Mozart ré-utilisait il des airs d'opéras comme Rossini ?

Vous êtes néophyte et vous n'osez pas poster sur les autres forums, ce forum est pour vous !

Répondre
Avatar du membre
perrine
Ténor
Ténor
Messages : 883
Enregistré le : 03 août 2003, 23:00
Contact :

Mozart ré-utilisait il des airs d'opéras comme Rossini ?

Message par perrine » 05 août 2004, 10:46

Bonjour,

Nous avons eu un grand débat familial, que nous n'avons su résoudre, nos connaissances musicales étant tres limitées (mais notre soif d'apprendre tres vaste !) :
Mozart s'est il auto-pompé pour ses opéras ? si oui, lesquels !

Merci par avance
(papa dit que oui, ma tante dit que non, ma mère et moi sommes sans avis .. faut trancher !)

Avatar du membre
Alain_B
Alto
Alto
Messages : 428
Enregistré le : 07 mars 2003, 00:00
Localisation : Paris
Contact :

Message par Alain_B » 05 août 2004, 11:05

Je connais mal les 1ers, mais dans les derniers à part la citation explicite dans la scène du diner de Don Giovanni je ne vois pas.

Avatar du membre
richie3774
Ténor
Ténor
Messages : 513
Enregistré le : 06 avr. 2004, 23:00
Localisation : Quaregnon Belgique
Contact :

Message par richie3774 » 05 août 2004, 11:15

A ma connaissance, Mozart n'a pas réutilisé ses airs dans d'autres opéras.

Le seul cas de réutilisation que je connaisse, c'est la Grande Messe kv427 qu'il a réutilisée dans l'oratorio Davide Pennitente, en adaptant simplement les paroles.

Par contre, certains thèmes musicaux reviennent très régulièrement dans son oeuvre. Ex.: le thème de l'air "Un baccio di Mano" Kv541 est repris presque tel quel dans le premier mouvement de la symphonie n°41 kv551.

Autre ex: Le "dove sono" des Noces de Figaro ressemble étrangement à l'Agnus Dei de la Messe du Couronnement Kv317.

En tout cas, rien à voir avec un Haendel ou un Bach qui "s'auto-plagiaient" allégrement.

Avatar du membre
EdeB
Dossiers ODB
Messages : 3253
Enregistré le : 08 mars 2003, 00:00
Localisation : Ubi est JdeB ...

Re: Mozart ré-utilisait il des airs d'opéras comme Rossini ?

Message par EdeB » 05 août 2004, 12:18

perrine a écrit : Mozart s'est il auto-pompé pour ses opéras ? si oui, lesquels !

Merci par avance
(papa dit que oui, ma tante dit que non, ma mère et moi sommes sans avis .. faut trancher !)
Chère Perrine,
Je ne pense pas que Mozart se soit vraiment auto cité dans ses opéras.

Deux raisons principales à cela :
1/ il a finalement écrit fort peu d?opéras et avait donc le temps de les peaufiner, ayant au moins 6 mois pour se mettre à l?ouvrage. Donc pas de besoin de puiser dans les stocks déjà existants. (Il faut en finir avec Mozart-qui-compose-comme-l?éclair, il en a chié comme tout le monde. !) Alors que ses contemporains écrivent 1 à 3 opéras par saison, il en écrit 1 au grand maximum?
Modus operandi : Il écrivait généralement les récitatifs en premier, puis (dès qu?il connaissait les interprètes et pouvait tailler sur mesure) il écrivait les airs. Quand il ne connaissait pas les interprètes, il faisait des esquisses qu?il peaufinait/refaisait jusqu?à satisfaction des interprètes, qui pouvaient les lui faire refaire jusqu?à plus soif. En cas de reprise, les airs étaient refaits si besoin était.

2/ En ce qui concerne les opere serie, les situations dramatiques et la suite des airs obéissent à des codes très stricts, même s?ils obéissent à d?autres nécessités, à partir de l?assoupissement dramatique apporté par la Réforme, mais même dans ce cas, les règles (différentes) existent. De toute façon, il FAUT servir les interprètes qui ont leurs points forts et leur manies vocales qu?il faut flatter tout en dissimulant les défauts. Ce qui fait, que quels que soient les compositeurs, on peut, avec un peu d?oreille savoir pour qui l?air a été écrit, car la signature vocale est généralement très identifiable (en tout cas pour les monstres sacrés)
En ce qui concerne les opere buffe viennois, non seulement il faut servir la troupe italienne, mais il faut également se prêter au jeu d?échos thématiques et stylistiques entre les ?uvres jouées en alternance, les typologies des rôles données aux interprètes, les suites thématiques, etc. Ce qui fait que Mozart est très tributaire du Barbier de Paisiello (?uvre remarquable, d?ailleurs) auquel il a emprunté pas mal de citations rapides et d?atmosphères.
(cf entre autre, Mary HUNTER, The Culture of Opera Buffa in Mozart's Vienna: A Poetics of Entertainment. Princeton University Press, 1999)

Dans les autocitations proprement dites, il faut distinguer les jeux thématiques des citations musicales.
Dans le jeu autoparodique, l?extrait de Non piu andrai, hommage au public pragois et ironie du dramaturge ; « tu n?iras plus papillon amoureux etc? » juste avant le châtiment de D Juan.
Dans les recyclages mozartiens, je vois surtout la réutilisation des thèmes de l?Agnus Dei de la Missa Solemnis K 317 dans le Dove sono et l?Agnus Dei de la K 337 dans Porgi Amor. Mais il peut y en avoir d?autre.
Recyclage aussi, le Davidde Penitente, qui reprend une grande partie de la Messe K 427 (pour des raisons financières et d?économie de temps)

Par contre il s?est ENORMEMENT inspiré de ses contemporains.
Exemples en vrac et de mémoire.
Thème du Confutatis du Requiem pompé d?une symphonie d?Anfossi.
Thème principal de l?ouverture de Die Zauberflöte (et fugato du 1er mouvement de la Symphonie Prague ) = thèmes de Clementi (d?après les allégations de ce dernier, tiré de la sonate jouée lors de leur fameuse compétition de 1781)
Duo des hommes armés de Die Zauberflöte = choral luthérien « Ach Gott! Vom Himmel Sieh' Darein » sur lequel Mozart a aussi composé de la musique de chambre en 91.
Marche et danse du 3ème acte de Figaro, musique espagnole traditionnelle aussi connue que La Follia à l?époque, et certainement pompée à Martin Y Soler.
Jeu de renvoi entre Salieri et Mozart : liste assez importante d?emprunts mutuels et améliorations apportées avant réemprunts, pour les airs pour la Cavalieri et la Ferrarese.
Citations tout du long de Cosi qui est aussi un espèce d' "Opera Seria alla Gassman".
«In excelsis » de la Grande messe en Ut mineur, = Alleluia du Messiah de Handel
Il a pompé le ?Ippolito ed Aricia? de Traetta pour Mitridate, Sogno di Scipione, Lucio Silla etc.. Même les vocalises sont placées sur des mots similaires ou synonymes. Assez stupéfiant même pour ma petite oreille pour que je fonce poser la question à C Rousset qui dirigeait ce Traetta et qui me l?a très gentiment confirmé avec démonstration au clavier?

Désolée de ne pas pouvoir être plus précise.
Mozartiennement,
Emmanuelle

Avatar du membre
perrine
Ténor
Ténor
Messages : 883
Enregistré le : 03 août 2003, 23:00
Contact :

Message par perrine » 05 août 2004, 12:39

Merci Manoue,
ca c'est rapide, efficace et tres interressant.
Désolée de ne pas pouvoir être plus précise.
WAO !!!!! :worthy:
Pas mieux votre honneur !!!!!

Avatar du membre
EdeB
Dossiers ODB
Messages : 3253
Enregistré le : 08 mars 2003, 00:00
Localisation : Ubi est JdeB ...

Complément d'info

Message par EdeB » 06 août 2004, 19:48

Chère Perrine,
le hasard a voulu que j'aille à la médiathèque des Halles et que j'avise des actes de colloque sur Mozart que je ne connaissais pas.
Dans Les influences étrangères dans l'oeuvre de WA Mozart. Paris, 10-13 oct. 1956. Paris: CNRS, 1958, se trouve une communication de Luigi-Ferdinando Tagliavini (Bologne) sur L'opéra italien du jeune Mozart (pp. 125-156) qui liste d'autres emprunts ou influences.

Je pense rendre le doc en fin de semaine prochaine et tu pourras alors l'emprunter si cela t'intéresse.
Amicalement,
E

bajazet
Basse
Basse
Messages : 2413
Enregistré le : 12 juin 2004, 23:00
Contact :

Message par bajazet » 08 août 2004, 21:33

Si je puis ajouter à l'exposé si riche d'Emmanuelle :

Emprunts de Mozart à Gluck:
? littéral: le fandango de l'acte III des Noces vient du ballet Don Juan de Gluck (1761) mais peut-être s'y trouvait-il déjà dérivé.
? pastiche : la marche des prêtres à l'acte II de la Flûte fait délibérément écho à celle qui précède la scène du temple d'Apollon à l'acte I d'Alceste.

Dans Lucio Silla, l'air de Cinna au III ("De'più superbi il core") reprend littéralement un motif d'un air de Silvia dans Ascanio in Alba, de peu antérieur, et ce motif (ritournelle d'orchestre) se retrouve dans le concerto pour violon n° 3.

Enfin, un motif mélodique magnifique est commun à un air de La Finta Giardiniera (Ramiro je crois) et à un air du Bellerofonte de Myslivecek, mais je ne sais qui a copié l'autre, faute d'avoir la date du second.

tuano
Basse
Basse
Messages : 9270
Enregistré le : 30 mars 2003, 23:00
Localisation : France
Contact :

Message par tuano » 12 août 2004, 10:17

bajazet a écrit :
Dans Lucio Silla, l'air de Cinna au III ("De'più superbi il core") reprend littéralement un motif d'un air de Silvia dans Ascanio in Alba, de peu antérieur, et ce motif (ritournelle d'orchestre) se retrouve dans le concerto pour violon n° 3.
L'air ressemble aussi à celui de Tamiri à l'acte I de Il re pastore.

La médiathèque des Halles devra fermer pour raisons de sécurité. Est-ce que quelqu'un sait de quand à quand ce sera fermé ?

Avatar du membre
perrine
Ténor
Ténor
Messages : 883
Enregistré le : 03 août 2003, 23:00
Contact :

Message par perrine » 12 août 2004, 12:21

et hop, on s'absente 3 jours pour cause de boulot intensif, et y'a je ne sais combien de messages !! arg ! que ne suis je rentiere pour pouvoir vous lire toute la journée !!!

Merci pour toutes ces infos emmanuelle. Vraiment interressant.
Je transmets tout cela !

Allez, hop, je me rendors, et essayerais de lire tous vos posts des que possible.

Perrine

Répondre