Bizet-Les Pêcheurs de perles-vc-Bloch-TCE-12/05/2017

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JdeB
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Bizet-Les Pêcheurs de perles-vc-Bloch-TCE-12/05/2017

Message par JdeB » 10 mai 2017, 07:31

Les Pêcheurs de perles
version de concert

Orchestre National de Lille
Les Cris de Paris
Chef d'orchestre Alexandre Bloch
~
Leïla Julie Fuchs
Nadir Cyrille Dubois
Zurga Florian Sempey
Nourabad Luc Bertin-Hugault

Théâtre des Champs-Élysées, le 12 mai 2017

Avec Les Pêcheurs de perles, Bizet, qui n’a pas encore vingt-cinq ans, abandonne l’influence de Verdi et de Meyerbeer pour s’inspirer de Félicien David et de Wagner avec quelques réminiscences de Donizetti, de Meyerbeer et de Bellini tandis que son livret décalque quelques situations de la Vestale. La première, au Théâtre Lyrique, le 30 septembre 1863 a suscité beaucoup de réserves dans la presse musicale. L’opinion générale de la critique est assez bien résumée par Léon Durocher dans La Revue et Gazette musicale de Paris du 4 octobre 1863. Ce journaliste fustige d’abord la faiblesse du livret qu’il juge « à peu près aussi transparent qu'une bouteille d'encre » et déplore «la rareté des récitatifs » et le « voile symphonique dont l'auteur a couvert, presque partout, le peu qu'il y en a ». S’il reconnaît à Bizet des qualités d’ « harmoniste habile et hardi » et le félicite pour « son instrumentation (…) claire, brillante, vigoureuse », il lui reproche un « manque de mesure, de goût » et la pauvreté de son invention mélodique. Parmi les rares passages qui ont trouvé grâce à ses oreilles, il signale à ses lecteurs « Le duo entre Nadir et Zurga (premier acte) [qui] contient une phrase d'un style large et noble, et fort bien accompagnée. L'auteur y a marié la harpe à l'orchestre habituel de la façon la plus heureuse. Ce passage a produit un grand effet sur l'auditoire, qui était d'ailleurs aussi favorablement disposé que peut le souhaiter un débutant. L'air de Léila au commencement du second acte, qu'on aurait le droit de considérer comme un duo pour soprano et violoncelle, est assez mélodieux pour qu'on puisse accuser M. Bizet d'y avoir fait infidélité à ses principes. ». Il loue aussi la romance de Nadir « remarquable par un effet de crescendo trop adroitement ménagé. » et « le choeur qui se chante dans la coulisse au début du second acte, lorsque la toile se lève, avec accompagnement de tambour de basque, et répliques de flageolet » qu’il trouve « original et piquant ».
Il croit déceler chez Bizet un refus intransigeant de céder « aux préjugés du public » et le rattache à l’école wagnérienne surtout par un goût pour les décibels ; il se plaint avec virulence et une ironie mordante de la « tempête instrumentale et vocale (qui] mugit d'un bout à l'autre de ce terrible opéra » qu’il réduit à un « fortissimo qui dure trois heures ! C'est à vous rendre sourd ou à vous faire devenir fou. Il y a surtout le finale du second acte, au moment où les distractions de Léila sont révélées à la foule furieuse, qui dépasse, en fait de bruit, toutes les proportions connues. (…) »
Enfin, il dénonce aussi le « urlo francese » des solistes, peu connus à Paris, à l’exception de « M. Guyot (le brahmine), qui chante d'un bout à l'autre comme on doit chanter, sans aboyer, sans hurler, sans mugir, sans rugir, et qui ne se pose en rival d'aucune bête sauvage. »
Seul Berlioz prendra vraiment la défense de son jeune confrère dans ses colonnes du Journal des Débats en date du 8 octobre 1863. Voici en quels termes : « La partition de cet opéra a obtenu un véritable succès ; elle contient un nombre considérable de beaux morceaux expressifs pleins de feu et d’un riche coloris. Il n’y a pas d’ouverture, mais une introduction chantée et dansée pleine de verve et d’entrain. Le duo suivant : « Au fond du temple saint » est bien conduit et d’un style sobre et simple. Le chœur qui se chante à l’arrivée de Leila a paru assez ordinaire ; mais celui qui le suit est au contraire majestueux et d’une pompe harmonique remarquable. Il y a beaucoup à louer dans l’air de Nadir, avec accompagnement obligé des violoncelles et d’un cor anglais ; Morini, d’ailleurs, l’a chanté d’une façon délicieuse. Citons encore un joli chœur exécuté dans la coulisse, un passage à trois temps dans lequel un solo de violon produit un effet original. J’aime moins l’air de Leila sur la montagne ; il est accompagné d’un chœur dont le rythme est de ceux qu’on n’ose plus écrire aujourd’hui. Un autre air de Leila, avec solo de cor, est plein de grâce ; l’intervention d’un groupe de trois instruments à vent, supérieurement amenée et ramenée, y produit un effet d’une ravissante originalité. Il y a de l’ampleur et de beaux mouvements dramatiques dans le duo entre Nadir et Leila : « Ton cœur n’a pas compris le mien. » Je reprocherai seulement à l’auteur d’avoir un peu abusé dans ce duo des ensembles à l’octave. L’air du chef, au troisième acte, a du caractère ; la prière de Leila est touchante ; elle le serait davantage sans les vocalises, qui, à mon sens, en déparent la fin.
M. Bizet, lauréat de l’Institut, a fait le voyage de Rome ; il en est revenu sans avoir oublié la musique. A son retour à Paris, il s’est bien vite acquis une réputation spéciale et fort rare, celle d’un incomparable lecteur de partitions. Son talent de pianiste est assez grand d’ailleurs pour que, dans ces réductions d’orchestre qu’il fait ainsi à première vue, aucune difficulté de mécanisme ne puisse l’arrêter. Depuis Liszt et Mendelssohn, on a vu peu de lecteurs de sa force. Mais, sans doute, on l’eût comme à l’ordinaire claquemuré dans cette spécialité, sans l’intervention bienveillante de M. le comte Walewski et la subvention léguée au Théâtre-Lyrique par cet ami des arts au moment où il quittait le ministère. (…). La partition des Pêcheurs de perles fait le plus grand honneur à M. Bizet, qu’on sera forcé d’accepter comme compositeur, malgré son rare talent de pianiste lecteur. »

Depuis 10 ans, la France a connu quatre nouvelles productions de cet ouvrage. En février 2007 Patrizia Ciofi a effectué sa prise de rôle dans une mise en scène de Nadine Duffaut à Avignon. En juin 2012, l'Opéra-Comique a monté une nouvelle production signée Oida avec Sonya Yoncheva, production reprise à Liège en avril 2015 et en ce moment à Bordeaux. Un an plus tard, l'Opéra du Rhin a proposé un nouveau spectacle de Vincent Boussard avec le trio Massis-Guèze-Dupuis. Et l'an dernier, on a pu applaudir la vision d'Emmanuelle Bastet à l'Opéra de Lorraine. Signalons aussi la version de concert du 17 février 2013, salle Pleyel, avec Roberto Alagna, déjà sous l'égide des Grandes Voix.

Cyrille Dubois transcende un timbre banal, pauvre de couleurs et de substance, et une projection relativement limitée par une musicalité et un engagement sans faille, un sens du style irréprochable et des aigus purs et faciles émis avec élégance.
Florian Sempey campe un Zurga d'une impérieuse autorité et impressionne fortement. Sa voix de stentor est royale mais il chante parfois trop bas en première partie et s'adonne à des mimiques dignes de la pire période du cinéma muet.
Julie Fuchs, toute de charme et de féminité, ne trouve peut-être pas ici un rôle idoine pour épanouir son immense talent, question de style et de tempérament aussi. Elle nous réserve cependant, de sa voix fruitée et soyeuse, de bien beaux moments.
Luc Bertin-Hugault, malgré quelques intonations un peu prosaïques en fin de phrase faute de bien verticaliser son émission, dessine un Nourabad d'une réelle efficacité.

Louons hautement la diction limpide de tous.

Alexandre Bloch galvanise un orchestre pas toujours très précis avec une fougue électrisante mais les chœurs ne sont pas vraiment au niveau d'une telle réussite d'ensemble.

Salle comble et comblée.


Jérôme Pesqué
Parution de ma biographie "Régine Crespin, La vie et le chant d'une femme" ! Extraits sur https://reginecrespinbiographie.blogspot.com/
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Re: Bizet-Les Pêcheurs de perles-vc-Bloch-TCE-12/05/2017

Message par Loïs » 10 mai 2017, 11:49

JdeB a écrit :
10 mai 2017, 07:31
Les Pêcheurs de perles
Leïla Julie Fuchs
Nadir Cyrille Dubois
Zurga Florian Sempey
C'est une prise de rôle pour tout le monde non?

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Re: Bizet-Les Pêcheurs de perles-vc-Bloch-TCE-12/05/2017

Message par Epsilon » 10 mai 2017, 12:14

Loïs a écrit :
10 mai 2017, 11:49
JdeB a écrit :
10 mai 2017, 07:31
Les Pêcheurs de perles
Leïla Julie Fuchs
Nadir Cyrille Dubois
Zurga Florian Sempey
C'est une prise de rôle pour tout le monde non?
J'ai hâte d'avoir votre avis sur la Leïla de J. Fuchs, j'avoue un petit (enfin, petit....) doute!
Par contre F Sempey devrait être un très beau Zurga

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Re: Bizet-Les Pêcheurs de perles-vc-Bloch-TCE-12/05/2017

Message par PlacidoCarrerotti » 10 mai 2017, 13:14

Loïs a écrit :
10 mai 2017, 11:49
JdeB a écrit :
10 mai 2017, 07:31
Les Pêcheurs de perles
Leïla Julie Fuchs
Nadir Cyrille Dubois
Zurga Florian Sempey
C'est une prise de rôle pour tout le monde non?

Pas du tout !!!
La prise de rôle c'est demain à Lille :wink:
"Venez armé, l'endroit est désert" (GB Shaw envoyant une invitation pour l'une de ses pièces).

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Re: Bizet-Les Pêcheurs de perles-vc-Bloch-TCE-12/05/2017

Message par cosimus » 12 mai 2017, 16:06

Mieux vaut tard que jamais voici le minutage que je viens de recevoir par mail

Chers spectateurs,

 Pour vous permettre d’organiser au mieux votre soirée au Théâtre des Champs-Elysées pour  Les Pêcheurs de perles de Bizet

sous la direction de Alexandre Bloch à la tête de l’Orchestre National de Lille,  

nous vous prions de trouver ci-après le minutage :

 1ère partie : 50 mn

 Entracte : 20 mn                                   

 2ème partie : 1h

 Nous vous souhaitons une agréable soirée,
"Est modus in rebus", Horace

"La vérité luit de sa propre lumière;& on n'éclaire pas les esprits avec la flamme des bûchers." Marmontel, Bélisaire,

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Re: Bizet-Les Pêcheurs de perles-vc-Bloch-TCE-12/05/2017

Message par cosimus » 12 mai 2017, 23:11

Plus qu'agréable! Superbe soirée. Excellent quatuor vocal en particulier :D

Concert enregistré par France-Musique
Diffusion le dimanche 18 juin à 20h, en réécoute 6 mois sur le site francemusique.fr

(Lu sur le programme des Grandes Voix)
"Est modus in rebus", Horace

"La vérité luit de sa propre lumière;& on n'éclaire pas les esprits avec la flamme des bûchers." Marmontel, Bélisaire,

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Re: Bizet-Les Pêcheurs de perles-vc-Bloch-TCE-12/05/2017

Message par Il prezzo » 12 mai 2017, 23:14

Un grand ténor, sensible, engagé, aux aigus aériens et intenses. On est impatient de le réentendre ailleurs.
Un baryton que l'on connait déjà mieux, très investi, aux extraordinaires nuances, timbre de velours, presque "blanc" quand il le faut (son intervention, seul, du début du 3e acte)
Une soprano en galère dans un rôle totalement étranger à son style et à sa tessiture, même dans la scène du 3e acte avec Zurga, moins lyrique, où son tempérament aurait pu compenser (j'avais relaté l'incroyable combat Damrau-Kwiecien dans la production du Met l'an dernier, dont je n'ai retrouvé en rien l'intensité ce soir; c'est pourtant une grande scène du répertoire).
Un orchestre tonitruant, aux attaques incertaines.
Un chœur qui n'a pas démérité, mais qui souffre de la comparaison avec ceux du TNOP ou de Radio-France auxquels les heureux lyricomanes parisiens sont habitués.
Et une superbe partition, malgré l'indigence du dernier duo Nadir-Leila, qu'on croirait écrite d'une autre main que celle de Bizet.
Quanto?
- Il prezzo !
Gia, mi dicon venal, ma, a donna bella io non mi vendo a prezzo di moneta.

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Re: Bizet-Les Pêcheurs de perles-vc-Bloch-TCE-12/05/2017

Message par PlacidoCarrerotti » 12 mai 2017, 23:26

En deux mots.
Une bonne surprise !
Dubois très bien (mais voix peu puissante sans timbre caractéristique). Très musical et intelligent. Mixte raisonnable sur l'air, contre-ut (?) de poitrine dans un ensemble (genre : je sais faire)
Sempey excitant, bien projeté, aigu claironnant (mais il chante trop bas, au moins durant toute la première partie).
Fuck sans intérêt.
Basse bien, mais devrait rallonger les manches de sa veste.
Les chœurs pas terribles (et les ténors risibles).
L'orchestre limite amateur.

Mais alors pourquoi qu'est-ce que je dis que c'était une bonne surprise ?
Le chef est super génial bon nickel chrome whaou. Oeuf corse, faut connaitre l'oeuvre, mais quand on connait c'est superissime !!! Un renouvellement ou plutôt un retour aux sources ! C'est COMME CA que ça se joue.

Version conforme à l'édition critique : pas de reprise de "Oui 7 ailes" mais strette originale ("Amitié sainte" habituellement coupé), pas de trio composé par je ne sais plus qui, etc. Au moins, je l'aurai entendu une fois comme ça.

Et la direction était SUPER !
(je sais plus si je l'avions dit)
"Venez armé, l'endroit est désert" (GB Shaw envoyant une invitation pour l'une de ses pièces).

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Re: Bizet-Les Pêcheurs de perles-vc-Bloch-TCE-12/05/2017

Message par Peleo » 12 mai 2017, 23:39

Ouf! Je ne perds pas la boule. Je ne me souvenais pas de la 2ème partie du duo des messieurs.
Soucis pour les choeurs du côté des hommes.
Est-ce le décalage entre Fuchs et ses partenaires qui nous a privé de saluts individuels ?
Ne pas se moquer des bras de la basse. Une poussée de croissance sur le tard, ça arrive.

Verdiprati
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Re: Bizet-Les Pêcheurs de perles-vc-Bloch-TCE-12/05/2017

Message par Verdiprati » 13 mai 2017, 00:14

Pourquoi était-ce complet?
PlacidoCarrerotti a écrit :
12 mai 2017, 23:26
Version conforme à l'édition critique : pas de reprise de "Oui 7 ailes" mais strette originale ("Amitié sainte" habituellement coupé), pas de trio composé par je ne sais plus qui, etc. Au moins, je l'aurai entendu une fois comme ça.
Benjamin Godard.

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