Il Trovatore (discographie)

L'actu; découvertes, sorties, critiques et conseils !
Répondre
Avatar du membre
aurele
Basse
Basse
Messages : 2544
Enregistré le : 30 août 2006, 23:00
Contact :

Il Trovatore (discographie)

Message par aurele » 26 déc. 2008, 14:03

Je lance un fil sur la discographie générale de cet opéra. On peut parler de lives aussi pas disponibles dans le commerce.

Je me suis procuré un live du Met avec une Azucena qui a peu chanté le rôle et qui est une mezzo que j'apprécie beaucoup. C'est un live du 4 mars 1967 avec la distribution suivante :
Manrico : Richard Tucker
Leonora : Montserrat Caballé
Il Conte di Luna : Robert Merrill
Azucena : "la Vénus noire" (vous la reconnaîtrez sous ce surnom)
Ferrando : Bonaldo Giaiotti
Ines : Shirley Love
Ruiz : Charles Anthony
Un messo : Joseph Folmer
Un vecchio zingaro : Luis Forero
Le chef est Molinari-Pradelli.

Ce live m'intéressait justement pour l'interprète d'Azucena.
Je l'ai écouté. Voici ma critique.

On entend beaucoup le souffleur, ce qui est assez dérengeant.
La direction de Molinari-Pradelli est sans éclat, il fait son job et c'est tout. Le théâtre ne vient pas de sa direction qui n'est pas enflammée.
Tucker a l'héroisme du personnage et est très engagé. Son interprétation d'"Ah sì, ben mio" est belle. Son "Di quella pira" est plein d'héroisme. Néanmoins, la voix est dure et n'est pas belle. On a au moins le personnage.
Caballé n'est pas à son meilleur dans le premier acte (vocalises ratées de son premier air, lourdeur) mais ce qu'elle fait par la suite est sublime. L'apogée est atteinte dans le 4e acte. Les duos sont survoltés. Son "D'amor sull'ali rosee" est de toute beauté avec des pianissimi divins. Cela donne le frisson. Elle est de plus très engagée. Il y a la diction problématique de Caballé avec les consonnes avalées mais ce n'est rien à côté de la beauté de sa voix et de son investissement. C'est une très belle Leonora même si je préfère Leontyne Price.
Bumbry est une Azucena merveilleuse. Elle a la voix du rôle, elle brule les planches, est très touchante dans la scène de la prison notamment. Dommage qu'elle n'ait pas enregistrée le rôle officiellement. C'est une incarnations sans fautes. Rien que pour elle, ce live vaut le coup d'être écouté.
Merrill est lui aussi très bon dans le rôle du Comte, il est très engagé et a une technique parfaite. Sa voix est en adéquation complète avec le personnage. Son accent américain ne me gène pas du tout. C'est un très grand baryton.
Giaiotti est un Ferrando de luxe, j'aime beaucoup ce qu'il fait dans le rôle. La voix est profonde. Lui aussi est très investi.
Je vous conseille de vous procurer ce live au moins pour l'Azucena de Bumbry et la merveilleuse Leonora de Caballé. Le Manrico de Tucker gache un peu le plaisir, il faut aimer ce genre de voix. D'habitude, son timbre particulier ne me gène pas trop mais là, j'ai du mal. C'est une représentation avec beaucoup de théâtre et cela est dû aux chanteurs.

Avatar du membre
mc06
Ténor
Ténor
Messages : 806
Enregistré le : 01 mai 2006, 23:00

Message par mc06 » 26 déc. 2008, 20:25

La version de studio que j'apprécie le plus est celle dirigée par Serafin avec les forces de la Scala ; Bergonzi , est un Trouvère stylé et vocalement superbe ;Bastiannini est un Luna plein de noblesse ; Stella est une honorable Leonora mais un peu fade par rapport à d'autres consoeurs ,Cossotto est une Azucena très efficace .

La version Karajan réunissant Callas, Di Stefano ,Barbieri, Panerai a retenu mon attention surtout pour la Leonora de Callas , à la ligne de chant soignée et émouvante .

J'assume mon mauvais goût en reconnaissant quelques vertus à la version Giulini . Sa direction équilibrée et précise , parfois lente , met en valeur la partition .Le quatuor vocal est assez inégal mais point catastrophique comme j'avais pu le lire dans certains ouvrages .Zancanaro est un Luna exceptionnel ,digne successeur d'un Bastianini . Rosalind Plowright est une Leonora qui n'a rien d'indigne . Domingo est dans une petite forme
tandis que B.Fassbender s'époumone quelque peu en gitane .Excellents choeurs .

En live , l'inévitable captation du festival de Salzbourg , a mes faveurs ; quel quatuor d'enfer !L.Price est une Leonore fougueuse et appliquée ,Corelli se glisse sans effort dans les habits de Manrico , avec des aigus glorieux , Bastianini et Simionato complétant avec tout leur talent une distribution inégalée .Sans oublier , la direction d'un Karajan inspiré .

Avatar du membre
Josquin
Ténor
Ténor
Messages : 885
Enregistré le : 25 nov. 2004, 00:00
Localisation : Paris
Contact :

Message par Josquin » 27 déc. 2008, 13:59

Le studio de Karajan avec Bonisolli, Price, Zancanaro, Obratzova et Raimondi est très bien aussi. Disons que concernant les choeurs, c'est pour moi la meilleur version: Tempi, et surtout nuances sont superbes.
Le quintet de solistes est très bon aussi même si Price est un peu en dessous des autres.

paco
Hall of Fame
Hall of Fame
Messages : 12894
Enregistré le : 23 mars 2006, 00:00

Message par paco » 27 déc. 2008, 14:24

mc06 a écrit : En live , l'inévitable captation du festival de Salzbourg , a mes faveurs ; quel quatuor d'enfer !L.Price est une Leonore fougueuse et appliquée ,Corelli se glisse sans effort dans les habits de Manrico , avec des aigus glorieux , Bastianini et Simionato complétant avec tout leur talent une distribution inégalée .Sans oublier , la direction d'un Karajan inspiré .
+1

j'y ajouterais :
- en live, la version Scala avec Corelli, Stella et une très jeune Cossotto dans sa meilleure prestation d'Azucena (dans la suite de sa carrière elle en a fait des tonnes, ça a dérapé), prouvant que ce rôle regorge de pianissimi !
- en live toujours, la version Macerata avec Bergonzi, Bruson, Berini et Ricciarelli, pour l'incomparable Luna de Bruson et la très très belle Leonora de Ricciarelli, alors à son zénith

Ce qui nous fait 3 live. A vrai dire j'ai du mal avec les Trovatore de studio, c'est une oeuvre qui a besoin de l'électricité du rapport scène-public

dongio
Baryton
Baryton
Messages : 1561
Enregistré le : 05 nov. 2006, 00:00
Contact :

Message par dongio » 29 déc. 2008, 10:59

Très décriée la version studio de Karajan...Mais j'avoue la préférer à beacoup d'autres. Cappuccilli magnifique, Raimondi très bien, Obratzsova très sorcière mais ex-tra-or-di-nai-re, la seule qui flanque vraiment le frisson (les "il figlio mio" sont transcendants) et une des plus belles Azucena jamais entendues. Leontyne Price, malgré des ans l'irréparrable outrage, reste une merveilleuse Leonora. Son "d'amor sull'ali rosee" reste malgré la voix émaciée, un exemple de poésie lunaire ("le pene del mio cor" chanté piano et s'éteignant dans la nuit est une splendeur). Reste le point noir: Bonisolli, mauvais chanteur engorgé, sans legato et au chant vulgaire, ne sauve pas sa prestation par une quinte aigüe efficace. Et puis les choeurs, et la direction flamboyante de Karajan...Non vraiment très belle version.

Avatar du membre
aurele
Basse
Basse
Messages : 2544
Enregistré le : 30 août 2006, 23:00
Contact :

Message par aurele » 29 déc. 2008, 11:10

Je ne connais pas l'Azucena d'Obratzsova. Mes Azucena préférées sont Verrett, Simionato, Bumbry, Cossotto et Zajick.

dongio
Baryton
Baryton
Messages : 1561
Enregistré le : 05 nov. 2006, 00:00
Contact :

Message par dongio » 29 déc. 2008, 16:32

ben écoute...et tu verras!

Avatar du membre
Josquin
Ténor
Ténor
Messages : 885
Enregistré le : 25 nov. 2004, 00:00
Localisation : Paris
Contact :

Message par Josquin » 29 déc. 2008, 21:05

aurele a écrit :Je ne connais pas l'Azucena d'Obratzsova. Mes Azucena préférées sont Verrett, Simionato, Bumbry, Cossotto et Zajick.
Pour moi la meilleure.
Quant aux Azucena actuelles, j'adore celle d'Intino!

Avatar du membre
aurele
Basse
Basse
Messages : 2544
Enregistré le : 30 août 2006, 23:00
Contact :

Message par aurele » 30 déc. 2008, 13:58

D'Intino va chanter le rôle au Met cette saison en alternance avec Dolora Zajick dans la nouvelle production de McVicar.

Avatar du membre
Lucas
Basse
Basse
Messages : 2584
Enregistré le : 07 janv. 2005, 00:00
Contact :

Message par Lucas » 02 févr. 2012, 17:04

Comme je me suis replongé il y a peu dans l'écoute du Trouvère de Verdi, voici quelques pistes discographiques :

- Cellini 1952 : version souvent citée en référence, par Kaminsky notamment et qui ne tient pas toutes ses promesses en raison d'une direction routinière. Mais aussi à cause d'une Barbieri un peu quelconque, parfois à la limite de la vulgarité et d'une Milanov dont le chant un peu daté et pas toujours très juste manque de spontanéité. Si l'on ajoute que Warren (dont je suis fan) est un peu monolithique, il n'y a guère que la classe innée de Bjorling qui m'emballe. Néanmoins cette intégrale ne comporte aucun gros point faible, tout le monde oscillant entre le moyen et le remarquable et c'est peut être ce qui fait son succès.

- Previtali 1957 : Vaut surtout le détour pour Gencer qui délivre un "D'amor sull'ali rosee" en apesanteur avec des pianissimi sublimes. Dommage qu'elle ne joue pas systématiquement cette carte belcantiste qui est la sienne en essayant de s'inventer parfois des accents de spinto qu'elle n'a pas car elle aurait pu, avec ses moyens propres, révolutionner l'approche du rôle. Bastianini est bien aussi mais autour, c'est le désert : Del Monaco hurleur, Barbieri, plus poissonnière qu'en studio et un Previtali battant la mesure dans un son un peu acide, sans grave et bas medium. Pour Gencer et elle seule !

- Karajan 1962 : dix ans séparent Karajan de Cellini et pourtant on a l'impression d'avoir franchi un demi-siècle tant le chant des principaux protagonistes y parait plus moderne, plus spontané et aussi beaucoup plus engagé. Domine l'ensemble une Leontyne Price radieuse à son zénith et captée dans un grand soir : timbre de velours, aigus de lumière, vocalises propres et allégements sidérants dont elle ne sera plus capable quelques années plus tard. Voici peut être son plus grand disque dopé par un Bastianini engagé et une Simionato de grande classe dopés qu'ils sont par un Karajan électrique mais dont l'orchestre est moins bien capté que les voix. Reste Corelli qui dépare par un chant assez frustre et en force qu'on peut trouver tantôt exaltant tantôt assez vulgaire. Mais bon globalement, c'est formidable.

- Bonynge : une intégrale qu'on cite rarement en référence et on a bien tort tant elle ne comporte aucun point faible : Pavarotti, grâce à une émission haute, des aigus splendides, un style royal et un bel engagement dramatique campe l'un des plus beaux Manrico de la discographie face à une Horne déchainée. Le timbre rocailleux de Wixell ne fait pas l'unanimité mais mois j'aime bien même si on peut trouver plus stylé ailleurs et Sutherland, certes un peu indolente et imprécise sur la prononciation campe une Leonora plus belcantiste que jamais sous la baguette attentive mais peu marquante de son mari. Dans le genre carré d'as sans point faible, cela me semble bien plus convaincant et mieux enregistré que Cellini.

- Davis : grosse détresse à l'écoute de cette intégrale dirigée mollement par le chef anglais. Carreras (qui à son zénith est l'un de mes ténors préférés) forçant ses moyens en s'inventant une voix de spinto qu'il n'a pas, sombre son émission et met en péril sa justesse. Masurok fait reculer les limites de la vulgarité en campant, avec un timbre usé et enlaidi, le Luna le plus trivial de la discographie. Ne sont à sauver de naufrage qu'une Toczyska, un peu claire et banale et surtout les frémissements d'une Katia Ricciarelli au timbre et à la ligne somptueux juste avant quelques Aïda, Tosca et Turandot qui ruineront l'une des plus belles voix italiennes du dernier demi siècle.

Giulini : attention chef d'oeuvre ont dit les critiques à la sortie de cette intégrale et moi je ne suis pas du tout d'accord. Certes le chef italien, en optant pour des tempi souvent très lent joue la carte du mystère et du clair-obscur, tournant le dos à une lecture plus traditionnelle et cursive de la partition. Mais sur la durée quel ennui ! Et puis surtout ses chanteuses n'ont ni la longueur de souffle, ni la technique belcantiste pour le suivre dans cette démarche : Faasbender s'époumone en se demandant bien ce qu'elle fait dans cette galère et Plowright est incapable de la moindre nuance en dessous du mezza forte. Reste Domingo, très stylé mais s'engorgeant un peu dans l'aigu et surtout Zancanaro, d'une beauté de timbre, d'une subtilité, d'une assurance dans la ligne de chant émise souvent d'une seule coulée et d'une classe telle qu'il campe, à mon avis, le plus beau Luna de la discographie.

- Levine : une immense surprise trop injustement méconnue dominée par une direction rapide, très "cap et d'épée", avec un sens du swing et de la pulsation sidérants. Bref Levine, c'est l'anti-Giulini. Quant à ses chanteurs, ils assurent : Domingo, plutôt plus en voix qu'avec Giulini, est vraiment déchainé. tout comme Zajic et Chernov, par la beauté de son timbre et son engagement jamais vulgaire forcent l'admiration. Quant à Millo, plus commune, un peu dans la lignée d'une Milanov en terme de couleur vocale mais avec la justesse en plus : ce n'est pas légendaire mais cela reste très correct même si Price, Gencer et Ricciarelli restent autrement préférables.

Finalement mon ticket gagnant pour le Trouvère serait Karajan 1962 et Bonynge talonnés de près par Levine. Et vous ?

Répondre