Franco Bonisolli : braillard impénitent ou grand artiste mélancolique ?

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Re: Franco Bonisolli : braillard impénitent ou grand artiste mélancolique ?

Message par aroldo » 11 juil. 2017, 13:00

Rapatrié d'un fil voisin :

Robertram

Pour rejoindre un autre fil, je m'aperçois que mon plaisir coupable ces temps-ci c'est de ré-écouter (avec plaisir donc !) Bonisolli dans Gustave III à Hambourg (direction Rudel), dans le Duc de Mantoue à Vienne (direction-et censure des suraigus- Muti), dans Pollione à Munich (direction Patané) et dans Don José à San Francisco (direction Adler). Mes lointains souvenirs de lui sur scène (Manrico et Calaf à Londres) en sont ravivés."

Gustave III, ça veut dire que c'est un Bal Masqué qui garde le décor suédois ?
l'enlevement de Clarissa a été un des évènements de ma jeunesse.

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Re: Franco Bonisolli : braillard impénitent ou grand artiste mélancolique ?

Message par robertram » 11 juil. 2017, 14:11

Non non, c’est Riccardo (et c'est moi qui me suis trompé !)

Stefano P

Re: Franco Bonisolli : braillard impénitent ou grand artiste mélancolique ?

Message par Stefano P » 11 juil. 2017, 17:17

Bonisolli en roi de Suède, on aurait quand même été dans l'hyper composition...

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Re: Franco Bonisolli : braillard impénitent ou grand artiste mélancolique ?

Message par aroldo » 13 juil. 2017, 09:38

robertram a écrit :
11 juil. 2017, 14:11
Non non, c’est Riccardo (et c'est moi qui me suis trompé !)
Qui était sa Norma à Munich ? Pollione est un rôle qui doit assez bien lui aller !
l'enlevement de Clarissa a été un des évènements de ma jeunesse.

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Re: Franco Bonisolli : braillard impénitent ou grand artiste mélancolique ?

Message par jerome » 13 juil. 2017, 10:34

aroldo a écrit :
13 juil. 2017, 09:38
Qui était sa Norma à Munich ? Pollione est un rôle qui doit assez bien lui aller!
Margaret Price puis Suzanne Murphy

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Re: Franco Bonisolli : braillard impénitent ou grand artiste mélancolique ?

Message par aroldo » 13 juil. 2017, 12:11

Oh merci, le Pollione de cette fameuse Norma de Price c'était Bonisolli. Pour les timbres, ça devait vraiment être l'alliage du bronze et de l'argent en quelque sort.

J'ai toujours été étonné de penser que Price, chanteuse prudente, avait abordé Norma.
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Re: Franco Bonisolli : braillard impénitent ou grand artiste mélancolique ?

Message par aroldo » 13 juil. 2017, 16:41

J'ai écouté I Masnadieri(Decca), aujourd'hui. Cette version Bonynge était un disque important pour moi, un des premiers que j'ai achetés. Le charme opère encore, probablement de manière plus réfléchie que du temps de ma prime jeunesse. D'abord, je suis moins gêné qu'autrefois par le livret remarquablement incohérent où les personnages changent de nature en un claquement de doigt. Le mot "tableau", à la place de scène, m'a frappé à la relecture et j'ai réalisé qu'en fonction d'une esthétique spécifique, il ne s'agissait pas tant de conduire une action en fonction d'un nœud dramatique que d'animer un moment devant le spectateur correspondant à une donnée dramatique précise, dans un registre fortement pathétique. Du coup, Amelia qui défie Francesco avec une épée, Francesco brusquement pris de remords, Carlo qui retrouve son père dans des geôles gothiques etc. deviennent des incarnations plus que des caractères. Brusquement, tout est passé comme une lettre à la poste !

Sur le plan de l'interprétation, puisqu'il s'agit de ça aujourd'hui, Bonisolli est superbe, engagé, précis, toujours frappant par l'homogénéité des registres (ça, c'est quand même incroyable, la couleur est intacte et soyeuse d'un extrême à l'autre de la voix), la clarté de l'italien, l'ardeur du chant, la projection des aigus. Il faudrait que je compare avec Bergonzi, son exact opposé sur bien des points, ce serait intéressant, puisque, toujours en fonction de ces ruptures de caractère que j'évoquais, Carlo est à la fois un noble intellectuel (Bergonzi idéal, a priori) et un chef des brigands à la poigne de fer (évidemment, Bonisolli est dans son registre). Le timbre de Sutherland est usée, on entend un peu la trame et les suraigus sont bien là mais lancés avec une certaine prudence, sans l'impact de la jeunesse. En revanche, voilà une artiste qui sait ce que phraser veut dire pour "conduire" un air (ou une cabalette), qui mène chacune de ses interventions avec une exactitude d'intonation, un art du rubato, un legato admirables. Le trille (contrairement à ce que j'ai pu lire) est encore très beau et elle chante vraiment dans son arbre généalogique. Ces années là, on a perdu la jeunesse et un peu de la beauté, mais on a gagné une articulation plus ferme et un ton justement mélancolique qui rappelle un peu ce qu'elle fut au tout début de sa carrière. Manuguerra manque d'héroïsme, de grandeur et de noirceur, mais du coup ne fait pas son méchant d'opérette (ça manque un petit peu quand même, étant donné le personnage). Son meilleur moment est à chercher dans sa grande scène finale, avec la confession et les interrogations métaphysiques, où la ligne est très belle et l'inquiétude perceptible. Mais le duo avec Sutherland est raté, ni l'un ni l'autre ne réussissant à rugir ou à effrayer un quart de seconde (il faut dire que la musique est vraiment curieuse ici, avec son rythme de valse). J'ai trouvé, comme souvent quand il n'y a pas de vocalises ou d'exploits vocaux (ici c'est un emploi de père noble), Ramey un peu ennuyeux : il passe, mais on le remarque pas et face aux timbres si personnels de Sutherland et de Bonisolli, on ne l'entend même plus dans le trio final. Curieux pour quelqu'un qui a la réputation d'un chanteur charismatique. Je suis décidément sensible à la battue de Bonynge, que je trouve non seulement attentif aux chanteurs (c'est à peu près tout ce qu'on lui accorde en général) mais surtout toujours parfait sur le plan du rythme. Je sais bien que ça n'est pas un coloriste de génie, mais le fait est que je l'ai très rarement entendu faire de véritables faux pas, ce que confirme ces Brigands (par exemple, justement, il arrive à ne pas rendre sautillante la valse du duo dont je parlais, ce qui aurait rendu le passage encore plus délicat).
l'enlevement de Clarissa a été un des évènements de ma jeunesse.

Stefano P

Re: Franco Bonisolli : braillard impénitent ou grand artiste mélancolique ?

Message par Stefano P » 13 juil. 2017, 19:21

Dommage que tu détestes aller à l'opéra, parce que si tu l'avais vu sur scène, tu te serais aperçu que la réputation de chanteur charismatique de Ramey était loin d'être usurpée... 8)

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Re: Franco Bonisolli : braillard impénitent ou grand artiste mélancolique ?

Message par aroldo » 13 juil. 2017, 19:51

Je trouve qu'en général, le charisme vocal s'entend aussi au disque. Même chez les chanteurs que je n'aime pas, je peux comprendre qu'on leur trouve un nescio quid, une personnalité, une singularité ... que je n'entends pas trop chez Ramey la plupart du temps.

Cela dit, je suis, comme tout le monde, toujours stupéfait par son aisance à vocaliser.
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Re: Franco Bonisolli : braillard impénitent ou grand artiste mélancolique ?

Message par aroldo » 13 juil. 2017, 21:46

J'ai écouté ensuite le Cavalliera Rusticana RCA dirigé par Gardelli. C'est à peu près conforme à mes souvenirs (hors une Mama Lucia hululante). Entre la direction vraiment pas vériste de Gardelli (ce qui nous vaut des "moments" surprenant de discrétion - l'entrée d'Alfio, la chanson de Lola - mais aussi une absence certaine d'urgence) et la Santuzza éblouissante (pour la constance vocale, personne ne peut lui être comparé) mais digne jusqu'à la statuaire d'Arroyo, Bonisolli est étonnamment sobre dans le duo, presque neutre, se contentant des accents de la musique et du texte qui "roulent" tout seuls. Ensuite, il fait vraiment de Cavalliera un opéra de ténor avec un adieu à la mère fantastique, qui donne l'impression d'un gigantesque crescendo, comme si la voix se dilatait et occupait tout l'espace, toujours plus grande, toujours plus ample, toujours plus rayonnante (ce dernier adjectif choisi pour éviter les éventuels relectures à caractère sexuelle de ma phrase). Et, malgré le gigantisme inouï du son, on perçoit encore l'élégance de la ligne (il suffit de comparer avec la dernière gravure de Del Monaco pour Decca que j'ai écoutée il y a peu).
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