Monteverdi - Madrigali vol 3 - Arts florissants - CD HM, 2017

L'actu; découvertes, sorties, critiques et conseils !
Répondre
Avatar du membre
EdeB
Dossiers ODB
Messages : 3253
Enregistré le : 08 mars 2003, 00:00
Localisation : Ubi est JdeB ...

Monteverdi - Madrigali vol 3 - Arts florissants - CD HM, 2017

Message par EdeB » 08 mars 2017, 17:20

Monteverdi - Madrigali - Vol. 3 Venezia

Libro settimo (1619)
Tempro la cetra, SWV 117. Sinfonia
Al lume de le stelle, SV138. [Torquato Tasso] (MA, ML, ZW, LA)
Con che soavità, SV139. [Battista Guarini] (MA)
Chiome d'oro, SV143. [Anonimo] (MA, ML)
Interrotte speranze, SV132. [Battista Guarini] (ZW, PA)
Lettera amorosa, SV141. [Claudio Achillini] (LR)
Ballo: Tirsi e Clori, SV145. [Alessandro Striggio (figlio)] (ML, MA, LR, PA, ZW, LA)

Libro ottavo (1638) Madrigali guerrieri et amorosi
Altri canti d'Amor, SV146. [Anonimo] (HM, MA, LR, PA, SC, LA)
Dolcissimo usignolo, SV161. [Battista Guarini] (HM, MA, LR, PA, CC)
Lamento de la ninfa, SV163. [Ottavio Rinuccini] (PA, SC, CC)
Combattimento di Tancredi e Clorinda, SV153 [Torquato Tasso, Gerusalemme liberata (XII. 52-62, 64-68)] (PA, Testo – HM, Clorinda – SC, Tancredi)

Miriam Allan (MA) – soprano
Mhairi Lawson (ML) – soprano
Hannah Morrison (HM) – soprano
Lucile Richardot (LR) – contralto
Paul Agnew (PA) – ténor
Zachary Wilder (ZW) – ténor
Sean Clayton (SC) – ténor
Lisandro Abadie (LA) – basse
Cyril Costanzo (CC) – basse

Les Arts Florissants
Paul Agnew – direction musicale

CD Les Arts Florissants, 2017 (Harmonia Mundi)


Che soave armonia

C’est avec ce troisième volume consacré au versant vénitien de l’œuvre de Monteverdi que se conclut l’anthologie des madrigaux commencée par Les Arts florissants, sous la direction de Paul Agnew. Publiés à Venise en 1619 et 1638, ces deux livres ultimes témoignant du parcours du compositeur et de son évolution stylistique (Paul Agnew n’a pas retenu ici le Sixième livre, publié à Venise mais manifestement dédié aux Gonzague, ni le Neuvième, publié posthumément) comportent 51 pièces, parmi lesquelles on trouve des madrigaux, mais aussi un ballo ou le célébrissime Combattimento di Tancredi e Clorinda. C’est parmi ces recueils qui comptent certaines des pièces les plus connues et les plus aimées de l’œuvre de Monteverdi que le maître d’œuvre de cette anthologie a fait un choix parfois cruel pour les pièces délaissées. Ainsi qu’il le précise dans sa préface, « Rendre justice à ces deux recueils monumentaux en un programme d’une heure est une véritable gageure. Je me suis efforcé de trouver un équilibre entre les œuvres “phares” et les pièces moins connues, et d’inclure au moins un exemple représentatif de chaque innovation formelle. Les enregistrements ont été réalisés lors de nos concerts à la Cité de la Musique, à Paris, puis traités pour ôter les bruits parasites et corriger les inévitables accrocs ».

Ce choix de la prise de son en public est judicieux car il préserve la suavité melliflue et sensuelle d’un superbe Con che soavità susurré par une Miriam Allan qui entraîne l’imagination sur les ailes d’un continuo miroitant ; l’urgence d’une Lettera amorosa haletante et parfois presque hallucinée, délivrée par une bouleversante Lucile Richardot ; les entrelacs séduisants d’un Chiome d'oro rendu à son élan de blason amoureux par des Miriam Allan et Mhairi Lawson inspirées et sémillantes ; élan soudainement brisé dans un Interrotte speranze dont Paul Agnew et Zachary Wilder distillent avec art les fêlures disjonctives. C’est un peu moins heureux pour un Ballo: Tirsi e Clori qui trébuche quelque peu avant l’entrée du chœur. Mais le ravissement reprend ses droits avec Altri canti d’amor suspendu avant l’entrée en scène d’un Mars belliqueux dont les joutes amoureuses emportent tout sur son passage ; auquel succède un Dolcissimo usignolo anthologique pour lequel Paul Agnew a fait entrer « la voix soprano soliste […] en premier et les autres voix sont introduites progressivement au fur et à mesure du déroulement du poème ». Si le Lamento de la Ninfa manque d’un presque rien pour qu’il torde le cœur, restant plus abattue que doloriste, c’est un Combattimento di Tancredi e Clorinda renouvelé que nous offre le Testo de Paul Agnew, lequel se garde bien de surinvestir un texte déjà empreint d’ardeur et de douleurs. Si on a entendu ce combat brossé de plus vives couleurs, cette discrétion laisse le génie du Tasse briller dans sa nudité retrouvée et laisse l’auditeur entrer dans le drame au gré de ses battements de cœur.

Soutenus par un chatoyant continuo qui participe de ces exposés des passions humaines, les solistes sont parfaitement homogènes et témoignent d’un plaisir de chanter communicatif.

Ainsi que dans les deux premiers volets, clarté et raffinement gouvernent ce florilège. Si l’on a entendu des interprétations de Monteverdi plus corporellement « italianisantes », c’est cette luminosité charmeuse, l’empathie immédiate qu’elle suscite et ces bonheurs successifs d’affects variés qui créent des atmosphères auxquelles il est bien difficile de résister...

Emmanuelle Pesqué

On trouvera un compte-rendu des deux premiers volumes de cette anthologie ici : www.odb-opera.com/viewtopic.php?f=4&t=15892&p=249935
Une monstrueuse aberration fait croire aux hommes que le langage est né pour faciliter leurs relations mutuelles. - M. Leiris
Mon blog, CMSDT-Spectacles Ch'io mi scordi di te : http://cmsdt-spectacles.blogspot.fr/
Mon blog consacré à Nancy Storace : http://annselinanancystorace.blogspot.fr/

Répondre