Bizet - Carmen - Heras-Casado/Tcherniakov - Aix en Provence - 07/2017

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Bizet - Carmen - Heras-Casado/Tcherniakov - Aix en Provence - 07/2017

Message par wababelooba » 04 juil. 2017, 23:01

J'ai suffisamment défendu Tcherniakov ici même pour dire à quel point ce Carmen m'a paru loupé .
Un bon gros concept à poils durs qui fonctionne une petite demi heure ( un jeu de rôle!! ... Tiens , ça rappelle ce que Dimitri avait fait à la Monnaie pour Trovatore...), un chef et un ténor qui triomphent alors que le premier dirige Bizet comme du Wagner, et que le second passe en force et joue comme une savate , et une Carmen un peu sous dimensionnée.
J'y reviens quand je serai calmé...

Stefano P

Re: Bizet-Carmen-Heras-Casado/Tcherniakov- 07/2017

Message par Stefano P » 05 juil. 2017, 08:22

wababelooba a écrit :
04 juil. 2017, 23:01
J'ai suffisamment défendu Tcherniakov ici même pour dire à quel point ce Carmen m'a paru loupé .
Un bon gros concept à poils durs qui fonctionne une petite demi heure ( un jeu de rôle!! ... Tiens , ça rappelle ce que Dimitri avait fait à la Monnaie pour Trovatore...), un chef et un ténor qui triomphent alors que le premier dirige Bizet comme du Wagner, et que le second passe en force et joue comme une savate , et une Carmen un peu sous dimensionnée.
J'y reviens quand je serai calmé...
C'est tout à fait ce que j'imaginais pour cette production en découvrant le cast, c'était couru d'avance et je ne suis pas mécontent de m'être abstenu au moment des réservations. Je me contenterai de jeter un œil demain sur Arte...

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Re: Bizet-Carmen-Heras-Casado/Tcherniakov- 07/2017

Message par wababelooba » 05 juil. 2017, 09:29

Tu as raison . Sur le cast et en lisant ses intentions , on pouvait avoir des doutes . Mais en même temps son récent Fille de Neige à l'ONP était l'une des plus belles choses que j'ai vues récemment... Alors ????

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Re: Bizet-Carmen-Heras-Casado/Tcherniakov- Aix en Provence- 07/2017

Message par fred78 » 05 juil. 2017, 13:16

J'ai assisté à la première hier soir. J'écrirai plus longuement dessus plus tard car je suis sur mon téléphone mais c'était vraiment un voyage au bout de l'ennui pour moi... Et un casting raté ! Choeur et orchestre très bons par ailleurs.

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Re: Bizet-Carmen-Heras-Casado/Tcherniakov- 07/2017

Message par elisav » 05 juil. 2017, 15:17

wababelooba a écrit :
05 juil. 2017, 09:29
Tu as raison . Sur le cast et en lisant ses intentions , on pouvait avoir des doutes . Mais en même temps son récent Fille de Neige à l'ONP était l'une des plus belles choses que j'ai vues récemment... Alors ????
Les mises-en-scène de Tcherniakov montrent une connaissance profonde et nuancée de l'histoire et de la culture russes. Mais quand il s'agit d'autres cultures, on a l'impression qu'il connait peu de choses et que ça ne l'intéresse pas d'approfondir; alors, pour palier à ses lacunes, il fait appel à des "approches psychologiques" abstraites des libretti des opéras non-russes. :mrgreen:

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Re: Bizet-Carmen-Heras-Casado/Tcherniakov- Aix en Provence- 07/2017

Message par wababelooba » 05 juil. 2017, 22:14

Tcherniakov est intelligent , très intelligent ... Ça , tout le monde le sait.
Il est surtout malin , provoc , calculateur.
Qu'il considère que Carmen regorge de "poncifs assez mièvres" , il a le droit de le penser .
D'autres l'ont fait avant lui , comme Peter Brook quand il a présenté sa tragédie de Carmen avec dialogues réécrits.
Mais Heras-Casado dit lui , fort justement "qu'il s'agit d'un opéra susceptible de satisfaire toutes les personnes qui s'en approchent avec spontanéité".
Et le fait est que le traitement que Tcherniakov inflige à Carmen est tout sauf "spontané".
L'idée du jeu de rôle paraît plaquée, impossible à faire vivre tout au long de l'opéra.
Et elle est surtout là pour permettre au metteur en scène de se distancier, de dire " je sais bien que cet alignement de hits ne peut pas faire une histoire , alors virons aux numéros façon Broadway "... et de temps en temps , ça marche.
Le choeur des enfants ( en fosse) chanté en play back par les choeurs hommes , c'est drôle... Et assez original...
L'arrivée façon Brazil de la police , ça relance l'intérêt un moment . Encore que Tcherniakov ait utilisé ce même principe du choc avec son explosion du Casse Noisette de Garnier.
Il y a en fait dans cette mise en scène un côté marthalérien, encore renforcé par le décor , immense , d'une froideur totale, comme ceux que chérit le grand suisse.
Un look Playtime de Tati, avec du marbre partout pour que les voix se perdent, ou pire reviennent avec une légère réverb. C'est totalement synchrone avec le look réfrigérant du hall du GTP, mais pas idéal pour les chanteurs.
Et tiens , justement , parlons tout de suite du grand triomphateur de la soirée Michael Fabiano.
D'accord , il mouille la chemise, d'accord , il a de l'endurance et de la puissance .
Mais il y a ces aigus pris en dessous, et cette voix en force en permanence ( à l'exception d'une très jolie voix de tête
dans l'air de la fleur).
C'est lourd , sans subtilité , pas mon genre de beauté en fait.
D'autant que le chef, lui aussi ovationné par les aixois en délire, en rajoute dans les effets spectaculaires .
Il dirige son Bizet comme du Wagner.
Ça sonne précis , brillant , mais ça ne fait qu'accentuer le côté "numéros".
Et les choeurs ( excellents au demeurant ) sont aussi dirigés à la hache ( Oooh ! ce PREN- GAR - DA -TOI !!!)
Je passe sur la Micaela assez quelconque d'Elsa Dreisig et sur l'Escamillo sonore mais peu nuancé de Michael Todd Simpson.
Et on en arrive à Stéphanie d' Oustrac . Drôle , vive , jolie à regarder, et totalement impliquée dans la vision de Tcherniakov . Reste qu'on a connu des voix plus charnues pour le rôle .

En conclusion , j'ai assez peu compris comment le public de la première a pu faire un triomphe ( mesuré tout de même...
c'était pas l'accueil de l'Elektra ou De la Maison des Morts...)à ce qui m'est apparu comme un ratage.
Ma Carmen idéale restant ACA dirigée par Gardiner , dans la maison qui l'a vue naître : l'Opéra Comique.
Là il y avait de l'émotion à fleur de peau.

PS : Et je répète une fois encore que j'ai adoré l'Onéguine , et la Fille de Neige du même Tcherniakov.
Ainsi que le Don Giovanni , que j'ai même revu à la reprise et qui a tellement été sifflé à la création.
Là aussi , il y avait de la provoc , mais il y avait plein de vérités ( ou du moins d'intéressantes réflexions) qui affleuraient.Et un beau portrait du Don façon Brando dans le Dernier Tango .

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Re: Bizet-Carmen-Heras-Casado/Tcherniakov- Aix en Provence- 07/2017

Message par srourours » 06 juil. 2017, 00:49

Etrange spectacle que ce Carmen dont je suis ressorti frustré, déçu de n'avoir été ému (tant à la générale qu'à la première), et en même temps nourri de réelles satisfactions. Ce n'est pas Carmen dont il est question, mais bien plutôt de Don José, dont seul le personnage est fouillé, travaillé, ce qui a pour conséquence de nous présenter une Carmen dégarnie de sa substance théâtrale, puisque par la mise en abyme, actrice complice d'une machination. Et ce n'est pas la moindre des prouesses de Stéphanie d'Oustrac que de faire vivre ce personnage, de lui donner une épaisseur, un relief.
Tcherniakov réaffirme son métier, sa science de la mise en scène. Mouvements des choeurs réglés comme une horlogerie suisse, avec des moments assez inouïs en particulier le début de l'acte IV qui reprend le début de l'opéra dans une pantomime quasi kafkaïenne. Mais, et il y a un gros MAIS, et pour appuyer les propos déjà énoncés, le concept ici ne prend pas. Sans doute parce que Tcherniakov ne se montre pas assez radical, comme si prisonnier de son concept, assez passe-partout et "facile", il avait voulu se montrer didactique. Il est obligé d'expliquer son concept, de le faire entrer dans une narration, et donc de rompre la dramaturgie et la conduite de la tragédie. De plus, ces scènes parlées sont mal jouées (mais pourquoi diable faire jouer Fabiano en français!!!!), et pour certaines vraiment trop longue, et franchement gênantes. La scène de l'intervention de la police (du GIGN en fait) en est l'exemple, statique, maladroite, sans ressort dramatique évident. Et surtout, la proposition scénique, froide, kafkaïenne, glacée est contredite par la direction musicale qui elle joue la carte d'une suavité, d'une "latinité" parfois outrancière. La scène dit une chose, la musique une autre mais les partitions sont discordantes. L'orchestre sonne glorieux (ah la petite harmonie...) mais la direction est tantôt précipitée, tantôt alanguie sans qu'une véritable unité s'en détache...
Concernant le plateau, les satisfactions sont pour ma part multiples. Fabiano se montre tout à fait investi dans la proposition théâtrale (ce qui m'a franchement étonné) et fait montre d'un engagement vocal quasi suicidaire. La voix est mâle, puissante, assumant crânement les aigus plus que de raison. Du troisième balcon, j'avoue avoir été parfois soufflé cependant qu'une certaine uniformité, un manque de coloration puisse rendre la performance roborative.
Je n'ai pas du tout perçu d'Oustrac comme sous-dimensionnée à moins de s'attendre à un mezzo slave et prodigue en décibels. Au contraire, le texte est incroyablement ciselé et sculpté, le chant est coloré, jouant des extrêmes des nuances. Pour ma part, l'archétype de ce qu'une école du chant français peut produire, dans une perspective parfois quasi mélodiste. Et j'ai adoré ça.
Intéressante Micaëla d'Elsa Dreisig, au timbre idoine pour le rôle, à la voix longue et remarquablement projetée, en particulier les graves. Reste un suraigu dur et fixe, sans doute lié au (très) jeune âge de la chanteuse.
Je passe rapidement sur Escamillo au chant frustre et débraillé, et à la ligne de chant heurté...
Remarquables seconds rôles: Virginie Perez affiche un matériel vocal enviable, Zuniga une très belle voix qui nous fait regretter qu'il ne chante pas Escamillo, et Mathias Vidal et Guillaume Andrieux un couple remarquablement apparié.
Un mot enfin pour évoquer le choeur, qui fut absolument somptueux de bout en bout. Clarté du son (très français là encore), précision de la mise en place tant vocale que théâtrale: une prestation exceptionnelle.

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Re: Bizet-Carmen-Heras-Casado/Tcherniakov- Aix en Provence- 07/2017

Message par muriel » 06 juil. 2017, 07:35

srourours a écrit :
06 juil. 2017, 00:49
Zuniga une très belle voix qui nous fait regretter qu'il ne chante pas Escamillo
il l'a déjà chanté, MAGNIFIQUEMENT bien, à Avignon

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Re: Bizet-Carmen-Heras-Casado/Tcherniakov- Aix en Provence- 07/2017

Message par lionrougeetblanc » 06 juil. 2017, 08:18

Retransmission ce soir en direct sur Arte à 20h55 ; on pourra se faire un avis.

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Re: Bizet-Carmen-Heras-Casado/Tcherniakov- Aix en Provence- 07/2017

Message par micaela » 06 juil. 2017, 10:46

Oui.
NB Avec sa Tragédie de Carmen Peter Brook n'a pas mis en scène l'opéra (au prix de quelques réécritures de dialogues). C'est une adaptation, assumée comme telle (d'où le titre différent) à la fois de l'opéra et de la nouvelle de Mérimée, dont il a repris quelques éléments (le mari de Carmen, par exemple)et présentée comme une œuvre originale de Brook, livret adapté de Mérimée et Meilhac et Halévy, musique de Bizet et Marius Constant. Il a d'ailleurs en fait écrit trois versions de l'histoire, qu'il a filmées avec à chaque fois une Carmen différente.
Le sommeil de la raison engendre des monstres (Goya)

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