Bellini - Norma - Rizzi/McVicar - New York - 09-10/2017
Re: Bellini - Norma - Rizzi/McVicar - New York - 09-10/2017
Personne n'a relevé l'étrange carabistouille dans le "programme" rédigé par Gaumont: "Le metteur en scène britannique fait honneur à la glorieuse musique de Bellini en transposant l'oeuvre à une autre époque..."! C'est sûr d'au moins 10 ans, mais je ne sais pas dire en plus en en moins
Trèfle de plaisanterie, j'évoquai plus haut qu'on est évidemment très loin de la salle de classe où se cachent les résistants de Bartoli. Je pourrais ajouter, après la 2ème partie, que les ballons sauteurs et la télé des gamins scotchés devant leurs cartoons, qui m'avaient hérissé à Londres, ne m'ont pas manqué non plus.
Sans ré-initier le débat sur la nécessité ou non de "revivifier" l'opéra en l'intégrant dans des mises en scène à message plus ou moins absconses, je trouve qu'en l'espèce, ce Norma hyper-réaliste, qui ne demande aucun "effort" d'interprétation pour le spectateur, engendre les émotions directes et intenses très certainement voulues par le librettiste et le compositeur de cette tragédie.
C'est en particulier le cas dans le sublime trio qui "pose le drame", où, malgré le gros plan du cinéma qui ne pardonne rien, la vérité des sentiments des trois personnages était bluffante. Avec une petite réserve pour Di Donato, dont le brushing tout à fait contemporain nuisait un peu à la crédibilité de l'apprenti prêtresse gauloise
Et c'était bien sûr le cas pour toute la scène finale, duos Norma-Pollione, et Orovèse, avec ces bouleversantes reprises de chœur qui génèrent immanquablement le frisson dans le dos qu'on est venu chercher, même au cinéma (je suis un converti de très fraîche date de ce mode de "consommation" de l'opéra...).
Je ne rajouterai rien à ce que j'ai lu plus haut sur les chanteurs, mieux dit que je ne saurais le faire: Radva++++, Calleja+++, Di Donato++ (pénalisée par son jeu)
Trèfle de plaisanterie, j'évoquai plus haut qu'on est évidemment très loin de la salle de classe où se cachent les résistants de Bartoli. Je pourrais ajouter, après la 2ème partie, que les ballons sauteurs et la télé des gamins scotchés devant leurs cartoons, qui m'avaient hérissé à Londres, ne m'ont pas manqué non plus.
Sans ré-initier le débat sur la nécessité ou non de "revivifier" l'opéra en l'intégrant dans des mises en scène à message plus ou moins absconses, je trouve qu'en l'espèce, ce Norma hyper-réaliste, qui ne demande aucun "effort" d'interprétation pour le spectateur, engendre les émotions directes et intenses très certainement voulues par le librettiste et le compositeur de cette tragédie.
C'est en particulier le cas dans le sublime trio qui "pose le drame", où, malgré le gros plan du cinéma qui ne pardonne rien, la vérité des sentiments des trois personnages était bluffante. Avec une petite réserve pour Di Donato, dont le brushing tout à fait contemporain nuisait un peu à la crédibilité de l'apprenti prêtresse gauloise
Et c'était bien sûr le cas pour toute la scène finale, duos Norma-Pollione, et Orovèse, avec ces bouleversantes reprises de chœur qui génèrent immanquablement le frisson dans le dos qu'on est venu chercher, même au cinéma (je suis un converti de très fraîche date de ce mode de "consommation" de l'opéra...).
Je ne rajouterai rien à ce que j'ai lu plus haut sur les chanteurs, mieux dit que je ne saurais le faire: Radva++++, Calleja+++, Di Donato++ (pénalisée par son jeu)
Quanto?
- Il prezzo !
Gia, mi dicon venal, ma, a donna bella io non mi vendo a prezzo di moneta.
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Re: Bellini - Norma - Rizzi/McVicar - New York - 09-10/2017
Visiblement, cela n'a pas été diffusé à la radio, à part l'officielle du Met. En revanche, le samedi 16 octobre sera diffusé l'opéra avec Angela Meade et Jamie Barton.
J'aurais tellement aimé entendre la distribution d'hier soir mais je trouvais le prix exhorbitant, maintenant que j'ai 26 ans. Et j'avais autre chose de prévu. J'irai sans doute voir pas plus de deux spectacles du Met au cinéma cette saison. La saison dernière, je ne suis allé voir que Der Rosenkavalier.
J'aurais tellement aimé entendre la distribution d'hier soir mais je trouvais le prix exhorbitant, maintenant que j'ai 26 ans. Et j'avais autre chose de prévu. J'irai sans doute voir pas plus de deux spectacles du Met au cinéma cette saison. La saison dernière, je ne suis allé voir que Der Rosenkavalier.
Re: Bellini - Norma - Rizzi/McVicar - New York - 09-10/2017
McVicar explique dans le programme que l'opéra se passe au temps de l'occupation de la Gaule Celtique par l'Empire Romain et qu'il y exprime le choc des cultures. McVicar ayant lui même de profondes racines écossaises celtiques s'est plongé "joyously"
dans les recherches scientifiques les plus récentes sur les anciens Celtes, les problématiques identitaires et culturelles.
Certes dit il Bellini et Romani ne disposaient pas de ces connaissances archéologiques et historiques mais se basaient d'abord sur les textes des auteurs romains.
Or on sait aujourd'hui par les études celtes que le choc des cultures fut violent.. La place centrale de la nature chez les anciens celtes et la position politique de la classe des prêtres druides jouent un rôle majeur dans leur société (et dans l'opéra).
À cet égard McVicar fait observer que sont notées des analogies avec la religion des américains natifs.
C'est dans cette optique qu'il a travaillé , combiner ce rapport étroit à la nature, marquer le choc culturel inscrit dans le drame de l'opéra, et en garder sa grande simplicité pour "préserver à la musique une sorte de classique austérité, pureté, ce qui est difficile à trouver sur le plan visuel" dit il.
"Mais on a essayé" conclut il.
B.
dans les recherches scientifiques les plus récentes sur les anciens Celtes, les problématiques identitaires et culturelles.
Certes dit il Bellini et Romani ne disposaient pas de ces connaissances archéologiques et historiques mais se basaient d'abord sur les textes des auteurs romains.
Or on sait aujourd'hui par les études celtes que le choc des cultures fut violent.. La place centrale de la nature chez les anciens celtes et la position politique de la classe des prêtres druides jouent un rôle majeur dans leur société (et dans l'opéra).
À cet égard McVicar fait observer que sont notées des analogies avec la religion des américains natifs.
C'est dans cette optique qu'il a travaillé , combiner ce rapport étroit à la nature, marquer le choc culturel inscrit dans le drame de l'opéra, et en garder sa grande simplicité pour "préserver à la musique une sorte de classique austérité, pureté, ce qui est difficile à trouver sur le plan visuel" dit il.
"Mais on a essayé" conclut il.
B.
Sunt lacrymae rerum et mentem mortalia tangunt Énéide I v
Re: Bellini - Norma - Rizzi/McVicar - New York - 09-10/2017
Radva rajoute sur le personnage de Norma.
"Le plus grand challenge est émotionnel et personnel.... Norma est une femme au tempérament vif qui change rapidement d'émotion et radicalement.
A cette seconde elle est heureuse, la minute d'après elle est désespérée et veut tuer ses enfants. C'est une femme qui est en conflit. Elle veut être grande prêtresse et être leader, conduire le peuple, et en même temps elle ne le veut pas, elle veut juste être une femme "normale" comme toutes les femmes..
Elle est divisée entre vie privée et vie professionnelle/publique, elle représente une des femmes de l'opéra la plus réelle.
Derrière la dureté de ce "modern-day business world" si vous faites tomber le masque, il y a la fragilité.
"De tous les rôles que je chante, Norma est celui qui l'exprime le plus"
traduction libre
Bernard
"Le plus grand challenge est émotionnel et personnel.... Norma est une femme au tempérament vif qui change rapidement d'émotion et radicalement.
A cette seconde elle est heureuse, la minute d'après elle est désespérée et veut tuer ses enfants. C'est une femme qui est en conflit. Elle veut être grande prêtresse et être leader, conduire le peuple, et en même temps elle ne le veut pas, elle veut juste être une femme "normale" comme toutes les femmes..
Elle est divisée entre vie privée et vie professionnelle/publique, elle représente une des femmes de l'opéra la plus réelle.
Derrière la dureté de ce "modern-day business world" si vous faites tomber le masque, il y a la fragilité.
"De tous les rôles que je chante, Norma est celui qui l'exprime le plus"
traduction libre
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Re: Bellini - Norma - Rizzi/McVicar - New York - 09-10/2017
Tout comme beaucoup d'entre nous dans divers cinémas, j'ai assisté hier soir a la transmission HD de cette "performance" au Pathé de Levallois. Impressions très mélangées : interprétation plus que satisfaisante mais mise en scène et direction d'acteurs très inégales, décors et costumes sinistres et laids...Mon épouse, historienne et archéologue de formation n'y a trouvé rien à redire, soit !
Interprétation musicale magnifique de Sondra Radvanovsky, comme on pouvait s'y attendre. Joyce Di Donato, excellente également, mais en retrait de par son "look" très contemporain comme l'a souligné l'un d'entre nous. Bien sûr, le "look" n'est pas un élément déterminant de la performance vocale mais il influe sur le ressenti qu'on peut en avoir. Joseph Calleja, lui aussi excellent mais, mais s'il a précisé dans l'entretien de l'entr'acte, comme l'a également écrit l'un d'entre nous, qu'il avait donné le contre ut dans son air, ce contre ut m'a paru plus esquissé que franchement claironné. Plus grave, il n'a pas jugé bon de reprendre la cabalette (Me protegge...) de son air, ce qui est, à mes yeux, une erreur à double titre : d'abord, la reprise est demandée par le compositeur, et, ensuite, l'air est assez court et la reprise de la cabalette est tout à fait justifiée.
Oroveso plutôt "brut de fonderie", excellents Flavio et Clotilde, bonnes prestations du chœur et de l'orchestre et direction musicale adéquate.
Ressenti final globalement (en fait, très largement) positif pour paraphraser un défunt homme politique français bien connu.
fomalhaut
Interprétation musicale magnifique de Sondra Radvanovsky, comme on pouvait s'y attendre. Joyce Di Donato, excellente également, mais en retrait de par son "look" très contemporain comme l'a souligné l'un d'entre nous. Bien sûr, le "look" n'est pas un élément déterminant de la performance vocale mais il influe sur le ressenti qu'on peut en avoir. Joseph Calleja, lui aussi excellent mais, mais s'il a précisé dans l'entretien de l'entr'acte, comme l'a également écrit l'un d'entre nous, qu'il avait donné le contre ut dans son air, ce contre ut m'a paru plus esquissé que franchement claironné. Plus grave, il n'a pas jugé bon de reprendre la cabalette (Me protegge...) de son air, ce qui est, à mes yeux, une erreur à double titre : d'abord, la reprise est demandée par le compositeur, et, ensuite, l'air est assez court et la reprise de la cabalette est tout à fait justifiée.
Oroveso plutôt "brut de fonderie", excellents Flavio et Clotilde, bonnes prestations du chœur et de l'orchestre et direction musicale adéquate.
Ressenti final globalement (en fait, très largement) positif pour paraphraser un défunt homme politique français bien connu.
fomalhaut
Re: Bellini - Norma - Rizzi/McVicar - New York - 09-10/2017
Oui, je ne savais pas qu'il avait évoqué son contre Ut du I en interview, mais comme je l'ai noté dans mon commentaire à chaud à l'entracte, il l'a carrément laissé dans la gorge,"crack" très perceptible dans la salle.
Ceci dit, c'est un accident pardonnable mais qui l'a conduit à la prudence tout au long du I.
Au II les choses au niveau vocal étaient plus assurées.
Ceci dit j'aime cette voix dans Pollione moins en force que souvent certes mais au timbre et à la musicalité qui rend le personnage attachant et nous permet de comprendre la situation finale.
Bernard
Ceci dit, c'est un accident pardonnable mais qui l'a conduit à la prudence tout au long du I.
Au II les choses au niveau vocal étaient plus assurées.
Ceci dit j'aime cette voix dans Pollione moins en force que souvent certes mais au timbre et à la musicalité qui rend le personnage attachant et nous permet de comprendre la situation finale.
Bernard
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Re: Bellini - Norma - Rizzi/McVicar - New York - 09-10/2017
Quelques impressions après la retransmission Pathé
- D'abord la mise en scène qui fonctionne assez bien sauf quelques détails qui m'ont fait rigolé comme la manie de Norma à allumer des bougies parfumées ou les musclors qui portent des grosses buches pour construire dare-dare le bucher pour cramer les impies
- La direction de Rizzi est assez belle mais je regrette toutefois sa tendance à alanguir démesurement les cantilènes belliniennes
- Sondra Radvanovsky est vocalement époustouflante ; je me suis vraiment régalé ; un regret malgré tout sur la diction toujours un chouïa pâteuse et l'absence d'effet dramatique sur certains mots-clés ( sa façon de chanter le "Indegno !" dans le duo finale est vraiment molle)
- Joyce Di Donato qui est une chanteuse que je n’aime pas beaucoup trouve ici pour moi son meilleur rôle ; pour une fois je ne me suis pas assoupi en l'écoutant ; sa coiffure ne m'a pas gêné outre mesure ( juste un contraste bizarre avec la coupe échevelée de Norma au moment du casta diva); je l'ai trouvée très investie dans son rôle et dramatiquement efficace. La réussite des duos avec SR lui est en grande partie due.
- Par rapport à ce que j'avais entendu à Londres, la composition de Calleja est bien meilleure avec beaucoup plus de mordant, de projection et d'émotion ( le duo du dernier acte est à ce titre absolument sublime)
Comme j'aurai aimé être dans la salle !!
- D'abord la mise en scène qui fonctionne assez bien sauf quelques détails qui m'ont fait rigolé comme la manie de Norma à allumer des bougies parfumées ou les musclors qui portent des grosses buches pour construire dare-dare le bucher pour cramer les impies
- La direction de Rizzi est assez belle mais je regrette toutefois sa tendance à alanguir démesurement les cantilènes belliniennes
- Sondra Radvanovsky est vocalement époustouflante ; je me suis vraiment régalé ; un regret malgré tout sur la diction toujours un chouïa pâteuse et l'absence d'effet dramatique sur certains mots-clés ( sa façon de chanter le "Indegno !" dans le duo finale est vraiment molle)
- Joyce Di Donato qui est une chanteuse que je n’aime pas beaucoup trouve ici pour moi son meilleur rôle ; pour une fois je ne me suis pas assoupi en l'écoutant ; sa coiffure ne m'a pas gêné outre mesure ( juste un contraste bizarre avec la coupe échevelée de Norma au moment du casta diva); je l'ai trouvée très investie dans son rôle et dramatiquement efficace. La réussite des duos avec SR lui est en grande partie due.
- Par rapport à ce que j'avais entendu à Londres, la composition de Calleja est bien meilleure avec beaucoup plus de mordant, de projection et d'émotion ( le duo du dernier acte est à ce titre absolument sublime)
Comme j'aurai aimé être dans la salle !!
"Gérard Mortier a raison d'offrir Elektra sans entracte"
( Eric Dahan Libération 25/06/2005)
( Eric Dahan Libération 25/06/2005)
Re: Bellini - Norma - Rizzi/McVicar - New York - 09-10/2017
Les musclors, McVicar en avait déjà mis dans sa mise en scène du Trouvère, pendant le chœur des enclumes...
Le sommeil de la raison engendre des monstres (Goya)
Re: Bellini - Norma - Rizzi/McVicar - New York - 09-10/2017
Et à la question de définir cette Norma comparativement à celles qu'elle a déjà interprétées, elle répond " c'est la plus humaine".Bernard C a écrit : ↑08 oct. 2017, 12:56Radva rajoute sur le personnage de Norma.
"Le plus grand challenge est émotionnel et personnel.... Norma est une femme au tempérament vif qui change rapidement d'émotion et radicalement.
A cette seconde elle est heureuse, la minute d'après elle est désespérée et veut tuer ses enfants. C'est une femme qui est en conflit. Elle veut être grande prêtresse et être leader, conduire le peuple, et en même temps elle ne le veut pas, elle veut juste être une femme "normale" comme toutes les femmes..
Elle est divisée entre vie privée et vie professionnelle/publique, elle représente une des femmes de l'opéra la plus réelle.
Derrière la dureté de ce "modern-day business world" si vous faites tomber le masque, il y a la fragilité.
"De tous les rôles que je chante, Norma est celui qui l'exprime le plus"
traduction libre
Bernard
Et effectivement c'est le point fort de cette mise en scène de Mc Vicar que j'ai vu souvent mieux inspiré qu'ici. Les scènes intimistes sont plutôt réussies, mais pour le reste c'est quand même moins inspiré ( je parle de ce que j'ai ressenti au ciné).