Quelques messages à ce sujet
Dongio :
Je voudrais me permettre de rajouter une chose qui est la passion de l'artiste elle même pour son art et pour son chant. Chanter c'est vivre, c'est survivre et toutes les respirations, même bruyantes, sont des bouffées d'oxygène que l'on happe pour ne pas étouffer. Je ne suis pas un inconditionnel de Gruberova et ne l'ai jamais été. Je prends donc d'autant plus facilement sa défense. Pour beaucoup de ces chanteurs ou cantatrices, chanter est une façon de dire que l'on est toujours vivant. Ne plus chanter, c'est affirmer que l'on est un petit peu mort. Et effectivement la conjonction de la "survie" de la chanteuse, associée à la joie du public d'assister encore à une représentation d'un monstre sacré, fait que la représentation garde de sa fascination, ne serait ce que pour une note volée, ou un moment fugace.
Nous avions eu la même discussion à peu près suite au récital aixois de Jessye Norman qui dévoilait son handicap actuel, se montrait dans sa tristesse, chantait encore, même si bien entendu la splendeur vocale du passé n'était plus que souvenir. Ne plus se tenir droite, ne plus avoir l'adoration du public, ou plus simplement renoncer à ce que l'on a toujours été et ce pour quoi on s'est battu toute sa vie: c'est mettre les deux pieds dans la tombe et se laisser couler. Certain(e)s refuseront toujours la fin de Margaret Price terminant sa vie en éleveuse de chien dans le Pays de Galles ... Tant que le public suit, et y trouve plaisir, je ne vois pas pourquoi il faudrait empêcher ce type de représentation. Le jour où plus personne n'ira, car vraiment la voix ne suivra plus, alors effectivement les feux de la rampe s'éteindront seuls.
Peu importe alors les critiques négatives, on n'est plus ici dans l'analyse raisonnée de l'art du chant, c'est autre chose : le don de soi du public pour un(e) artiste qui a donné de soi toute sa vie (on se rappelle Callas et son "ho dato tutto a te" de Médée, lancé non pas à Jason mais au public de la Scala ce soir là.). Ces moments là sont au delà de la raison. Ce sont des moments du cœur, de la passion, de l'émotion, et du remerciement partagé.