Hier la Tribune des critiques de disques sur France Musique était consacrée à Lucia di Lammermoor.
Etaient en lice les 6 versions suivantes (le critère était qu'elles avaient été réalisées dans les 50 dernières années):
Les extraits choisis étaient le 1er air de Lucia, 1 court extrait de l'air d'Enrico suivi d'un court extrait de l'air d'Edgardo et enfin la scène de la folie.
L'écoute du 1er air de Lucia élimine la version Damrau.
celle des airs d'Enrico et d'Edgardo éjecte les versions Netrebko et Dessay.
Sont restées en lice pour la scène de la folie les versions Sills, Studer et Sutherland et c'est cette dernière qui a été choisie comme étant la meilleure version de l'oeuvre.
voici le compte-rendu détaillé que l'on peut trouver sur le site de France Musique:
"Le chant de Diana Damrau est précis, intelligent, sa diction impeccable, et la musicienne connait de très heureux moments. D’où vient alors que l’émotion passe mal ? Et que le personnage, malgré de réelles intentions expressives, paraisse neutre ?
La Lucia d’Anna Netrebko divise. Même ceux qui lui reprochent un trille flou et un manque de grave entendent une héroïne touchante, intériorisée, respectueuse du texte. L’autre camp la rejette en bloc : pas de style, pas d’expression, un chant mort ! Mariusz Kwiecień force ses moyens en Enrico, et Piotr Beczała, en dépit de quelques sanglots, émeut dans la romance d’Edgardo.
Face à Natalie Dessay, le même Beczała, en studio, semblera corseté, face au baryton Vladislav Sulimsky qui affirme bien le ton rogue du personnage. Mais tous les regards sont tournés vers Dessay, qui compense un médium et des graves inexistants par un instinct et une intelligence du texte hors pairs. Est-elle pour autant la Lucia rêvée ? Peut-être manque-t-il l’image.
Pas besoin d’image pour admirer les suraigus et les variations délirantes de Beverly Sills, qui orne à n’en plus finir, y compris dans les moments dramatiques où c’est le moins nécessaire. Pareils effets finiraient-ils par diluer l’essence tragique du personnage ? Il y a débat. Piero Cappuccilli est sobre, et Carlo Bergonzi, princier, peine quand même à fendre la carapace. Mais quelle classe et quel style ! Trois grandes voix pour une version en technicolor du drame de Donizetti.
Voilà une belle occasion de réévaluer la lecture théâtrale et engagée de Ion Marin, servie par un trio splendide. Plácido Domingo ? Certains trouvent qu’il taille trop large. Mais le métal du timbre et la fièvre de l’accent sont irrésistibles – tout comme l’Enrico noir et vipérin de Juan Pons. Cheryl Studer trouve d’emblée le ton juste, styliste qui anime, pense et colore chaque mot : soyeux de la voix, délicatesse du phrasé, égalité de l’émission, on en redemande ! Avec une cadence à rebours des traditions, la scène de la folie est reçue diversement.
La beauté du timbre, sa longueur, et la virtuosité quasi inhumaine de Joan Sutherland laissent pantois : rien ne semble pouvoir rivaliser avec cette incarnation définitive. A cette héroïne, Luciano Pavarotti apporte un chant solaire, des aigus rayonnants et un style belcantiste parfait – admirablement secondé par le baryton insolent de Sherrill Milnes et la direction alerte de Richard Bonynge. La grande version de l’après-Callas reste décidément indémodable."