmé ?

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Re: Haendel - Jephtha - Christie/Guth - ONP - 01-2018

Message par opera-tic » 22 janv. 2018, 00:04

Adalbéron a écrit :
21 janv. 2018, 15:14
Belle soirée hier, qui est allée crescendo : je trouve que le second acte est plus saisissant musicalement - même dramatiquement, quand bien même il s'agit d'un oratorio - que le premier, mais il s'est passé quelque chose après l'entracte, une énergie et une présence chez tous les chanteurs et les chanteuses (sauf chez Lemieux, qui était déjà une tornade) qu'il n'y avait pas durant la première partie. J'en reparlerai.
France Musique enregistrait la soirée.
Tu as raison, mais je pense que cela tient plus a Händel qu'à la représentation : la deuxième partie est nettement plus dramatique.

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Re: Haendel - Jephtha - Christie/Guth - ONP - 01-2018

Message par Adalbéron » 22 janv. 2018, 00:54

Oui ; et musicalement, quelle merveille !
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Re: Haendel - Jephtha - Christie/Guth - ONP - 01-2018

Message par Adalbéron » 25 janv. 2018, 15:08

Je vais tenter de revenir rapidement sur la représentation du 20 janvier avant qu'il ne soit trop tard.

Mise en scène de Claus Guth efficace, pas formidablement intéressante, mais qui relève assez bien le pari de faire tenir sur scène un drame à partir de cet oratorio. J'ai trouvé des tableaux plus réussis que d'autres (j'ai notamment adoré l'air d'Iphis chanté dans un rayon jaune en carton peint descendu des ceintres). Curieux parti pris à la fin que de faire cracher Jephtha à la face de Yahvé après que Ce-dernier a décidé non pas de faire tuer Iphis mais de l'obliger à Lui consacrer sa vie (qu'est-ce qu'on ferait pas pour christianiser l'Ancien Testament...). Ça le mérite de questionner le rapport du christianisme au sacrifice et d'interroger cet ordre divin : est-il plus douloureux de mourir au monde ou de mourir tout court pour Dieu ? À l'époque de la création de Jephtha, la question ne se posait pas, et il n'y a assurément aucune ironie dans les glorifications finales adressées à Dieu dans le livret. Mais Guth ici nous fait sentir jusqu'au bout le poids du tragique d'emblée annoncé par le "It must be so" : le deus ex machina n'est qu'une parade, l'amour terrestre est tout de même brisé, la jeune fille est sacrifiée, l'ordre divin demeure négation de la vie ; l'unique différence est qu'Iphis reste assez en vie pour s'en rendre compte.
Mais Guth demeure pour moi un metteur en scène qui n'est pas des plus intéressants... (son esthétique ici va très mal vieillir en plus je pense)

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© Monika Rittershaus / OnP

Ian Bostridge est un Jephtha scéniquement émouvant, mais qui, surtout dans la première partie, a une voix assez instable, avec un vibrato prononcé, assez dérangeant. La prononciation de l'anglais est de surcroît pas des meilleures. Tous ses défauts semblent s'envoler au cours d'un "Waft her, angels, through the skies" éblouissant, interriorisé, doux et d'une sensibilité merveilleuse : le climax de la soirée.
Marie-Nicole Lemieux domine à mes yeux le plateau par un engagement total, une diction et une musicalité confondantes : on pense à son extraordinaire Cassandre au disque et on reste abasourdi devant tant de maîtrise vocale et de présence scénique. Chacune de ses interventions est un délice sur tous les plans.
Katherine Watson est charmante, sensible, mais - caractérisation oblige ? - elle manque un peu de personnalité : c'est très joli, mais un peu sans histoire. Électricité de la seconde partie oblige, elle s'est métamorphosée pour offrir un "Farewell, ye limpid springs and floods" poignant.
Tim Mead est un beau Hamor : projection remarquable, technique irréprochable, bonne diction ; mais de mon côté, pas de grande émotion.
J'ai été immédiatement charmé par le timbre de Philippe Sly, mais il ne s'est pas assez approprié le personnage pour offrir une incarnation intéressante. Cependant, une sorte de noblesse maladroite dans la seconde partie que j'ai beaucoup aimée.
Captivant Angel de Valer Sabadus, au timbre enchanteur, offrant des aigus d'une pureté incomparable. On demeure yeux et oreilles grandes ouvertes devant cette apparition surnaturelle.

Direction de William Christie très attentive, trop peu engagée dans la première partie, mais qui se révèle contrastée et ductile dans la seconde partie. Il parvient à installer de très beaux climats et à révéler les belles couleurs instrumentales de son Orchestre des Arts Florissants, excellent, malgré quelques petits couacs au début de la représentation.
Que dire du Choeur des Arts Florissants sinon qu'il a été en tout point formidable ? Nuances, diction, clarté dans la différenciation des registres et unité d'ensemble remarquables. Un "How dark, O Lord, are Thy decrees" d'une expressivité bouleversante...

Une belle soirée, où l'on a découvert in vivo cette oeuvre précieuse. Et quel bonheur, pour une fois, de pouvoir lire sur l'écran de surtitrage le texte original et sa traduction française !
La salle était pleine, très attentive et semblait très heureuse à la fin. Triomphe pour Christie.
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