Quant Bernd Weikl se découvre une vocation tardive

Biographies, livres historiques et autres bouquins relatifs à l'opéra.

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Lucas
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Re: Quant Bernd Weikl se découvre une vocation tardive

Message par Lucas » 15 mars 2016, 09:28

Musanne a écrit :
Schwannhilde a écrit :
Musanne a écrit :
Schwannhilde a écrit :Il sera difficile de démontrer qu'une musique, des notes, sont antisémites.
Quant aux livrets... Il faudra faire un procès à des mythes.
Cela peut se discuter. Certains font un rapprochement entre l'écriture vocale des rôles de Mime ou Beckmesser et la caractérisation que fait Wagner en plusieurs occasions de la façon de parler des Juifs non éduqués, qu'il qualifie par ex. dans Das Judentum in der Musik de "sifflante" (zischend), "stridente" (schrillend).
Quant aux mythes, on ne peut pas nier qu'au moins dans le Ring Wagner utilisait aussi le mythe dans une intention politique et sociale
Oui mais une référence à cette façon de parler n'est pas de l'antisémitisme.
Si, et du plus élémentaire ! Dans la phrase que je cite la référence à cette élocution "qui sonne de façon totalement étrangère et désagréable à nos oreilles" est clairement péjorative. Il parle de jargon ridicule. A partir de là il en vient à délirer sur l'incapacité des Juifs à exprimer une passion élevée et sincère. Dans la page précédente il s'en prend à l'apparence extérieure de ces Juifs, qui ne peut que susciter une répugnance instinctive.
Entièrement d'accord avec Musanne sans parler du culte du sang pur dans Parsifal. Vu que l'antisémitisme de Wagner était obsessionnel (au point de lui consacrer un ouvrage, Le judaïsme dans la musique, qui est l'une des pires horreurs écrite en la matière), il est difficile d'imaginer que Wagner n'ait pas multiplié les allusions antisémites dans ses livrets. Mais l'homme était assez intelligent pour procéder par allusions non explicites pour ne pas tomber sous le coup de la loi et ne pas remettre en cause la pérennité de ses opéras.

Bref, un homme, c'est un tout et lorsqu'il fonctionne par obsession, cette pathologie se retrouve automatiquement dans son œuvre qu'elle soit musicale (Wagner) ou politique (Le Pen). Nier cette évidence, c'est vivre au pays des bisounours.

Wagner, c'est à la fois une musique magnifique, des livrets qui peuvent aborder des sujets assez riches (la solitude de l'artiste novateur, l'omniprésence de l'ordre moral, la lutte des classes ...) mais aussi un antisémitisme odieux qui émaille son œuvre. S'il n'avait écrit que de la musique orchestrale, on aurait pu séparer le créateur et son art car la musique n'exprime pas des idées. Mais là, il s'agit d'opéras avec des textes bien précis qui peuvent servir de supports plus ou moins symboliques à des pensées funestes.

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Re: Quant Bernd Weikl se découvre une vocation tardive

Message par Schwannhilde » 15 mars 2016, 13:33

Lucas a écrit :Mais l'homme était assez intelligent pour procéder par allusions non explicites pour ne pas tomber sous le coup de la loi
JJ Nattiez montre aujourd'hui des allusions explicites. Il propose, avec de bons arguments, de traduire plutôt par La judéité dans la musique.
Quant à une loi en Allemagne à cette époque... Je dirais presque LOL
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Re: Quant Bernd Weikl se découvre une vocation tardive

Message par cosimus » 15 mars 2016, 14:15

Schwannhilde a écrit :
Lucas a écrit :Mais l'homme était assez intelligent pour procéder par allusions non explicites pour ne pas tomber sous le coup de la loi
JJ Nattiez montre aujourd'hui des allusions explicites. Il propose, avec de bons arguments, de traduire plutôt par La judéité dans la musique.
Quant à une loi en Allemagne à cette époque... Je dirais presque LOL
"Explicites" me semblent trop fort. Si ces allusions existent elles sont suffisamment discrètes pour ne pas apparaître comme telles (= chargées d'un contenu antisémite) à des spectateurs non avertis, surtout au XIXe siècle, et même encore de nos jours à des "wagnériens" qui ne veulent pas en entendre parler.
Quant au pamphlet "Das Judentum..." il est trop peu connu, et surtout trop peu lu. Certains "wagnériens" sont capables de lire des pavés plus ou moins digestes ou intéressants sur R.W. mais rechignent à lire la quinzaine de pages du pamphlet même quand on leur en propose une photocopie! :(
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Re: Quant Bernd Weikl se découvre une vocation tardive

Message par Schwannhilde » 17 mars 2016, 21:17

cosimus a écrit :"Explicites" me semblent trop fort. Si ces allusions existent elles sont suffisamment discrètes pour ne pas apparaître comme telles (= chargées d'un contenu antisémite) à des spectateurs non avertis, surtout au XIXe siècle, et même encore de nos jours à des "wagnériens" qui ne veulent pas en entendre parler.(
Et pourtant, des spectateurs juifs de l'époque avaient réagi à la musique des Meistersinger à Mannheim, Berlin... A Vienne (27 février 1870) aussi, y décelant dans la sérénade de Beckmesser " une caricature musicale d'une prière juive "*. L'examen des partitions est intéressant à ce sujet.
Je parle de la musique seule, même pas de la façon de chanter et du personnage de Beckmesser.
C'était donc explicite pour certaines personnes.

*Journal de Cosima & Wagner antisémite, JJ Nattiez 2015.
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Re: Quant Bernd Weikl se découvre une vocation tardive

Message par xavierscriabine » 18 mars 2016, 00:15

Schwannhilde a écrit : Et pourtant, des spectateurs juifs de l'époque avaient réagi à la musique des Meistersinger à Mannheim, Berlin... A Vienne (27 février 1870) aussi, y décelant dans la sérénade de Beckmesser " une caricature musicale d'une prière juive "*.
Intéressant, je n'avais jamais pensé à un tel rapprochement, y a-t-il une abondance d'intervalles de quarte dans les prières juives?
Ou bien est-ce la courbe mélodique zigzaguante?

Dans quelle mesure ne peut-on pas attribuer cette réaction au fait que Wagner était ouvertement antisémite et qu'on pouvait, même involontairement, être tenté de voir dans sa musique des allusions antisémites, surtout chez les spectateurs juifs?

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Re: Quant Bernd Weikl se découvre une vocation tardive

Message par cosimus » 18 mars 2016, 00:56

Schwannhilde a écrit :
cosimus a écrit :"Explicites" me semblent trop fort. Si ces allusions existent elles sont suffisamment discrètes pour ne pas apparaître comme telles (= chargées d'un contenu antisémite) à des spectateurs non avertis, surtout au XIXe siècle, et même encore de nos jours à des "wagnériens" qui ne veulent pas en entendre parler.(
Et pourtant, des spectateurs juifs de l'époque avaient réagi à la musique des Meistersinger à Mannheim, Berlin... A Vienne (27 février 1870) aussi, y décelant dans la sérénade de Beckmesser " une caricature musicale d'une prière juive "*. L'examen des partitions est intéressant à ce sujet.
Je parle de la musique seule, même pas de la façon de chanter et du personnage de Beckmesser.
C'était donc explicite pour certaines personnes.

*Journal de Cosima & Wagner antisémite, JJ Nattiez 2015.
Tout à fait d'accord sur ce point (mais ces spectateurs juifs ne font pas partie des spectateurs non avertis, et leurs réactions, justifiées, ne devaient toucher qu'un cercle restreint.)Je réagissais en fait à l'expression de Lucas "tomber sous le coup de la loi"
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Re: Quant Bernd Weikl se découvre une vocation tardive

Message par Schwannhilde » 18 mars 2016, 15:11

xavierscriabine a écrit :
Schwannhilde a écrit : Et pourtant, des spectateurs juifs de l'époque avaient réagi à la musique des Meistersinger à Mannheim, Berlin... A Vienne (27 février 1870) aussi, y décelant dans la sérénade de Beckmesser " une caricature musicale d'une prière juive "*.
Intéressant, je n'avais jamais pensé à un tel rapprochement, y a-t-il une abondance d'intervalles de quarte dans les prières juives?
Ou bien est-ce la courbe mélodique zigzaguante?

Dans quelle mesure ne peut-on pas attribuer cette réaction au fait que Wagner était ouvertement antisémite et qu'on pouvait, même involontairement, être tenté de voir dans sa musique des allusions antisémites, surtout chez les spectateurs juifs?
Je vais répondre dans le fil Wagner antisémite.
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