la mysogynie à l'opéra (dans les livrets)

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la mysogynie à l'opéra (dans les livrets)

Message par Ruggero » 12 sept. 2005, 13:18

En écho aux représentations de Cosi fan tutte qui commencent ce soir au Palais Garnier, je vous propose de discuter de ce thème, notamment dans une perspective plus générale. Selon Chéreau, la pièce de Mozart et Da Ponte est certainement beaucoup moins mysogyne qu'on ne l'admet généralement. Les deux soeurs sont probablement bien plus fines que leurs amants.
Les textes en apparence mysogynes pullulent dans l'opéra, du fameux air sur les femmes : "comment peut-on penser du bien de ces pendardes", dans le Don Quichotte de Massenet, à certains passages de la Flûte Enchantée qui ne sont pas tendres non plus.

Que faut-il penser de chacun de ces cas, et connaissez vous d 'autres références précises?
L'opéra semble voué à être le dernier refuge du besoin de la beauté artistique en toc.
(Bernard Shaw, 1898)

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Message par tuano » 12 sept. 2005, 13:38

Je pense que l'opéra est assez misogyne mais pas davantage que la littérature, la religion, le sport ou la politique.

Mozart me semble peu misogyne et fait de Fiordiligi et de Pamina de vraies héroïnes, tandis que Papageno et Ferrando sont des lâches et des menteurs.

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Message par Catherine » 12 sept. 2005, 13:58

La majorité des opéras que nous écoutons date du XIX° siècle, où la misogynie ne se discutait même pas, elle était normale. De ceci découle cela.

Il y avait cependant des auteurs plus ou moins misogynes. Verdi était effroyablement macho (il suffit de voir comment il a traité Giuseppina Strepponi) Massenet ne l'était pas du tout (va relire le premier épisode de mon feuilleton)

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Message par yves » 12 sept. 2005, 14:10

si vous remontez jusqu'a aristote (je crois) qui disait:
"le esclaves n'ont pas d'âme, le femmes non plus", le débat est clos. :twisted:
"Dieux et dieux font cloître"
Traité d'arithmétique céleste, 1651, p. 78.

bajazet

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Message par Ruggero » 12 sept. 2005, 14:10

donc l'air de Sancho, bien sûr, sert à camper le personnage.

j'ai retrouvé les passages de la Zauberflöte dont je parlais :

l'orateur, I, 8 :
"Ein Weib tut wenig, plaudert viel
Du, Jüngling, glaubst, dem zungenspiel?"
[mauvaise traduction pour coller au texte :
une femme agit peu, parle beaucoup
toi, jeune homme, tu crois leur bavardages?"]

voir aussi le duo des deux prêtres (II, n°11) qui commence par :
Bewahret euch vor Weibertücken :
Dies ist des Bundes erste Pflicht!
[Gardez-vous des tromperies des femmes :
c'est de notre ordre le premier devoir!]

en même temps, l'orateur dit aussi à Papagena :
Fort mit dir, junges Weib, er ist deiner noch nicht würdig"
[Va-t-en, jeune femme, il n'est pas encore digne de toi]
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Message par Ruggero » 12 sept. 2005, 14:13

Catherine a écrit :La majorité des opéras que nous écoutons date du XIX° siècle, où la misogynie ne se discutait même pas, elle était normale. De ceci découle cela.
mais les opéras de Rossini ridiculisent les hommes et magnifient la beauté, la bonté, l'intelligence des femmes : Angelina est bonne et Magnifico bête et méchant, Rosina a l'esprit fin et Bartolo est un "balordo", Isabella comprend tout de suite qu'elle a un idiot en face d'elle (Mustafa comme Taddeo), etc.
existe-t-il des portraits de gourdes dans l'opéra?
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Message par Ruggero » 12 sept. 2005, 14:17

tuano a écrit :Je pense que l'opéra est assez misogyne mais pas davantage que la littérature, la religion, le sport ou la politique.
je trouve l'opéra bien moins mysogyne que le sport. essaie de regarder le tour de France féminin, pour voir.
évidemment, c'est facile, en musique il ne s'agit pas de compétition, et les timbres aigus sont nécessaires. Mais même là, j'ai remarqué chez certains amateurs de musique baroque une mysogynie virulente contre les mezzos et altos qui tiennent des rôles d'hommes, sous prétexte qu'ils devraient être tenus par des contre-ténors...
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Message par yves » 12 sept. 2005, 14:20

RuggeroRaimondi a écrit :une femme agit peu, parle beaucoup
toi, jeune homme, tu crois leur bavaradages?"
surtout quand elle dégage des pheromones...tu crois tout! :cry:

mais je trouve que les auteurs ont toujours "defendu" la femme, quand même, comme si "ils" regrettaient de s'en servir pour nourrir leur intrigue en la faisant passer pour ce qu'"elles" ne sont pas.

moliere dans son école des femmes fait dire a la soubrette, en reponse a son patron qui s'étant absenté s'inquiète de savoir si sa protégée qu'il élève depuis l'enfance pour l'épouser (comme du betail), l'a trouvé a manquer : "nous n'oyons passer devant chez nous, cheval, âne ou cochon qu'elle ne prit pour vous". et vlan prend ça dans la gueule, c'est pas de la mysoginie c'est de la machophobie, non?

donc ne vous inquiétez pas pour les femmes, elles ne sont pas à plaindre... 8)
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Message par Ruggero » 12 sept. 2005, 14:24

je me souviens tout d'un coup de l'air de Ford dans Falstaff : "je confierais ma bouteille d'eau de vie à un turc, ma bière à un allemand, toute ma tablée à un hollandais glouton, mais pas ma femme à elle même!"

la mysogynie du personnage sert encore une fois à dénoncer un travers masculin, ici la jalousie stupide.
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Message par paul » 12 sept. 2005, 15:38

RuggeroRaimondi a écrit :je me souviens tout d'un coup de l'air de Ford dans Falstaff : "je confierais ma bouteille d'eau de vie à un turc, ma bière à un allemand, toute ma tablée à un hollandais glouton, mais pas ma femme à elle même!"
Il est difficile de parler de mysoginie à travers des citations de livrets. Les paroles des livrets ne sont, après tout, que des paroles dites par un personnage dans un certain contexte, et à interprèter en tenant compte des nécessités de tracer à grand traits la psychologie des personnages (si on "enlève" la musique, un opéra dure moins longtemps qu'une pièce de théatre) et au travers du filtre des notions socio-culturelles de l'époque du libbrettiste (voire dans certains cas également, de l'époque à laquelle est supposée se tenir l'action) :cry:
Bien malin quii arrive ensuite à s'en dépatouiller de façon vraiment explicite, ce qui explique entre autres les discussions interminables (et qui personnellement me paraissent particulièrement stériles) sur Cosi.

Dans le cas de Ford, il me semble que ces paroles sont faites pour exprimer le désarroi (et la jalousie) d'un homme étroit d'esprit en face d'une femme plus subtile que lui; donc rien de mysogine, au contraire! Que Ford soit, lui, mysogine, peut-être, mais sa mysoginie doit être interprétée plus comme un outil dramaturgique et que comme un message délivré par le livret.

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