Renata Scotto (1934-2023)

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Renata Scotto (1934-2023)

Message par tuano » 21 févr. 2011, 22:36

Interview de la soprano qui a maintenant 76 ans :

http://www.capitalnewyork.com/article/c ... y-she-quit

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Message par aurele » 22 févr. 2011, 17:31

Merci pour le lien tuano. J'adore cette soprano malgré ses aigus très tirés car elle s'investissait énormément sur le plan dramatique. Les deux seules rôles parmi tous les rôles dans lesquels je l'ai entendu pour le moment et dans lesquels j'ai du mal sur le plan vocal, ce sont Norma et Abigaille.

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Message par aurele » 31 août 2011, 06:43

jerome a écrit :
PlacidoCarrerotti a écrit :typologie d’une Scotto ?
oh pourtant c'est pas bien compliqué ça :wink:
Scotto c'est un soprano lirico leggero qui a voulu jouer à la grenouille qui voulait se faire aussi grosse que le boeuf en chantant à partir du milieu des années 70 le répertoire de soprano drammatico coloratura puis le répertoire de soprano spinto. A t'elle réussi pour autant à devenir ces nouvelles typologies ? réponse: NON! Sa voix s'en est trouvée passablement et rapidement dégradée.
Aborder tel ou tel répertoire quand on n'a pas l'équipement de base en moyens vocaux ne signifie en rien s'inscrire dans la typologie vocale des dits répertoires.
Maintenant si on précise que dans la première partie de sa carrière, Scotto jouait comme une patate et qu'en embrassant sa mutation de répertoire, elle a acquis un réel savoir faire scénique et s'est trouvée musicalement dotée de réelles qualités émotionnelles, ça permet d'avaler un peu plus facilement une pilule vocale en théorie totalement "inavalable" et de goûter quelques perles telles qu'on peut les trouver dans Otello, Don Carlo et Suor Angelica au MET.
Et pourtant au final, Scotto n'aura jamais été un drammatico coloratura, ni un grand soprano verdien, ni un grand spinto.
aurele a écrit :Je défendrai Scotto coûte que coûte. Dans ce que j'ai entendu pour le moment, seules sa Norma et son Abigaille sont contestables vocalement. Sa Lady Macbeth que tu reconnais toi même beaucoup apprécier Jérôme est empreinte de génie et ce n'est pas un rôle de soprano lirico leggiero. Sa Cio-Cio-San est fantastique et n'est pas dans ce type de voix. Ce ne sont que deux exemples. Les aigus tirés de Scotto, j'en fais le plus souvent abstraction et je me laisse porter par son génie dramatique et sa très grande musicalité.
jerome a écrit :on va pas faire tout un débat ici sur Scotto. Je préciserai simplement que j'ai mis dans ses qualités le jeu dramatique et la musicalité.
Oui sa Lady Macbeth passe très bien car à cette époque sa voix était déjà tellement esquintée qu'elle rentrait très bien dans les exigences de Verdi qui voulait une voix laide. Quant à sa Cio-Cio-San, elle la chante comme un soprano lirico, ce que le rôle autorise. Mais à la base, Scotto est fondamentalement un lirico leggiero! Elle a perdu ensuite le côté leggiero sans pour autant devenir un authentique drammatico (coloratura) et encore moins un authentique spinto.
grenouille ... boeuf ... La Fontaine...
Il ne s'agissait pas de dire dans l'absolu si Scotto c'est bien ou non! le propos portait sur la confusion entre les typologies vocales des chanteurs et celles des rôles abordés. Ce n'est pas parce qu'un chanteur vadrouille dans des répertoires très différents et dans des typologies vocales très spécifiques (et surtout très différentes les unes des autres) qu'il est idoine partout. Sur le strict plan vocal (moyens vocaux), Scotto n'était pas idoine partout, très loin de là.
Je sais que tu as besoin de l'image dans beaucoup de rôles pour réussir à la supporter et heureusement on a pas mal de captations du Met. Je voue au pilori une Dessay qui prend des risques alors que je loue Scotto qui a touché à énormément de répertoires durant sa longue carrière et qui prenait des risques jusqu'à finir par y laisser sa voix avec un durcissement des aigus de plus en plus important au fur et à mesure des années et un suraigu devenu absent. C'est très paradoxal, je peux l'accorder à tout le monde. Les deux femmes ont par ailleurs un tempérament dramatique certain mais l'une est dans l'outrance de plus en plus alors que l'autre est dans la juste mesure et savait lorsqu'elle a pris des cours incarner ne serait-ce que d'un regard une émotion. Elle galvisait sans doute comme une Dessay ses partenaires également. On sait que Dessay a travaillé avec elle pour Traviata, ce qui ne s'est pas senti dans ce que j'ai pu entendre, soit une grande partie du rôle finalement bien que je m'étais juré de ne pas écouter. Parmi les grandes différences entre ces deux artistes aussi, il y a le matériau vocal de départ qui me paraît beaucoup plus riche chez Scotto et une adéquation au bel canto pour Scotto ainsi que l'italianità qui fait clairement défaut à Dessay mais bon elle est française et le gomme bien mal de toute manière vu sa prononciation exécrable de cette langue.

Scotto a été une grande belcantiste, on ne peut le nier selon moi que ce soit dans Bellini, Donizetti ou le Verdi très virtuose. Je ne vais me baser que sur les rôles dans lesquels je l'ai entendu en entier. Il y en a peu finalement : Alaide dans La Straniera, Lucia, Norma, Gilda et Violetta. J'ai sa Giulietta de I Capuleti e i Montecchi qui m'attend dans ma discothèque. J'ai un live aussi de sa Bolena. J'aurais rêvé d'une Imogène dont elle a chanté la scène de la folie. D'ailleurs, j'ai bien envie de la réécouter. J'ai son Adina qui m'attend aussi, rôle dans lequel elle est idéale me semble-t-il. Sa Norma n'est pas parfaite mais n'est pas à jeter sur l'ensemble du rôle, du moins en studio avec Levine, loin de là.

Elle a été pour moi l'une des plus grandes pucciniennes avec pour seule rivale à l'époque Freni. Sa Cio-Cio-San avec Barbirolli est fantastique, me bouleverse, Dieu sait que j'aime beaucoup celle de Freni aussi avec Karajan (film de Ponnelle). Je connais aussi des extraits de sa Manon (bouleversante au Met en vidéo et parfaite selon moi), de sa Mimi (là Freni la surpasse évidemment à mon avis), Tosca (il y a meilleure qu'elle) mais aussi Suor Angelica (une des meilleures sans doute dans la discographie), de sa Liu (la plus belle sans doute dans les deux airs et celle qui me touche le plus), de sa Fidelia (magnifique "Addio, addio, mio dolce amor" même bouleversant je dirais), de sa Musetta (un à côté, pas à son meilleur), de sa Lauretta et de Anna dans Le Villi/i]. J'ai réécouté sinon très récemment sa Giorgietta avec Maazel et elle est extraordinaire tant sur le plan vocal que dramatiquement et son duo avec Domingo comme toujours fonctionne merveilleusement.

Sa Desdemona face à Vickers au Met en vidéo est incontournable pour la confrontation de ces deux monstres sacrés vocalement et dramatiquement. Son Adriana Lecouvreur est un autre rôle dans lequel je la chérie, je sais que toi aussi Jérôme. C'est l'une de ses plus grandes incarnations.
Sa Maddalena di Coigny uniquement tentée en studio, je ne la connais pas encore en entier mais j'ai le disque et elle délivre le plus beau "La mamma morta" que j'ai entendu avec celui de Callas jusqu'à présent.
J'ai une Fedora tardive en vidéo et je suis bouleversé par les nombreux extraits entendus/vus. C'est trop tard vocalement, le vibrato est énorme mais quelle sensibilité et émotion. Elle se consume totalement. Freni est très émouvante à La Scala en DVD, plus intègre vocalement. Les deux sont à connaître selon moi. Son duo du II avec le Loris de Domingo est meilleur vocalement en studio dans un disque qu'ils ont fait d'ailleurs très beau et déjà très intense dramatiquement. Son "Tutto tramonta" dans le live me bouleverse totalement néanmoins et me fait venir les larmes comme celui de Freni.
J'ai sinon aussi une Gioconda en vidéo et j'ai hâte de voir et entendre cela en entier. C'est extraordinaire d'impact dramatique et vocal selon moi dans le duo du II avec la Laura de Toczyska. Un projet de disque dirigé par Levine avec Domingo, Troyanos, Milnes notamment a existé. Dommage qu'il n'ait pas vu le jour. C'était à la même époque que d'autres enregistrements que l'on a sous la direction du même chef. Cela a été remplacé par sa deuxième Mimi de studio avec le même chef et Milnes.
Sa Francesca da Rimini au Met en 1984 en vidéo est une autre de ses incarnations magistrales. Vocalement, ce n'est pas idéal mais je suis néanmoins très sensible à l'art de la musicienne.

Pour Verdi, je vais revenir sur Gilda et Violetta. J'ai une Gilda avec Giulini à écouter mais celle avec Kubelik est fantastique selon moi mais il est vrai que cela collait bien à ses moyens et que les aigus n'étaient pas encore entachés de scories et duretés réelles. Sa Violetta est ma préférée sans doute au côté de celle de Callas et même avec Muti je dois dire. Une Violetta aussi bouleversante au II et au III avec un "Addio del passato" aussi puissant, émouvant, vrai aussi, on en trouve peu sans doute. Au I, je la préfère avec Votto car j'ai aussi cette version ou en live à Tokyo car j'ai aussi ce live de 1973 en disque seulement mais je connais des extraits de la vidéo.
J'ai déjà évoqué sa Desdemona qui est une autre incarnation majeure de la dame et rôle qui convenait parfaitement à sa voix. Difficile pour moi de trouver plus bouleversante dans le rôle au IV. Elle avait les graves que n'avaient pas Freni, au combien autre belle Desdemona pourtant mais plus musicienne, moins volontaire aussi dans sa composition, plus fragile.
Son Elena est à connaître et je pense l'écouter dans le rôle. Pour la critique, elle égale Callas dans ce rôle qui a trouvé en Scotto une de ses héritières selon moi de manière générale.
J'ai un live avec sa Leonora de Il Trovatore à écouter bien que j'ai au moins entendu les deux airs qui étaient très bien interprétés dans mon souvenir.
Sa Giselda est à connaître aussi me semble-t-il.
Sa Lady Macbeth est avec Verrett et Callas une des meilleures à mon avis.
Sa Luisa Miller en live au Met tant par le jeu que par l'incarnation en DVD est merveilleuse, parfaite bien que j'aime beaucoup Moffo également en studio mais plus je dois dire à cause de la pulpe de la voix que par une incarnation marquante.
Son Elisabetta, j'adore ce que j'en connais et j'espère que la vidéo du Met avec l'Eboli de Troyanos, mezzo que j'adore paraîtra officiellement chez Sony Classical qui semble vouloir éditer des lives jusque là trouvables sur le marché parallèle. On a malheureusement pas Callas dans tout le rôle. Scotto s'approche d'elle dans "Tu che le vanità". J'aime beaucoup Harteros dans le rôle sinon actuellement, Caballé et j'apprécie Stella.
Elle a été aussi Amelia dans Un Ballo in maschera, cela doit plus relever de la curiosité qu'autre chose bien que ce ne soit pas inintéressant.

Au niveau du répertoire français, je connais sa Berthe dans Le Prophète, très bien mais pas impérissable forcément.
Elle a enregistré en duo avec Domingo Juliette et Manon au disque. C'est là aussi de beaux duos mais je la préfère dans les deux autres duos du disque dont celui de Fedora.
Sa Micaëla est une curiosité me semble-t-il, moins sa Marguerite qu'il faudrait que j'entende en entier.
Elle a chanté Charlotte et Manon sinon en entier. Charlotte pourrait m'intéresser si quelqu'un sait ce que cela donne, je suis preneur d'un commentaire.

Par ailleurs, si quelqu'un avait un tuyau pour que je puisse lui écrire et me procurer sa biographie, je suis preneur. Elle avait une grande connaissance de ses rôles et de sa voix à mon avis également. Si elle n'avait pas pris des risques, elle ne se serait pas brûlé les ailes mais on aurait pas autant d'interprétations fantastiques à mon avis. Il paraît qu'elle était arrogante. Je n'aime pas les gens comme cela mais cela n'enlève rien à son talent immense.

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Re: Renata Scotto

Message par MariaStuarda » 30 avr. 2016, 16:03

Je réanime le fil sur cette grande artiste car j'écoute en boucle depuis quelques jours son récital (piano) de Moscou en 1964 (un petit clin d’œil à Aurele avec qui nous avions discuté au moment du fil "les champions" sur l'opportunité de rouvrir une discussion sur le sujet).
Pour moi, elle fait partie de ces chanteuses à la voix pas forcément jolie, stylistiquement à la fois parfois limite (notamment dans les vocalises) parfois scotchante (notamment ses aigus et ses sons piani) mais qui a un effet immédiat d'émotion sur moi.
Chacun sait que sa période tardive est très contestée et c'est celle sur laquelle il reste principalement des enregistrements (Traviata, Nabucco, Norma, Rigoletto)

Appel aux spécialistes : quels enregistrements plus précoces sont à privilégier ?

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Re: Renata Scotto

Message par Franz Muzzano » 30 avr. 2016, 17:18

MariaStuarda a écrit :Je réanime le fil sur cette grande artiste car j'écoute en boucle depuis quelques jours son récital (piano) de Moscou en 1964 (un petit clin d’œil à Aurele avec qui nous avions discuté au moment du fil "les champions" sur l'opportunité de rouvrir une discussion sur le sujet).
Pour moi, elle fait partie de ces chanteuses à la voix pas forcément jolie, stylistiquement à la fois parfois limite (notamment dans les vocalises) parfois scotchante (notamment ses aigus et ses sons piani) mais qui a un effet immédiat d'émotion sur moi.
Chacun sait que sa période tardive est très contestée et c'est celle sur laquelle il reste principalement des enregistrements (Traviata, Nabucco, Norma, Rigoletto)

Appel aux spécialistes : quels enregistrements plus précoces sont à privilégier ?
Sa Lucia du Mai Musical Florentin de 1963, avec Kraus (quand les deux plus grands élèves de Mercedes Llopart se côtoient, c'est toujours sublime) et Bruscantini.
Nous n'avons pas besoin d'artistes, nous avons besoin de gens qui ont besoin d'artistes...

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Re: Renata Scotto

Message par Polyeucte » 30 avr. 2016, 18:26

MariaStuarda a écrit :Appel aux spécialistes : quels enregistrements plus précoces sont à privilégier ?
Sans être un spécialise... je dirais son premier Rigoletto studio avec Gavazzeni à la baguette (et Kraus et Bastianini!) en 1960...
http://erikcarnets.fr/
"Périsse mon œuvre, périsse mon Faust, mais que Polyeucte soit repris et vive " Charles GOUNOD

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Re: Renata Scotto

Message par Loïs » 30 avr. 2016, 19:03

MariaStuarda a écrit :l
Appel aux spécialistes : quels enregistrements plus précoces sont à privilégier ?
Bien sur sa sonnnambula (où elle joua les "doublures" de la Divine), celle de la Fenice de 1961 est un must avec Kraus et puis à écouter à genou sa Gilda de 66 à la Scala ( prendre l'enregistrement de la Saint Ambroise), avec Pavarotti, Paskalis et Giulini (qui ne voudra plus jamais diriger l'oeuvre après un tel niveau)

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Re: Renata Scotto

Message par Loïs » 30 avr. 2016, 19:04

MariaStuarda a écrit :
Appel aux spécialistes : quels enregistrements plus précoces sont à privilégier ?
So premier Butterfly aussi avec Bergonzi

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Re: Renata Scotto

Message par Loïs » 30 avr. 2016, 19:07

MariaStuarda a écrit : Appel aux spécialistes : quels enregistrements plus précoces sont à privilégier ?
Et dans la catégorie récital : Bellini en 1960 et un très beau de duos avec Freni (plus récent)

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Re: Renata Scotto

Message par philopera » 30 avr. 2016, 19:10

La Straniera à Palerme en 1968 : toute la scène finale est bouleversante
"Gérard Mortier a raison d'offrir Elektra sans entracte"
( Eric Dahan Libération 25/06/2005)

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